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He soon became the idol of his students whom he attracted in large numbers by his clear, simple and yet masterly exposition of libéral ideas. In 187 1 he was elected to the Chamber of Deputies where he represented the Département de la Seine. Although he was in favor of many reforms, he never entertained revolutionary opinions, and always remained faithful to his principle that nations should gradually transform their institutions without having recourse to révolution. He first became known as a writer by his Histoire du Droit de Propriété en Europe. His Paris en Amérique^ published under the name of René Lefebvre, created quite a sensation on account of its satirical con- ception of French institutions, contrasted with an un- disguised admiration for the United States. Besides thèse his principal works are: Essai sur la Vie et les Ouvrages de Savigny^ in which he clearly expounds his • • • 111 IV PREFACE ethical principles; Histoire politique des Etats-Unis^ wherein his ideals of political institutions are dealt with; Recherches sur la Condition civile et politique des FemmeSy Les Etats-Unis et la France^ Le Prince Caniche^ Abdallah^ Œuvres sociales de Channingy and last but not least his Contes bleus and Nouveaux Contes bleus^ dedi- cated to his granddaughter Gabrielle. He delighted in writing for children and was wont to say that "if the aim of éducation is to make honest men by teaching children that justice should rule the world, then the taie of *Blue-Beard^ is safer to read than the historyof Henry VIII." The Contes bleus are charming little taies, entirely novel in thème, very. simple and clear in language, and abounding in arch reflections and humorous touches. They inevitably draw the reader into a pleasant and Personal interest in the author. Laboulaye died in 1883. C. Fontaine. Washington, D.C, January, 1900. Contes Bleus LE FERMIER PRUDENT Il y avait près de Raguse^ un fermier qui s'occupait aussi dé commerce. Un jour, il partit pour la ville, emportant avec lui tout son argent, afin de faire quelques achats. En arrivant à un carrefour, il demanda à un vieil- lard qui se trouvait là quelle route il lui fallait prendre. 5 — Je te le dirai si tu me donnes cent écus, répondit l'étranger; je ne parle pas à moins: chacun de mes avis vaut cent écus. — Ah! pensa le fermier en regardant la mine de l'étranger, qui avait Tair d'un renard, qu'est-ce que peut 10 être un avis qui vaut cent écus? Ce doit être quelque chose de bien rare, car, en général, on^ vous donne pour rien des conseils; il est vrai qu'ils ne valent pas davan- tage. Allons, dit-il à l'homme, parle, voilà tes cent écus. — Écoute donc, reprit l'étranger; cette route qui va 15 tout droit, c'est la route d'aujourd'hui, celle qui fait un coude, c'est la route de demain. J'ai encore un avis à te donner, continua-t-il ; mais il faut aussi me le payer cent écus. Le fermier réfléchit longtemps, puis il se décida. 20 Puisque j'ai payé le premier conseil; je puis bien payer le second. Et il donna encore cent écus. 2 CONTES BLEUS — Écoute donc, lui dit l'étranger: Quand tu seras* en voyage et que tu entreras dans une hôtellerie, si rhôte est vieux et si le vin est jeune,^ va-t'en au plus vite, si tu ne veux pas qu'il t'arrive malheur. Donne- 5 moi encore cent écus, ajouta-t-il, j'ai encore quelque chose à te dire. Le fermier se mit à réfléchir. — Qu'est-ce donc que ce nouvel avis ? Bah I puisque j'en ai acheté deux, je peux bien payer le troisième. lo Et il donna ses derniers cent écus. — Écoute donc, lui dit l'étranger: si jamais tu te mets en colère, garde la moitié de ton courroux pour le lendemain, n'use pas toute ta colère en un jour. Le fermier reprit le chemin de sa maison, oU il arriva 15 les mains vides. — Qu'as-tu acheté? lui demande sa femme. — Rien que trois avis, répondit-il qui m'ont coûté chacun cent écus. — Bien I dissipe ton argent, jette-le au vent, suivant 20 ton habitude. — Ma chère femme, reprit doucement le fermier, je ne regrette pas mon argent; tu vas voir quelles sont les paroles que j'ai payées. Et il lui conta ce qu'on lui avait dit; sur quoi la femme 25 haussa les épaules et l'appela un fou qui ruinait sa mai- son et mettait ses enfants sur la paille.* Quelque temps après, un marchand s'arrêta devant la porte du fermier, avec deux voitures pleines de marchan- dises. Il avait perdu en route un associé, et offrit au 30 fermier cinquante écus s'il voulait se charger d'une des voitures et venir avec lui à la ville. ^ — J'espère, dit à son mari la femme du fermier, que LE FERMIER PRUDENT 3 tu ne refuseras pas; cette fois du moins tu gagneras quelque chose. On partit; le marchand conduisait la première voiture, le fermier menait la seconde. Le temps était mauvais, les chemins rompus, on n'avançait qu'à grand'peine. 5 On arriva enfin aux deux routes, le marchand demanda celle qu'il fallait prendre. — C'est celle de demain, dit le fermier; elle est plus longue, mais elle est plus sûre. Le marchand voulut prendre la route d'aujourd'hui. 10 — Quand vous me donneriez cent écus, dit le fermier, je n'irais pas par ce chemin. On se sépara donc. Le fermier, qui avait choisi la voie la plus longue, arriva néanmoins bien avant son compagnon, sans que sa voiture eût souffert. Le mar- 15 chand n'arriva qu'à la nuit; sa voiture était tombée dans un marais; tout le chargement était endommagé, et le maître était blessé, par-dessus le marché.^ Dans la première auberge oli on descendit, il y avait un vieil hôtelier, une branche de sapin ^ annonçait qu'on 20 y vendait à bon marché du vin nouveau.* Le marchand voulut s'arrêter là pour y passer la nuit — Je ne le ferais pas quand vous me donneriez cent écus ! s'écria le fermier. Et il sortit.au plus vite, laissant son compagnon. 25 Vers le soir, quelques jeunes désœuvrés qui avaient trop goûté au vin nouveau se querellèrent à propos d'une cause futile. On tira les couteaux; l'hôte, alourdi par les années, n'eut pas la force de séparer ni d'apaiser les combattants. Il y eut un homme tué, et comme on 30 'craignait la justice, on cacha le cadavre dans la voiture du marchand. 4 CONTES BLEUS Celui-ci, qui avait bien dormi et n'avait rien entendu, se leva de grand matin pour atteler ses chevaux. E^bi^é ' de trouver un mort sur son chariot, il voulut fuir au plus vite pour ne pas être mêlé dans un procès fâcheux; mais 5 il avait compté sans la police; on courut après lui. En attendant que la justice éclaircît^ l'affaire, on jeta mon* homme en prison et on confisqua tout son avoir. Quand le fermier apprit ce qui était arrivé à son com- pagnon, il voulut au moins mettre en sûreté sa voiture, lo et reprit le chemin de sa maison. Comme il approchait du jardin, il aperçut à la brune un jeune soldat monté sur un de ses plus beaux pruniers, et qui faisait tran- quillement la récolte du bien d'autrui. Le fermier arma son fusil pour tuer le voleur; mais il réfléchit. 15 — J'ai payé cent écus, pensa-t-il, pour apprendre qu'il ne faut pas dépenser toute sa colère en un jour. Atten- dons à demain, mon voleur reviendra. Il prit un détour pour entrer dans la maison par un autre côté, et comme il frappait à la porte, voilà le jeune 20 soldat qui se jette dans ses bras en criant: — Mon père, j'ai profité de mon congé pour vous surprendre et vous embrasser. Le fermier dit alors à sa femme: Écoute maintenant ce qui m'est arrivé, tu -verras si 25 j*ai payé trop cher mes trois avis. Il lui conta toute l'histoire; et comme le pauvre mar- chand fut pendu, quoi qu'il pût faire,' le fermier se trouva l'héritier de cet imprudent. Devenu riche, il répétait tous les jours qu'on ne paye jamais trop cher 30 un bon conseil, et, pour la première fois, sa femme était de son avis. UNE BONNE FEMME II UNE BONNE FEMME Il y avait une fois un bonhomme qui s'appelait Gud- brand; il vivait dans une ferme isolée et placée sur un coteau lointain ; aussi l'appelait-on Gudbrand du Coteau. Maintenant il faut savoir que ce Gudbrand avait une excellente femme, ce qui arrive quelquefois; mais ce 5 qui est plus rare, c'est que Gudbrand connaissait le prix d'un pareil trésor. Aussi les deux époux vivaient-ils^ dans une paix profonde, jouissant de leur commun bon- heur, sans s'inquiéter ni de la fortune ni des années. Tout ce que faisait Gudbrand, sa femme l'avait pensé 10 et souhaité par avance, si bien que le bonhomme ne pouvait rien toucher, rien changer, rien remuer dans la maison, sans que sa compagne ne le remerciât^ d'avoir deviné et prévenu son désir. La vie, du reste, leur était facile: la ferme leur appar- 15 tenait, ils avaient cent écus dans un tiroir de leur buffet et deux bonnes vache§ à l'étable. Rien ne leur man- quait; ils pouvaient vieillir doucement sans craindre la fatigue et la misère, sans avoir besoin de la pitié ni même de l'amitié d'autrui. 20 Un soir qu'ils causaient ensemble de leurs travaux et de leurs projets, la femme de Gudbrand dit à son mari: — Cher ami,* il me vient une idée: vous devriez prendre une de nos vaches et la mener vendre à la ville ; celle que nous garderons suffira pour nous donner du 25 6 CONTES BLEUS beurre et du lait. Qu'avons-nous besoin de nous fatiguer pour les autres? Nous avons de l'argent qui dort* dans le tiroir, nous n'avons pas d'enfants, ne vaudrait-il pas mieux ménager nos bras qui vieillissent? Vous aurez 5 toujours de quoi vous occuper au logis; il ne vous man- quera jamais de meubles ni d'outils à réparer, et moi je resterai davantage auprès de vous avec ma quenouille et mon fuseau. Gudbrand trouva que sa femme avait raison, comme 10 toujours; dès le lendemain, par une belle matinée, il se rendit à la ville avec la vache qu'il voulait vendre. Mais ce n'était pas jour de marché, il ne trouva pas d'ache- teur. — Très bien! très bien! dit Gudbrand; au pis aller, 15 j'en serai quitte pour^ reconduire ma vache oîi je l'ai prise; j'ai du foin et de la litière pour la béte, et la route n'est pas plus longue en revenant qu'en allant. Sur quoi il reprit tranquillement le chemin de sa maison. 20 Au bout de quelques heures, et comme il se sentait un peu fatigué, il rencontra un homme qui menait un cheval à la ville, une bête de forte encolure, toute sellée et toute bridée. «La route est longue et la nuit vient vite, pensa Gudbrand; à tirer ma vache je n'en finirai 25 pas," et demain il faudra recommencer cette promenade. Voilà un cheval qui ferait mieux mon affaire;* je ren- trerais chez moi aussi fier qu'un bailli. Qui serait heu- reuse de voir son mari passer en triomphe comme un empereur romain? Ce serait la femme du vieux Gud- 30 brand.» Sur cette réflexion il arrêta le maquignon, et il échan- gea sa vache contre le cheval. UNE BONNE FEMME 7 Une fois monté, il eut quelque regret Gudbrand était vieux et lourd, le cheval était jeune, vif, ombrageux; au bout d'une demi-heure, le cavalier allait à pied, tenant la bride au bras et tirant à grand'peine une béte qui dressait sa tête au vent ou se cabrait à chaque pierre de 5 la route. — Mauvaise acquisition, pensait-îl, quand il aperçut un paysan qui poussait devant lui un porc gras à lard^ et dont le ventre touchait à terre. — Un clou qui est utile vaut mieux qu'un diamant 10 qui brille et ne sert à rien, dit Gudbrand; ma femme le répète souvent. £t il changea son cheval contre le porc. C'était une heureuse idée, mais le bonhomme avait compté sans son hôte. Dom' pourceau était las et ne 15 voulait plus bouger. Gudbrand parla, pria, jura; ce fut en vain. Il tira le porc par le museau, il le poussa par derrière, il le battit de tous les côtés, peine perdue.* Le cochon resta dans la poussière comme un vaisseau échoué dans la vase. Le fermier se désolait quand 20 passa devant lui un homme menant une chèvre, qui, le pis tout gonflé de lait, sautait, courait, cabriolait avec une vivacité qui charmait les yeux. — Voilà ce qu'il me faut, s'écria Gudbrand; j'aime mieux cette chèvre, si gaie, si vivante, que cet ignoble 25 et stupîde animal. Sur quoi, il changea le porc contre la chèvre. Tout alla bien pendant une demi-heure. La demoi- selle aux longues cornes entraînait Gudbrand, qui riait de ses folies; mais quand on n'a plus vingt ans, on se 30 lasse vite de grimper sur les rochers; aussi le fermier, rencontrant un berger qui gardait son troupeau, ne se fît- 8 CONTES BLEUS il aucun scrupule^ de troquer sa chèvre contre une brebis. «J'aurai autant de lait, pensa-t-il, et cette bête- là, du moins, sera tranquille; elle ne fatiguera ni ma femme ni moi.» 5 Gudbrand avait bien jugé: rien de plus doux que la brebis. Elle n'avait pas de caprices, elle ne donnait pas de coups de tête, mais elle n'avançait pas et elle bêlait toujours. Séparée de ses sœurs, elle voulait retourner auprès d'elles, et plus Gudbrand la tirait, plus 10 elle gémissait misérablement. — Au diable la sotte pécore! s'écria Gudbrand; elle est aussi têtue et aussi pleurnicheuse que la femme de mon voisin. Qui me délivrera de cette bête bêlante, pleurante, gémissante ? A tout prix je m'en débarrasse. 15 — Marché fait,^ si vous voulez, compère, dit un pay- san qui passait; prenez-moi* cette oie grasse et de bonne mine, cela vaudra mieux que ce méchant mouton qui va crever dans une heure. — Soit, dit Gudbrand ; mieux vaut une. oie vivante 20 qu'une brebis morte. Et il emporta l'oie avec lui. Ce n'était pas chose facile: l'oiseau était mauvais compagnon. Inquiet de ne plus se sentir à terre, il se défendait du* bec, des pattes et des ailes. Gudbrand 25 fut bientôt las de lutter. — Pouah I dit-il, l'oie est une vilaine bête; ma femme n'en a jamais voulu à la maison. Sur quoi, à la première ferme oli il s'arrêta, il troqua l'oie contre un beau coq, riche en plumage et bien 30 éperonné.** Cette fois, il était satisfait; le coq, il est vrai, criait de temps en temps d'une voix trop enrouée pour charmer u UNE BONNE FEMME 9 des oreilles délicates; mais comme on lui avait ficelé les pattes et qu'on le tenait la tête en bas, il finissait par se faire ^ à son sort. Le seul désagrément, c'est que la journée avançait. Gudbrand, parti avant l'aurore, se trouvait le ^ soir à jeun et sans argent. La route était 5 longue encore ; le fermier sentait que ses jambes faiblis- saient et qu'il avait faim : il fallait prendre un parti héroïque. Au premier cabaret, Gudbrand vendit son coq pour un écu, et, comme il avait bon appétit, il dépensa jusqu'au dernier sou pour se rassasier. 10 — Après tout, pensa-t-il, à quoi me servirait un coq quand je serais mort de faim? En approchant de la maison, le seigneur du Coteau se mit à réfléchir sur la singulière façon dont avait tourné son voyage. 15 Avant d'entrer chez lui, il s'arrêta à la maison du voisin Pierre la Barbe-Grise, comme on le nommait dans le pays. — Eh bien ! compère, dit la Barbe-Grise, comment ont été vos affaires à la ville ? — Comme ci, comme ça,* répondit Gudbrand ; je ne 20 peux pas dire que j*aie été très heureux, je ne peux pas me plaindre non plus. Et il conta tout ce qui lui était arrivé. — Voisin, dit Pierre, vous avez fait là de belle besogne;* vous serez joliment reçu par votre ménagère. 25 Que le ciel vous protège! Pour dix écus je ne voudrais - pas être dans vos souliers. — Bon, dit Gudbrand du Coteau, les choses auraient pu tourner plus mal pour moi; mais à présent je suis tranquille et j'ai l'âme en repos. Que^ j'aie eu tort ou 30 raison, ma femme est si bonne, qu'elle n'aura pas un mot à dire sur tout ce que j'ai fait. lO CONTES BLEUS I — Je vous écoute, voisin, et je vous admire ; mais, avi tout le respect que je vous dois, je ne crois pas un mj de ce que vous me dites. 1 — Voulez-vous parier que j'ai raison, dit Gudbrand devant du logis. Mais quand une bonne et jolie fille a un champ sous sa fenêtre, la première chose qui vient 15 dans le champ c'est un jeune fermier qui offre honnête- ment son avoir, son cœur et sa main. Dobrunka fut bientôt mariée; les douze mois n'abandonnèrent pas leur enfant. Plus d'une fois, quand la bise soufflait trop fort et que les vitraux tremblaient dans leur cadre de plomb, 20 le bonhomme Janvier vint boucher avec de la neige toutes les fentes de la maison afin que le froid n'entrât point dans ce paisible réduit. Ainsi vécut Dobrunka, toujours bonne, toujours heu- reuse. 25 26 CONTES BLEUS LE PACHA BERGER Conte turc Il y avait une fois, à Bagdad,^ un pacha fort aimé du sultan, fort redouté de ses sujets. Ali (c'était le nom de notre homme) était un vrai musulman, un Turc de la vieille roche.^ Dès que Taube du jour permettait de 5 distinguer un fil blanc d'un fil noir, il étendait un tapis à terre, et le visage tourné vers la Mecque,* il faisait pieusement ses ablutions et ses prières. Ses dévotions achevées, deux esclaves noirs, vêtus d'écarlate, lui appor- taient la pipe et le café. Ali s'installait sur un divan, 10 les jambes croisées, et restait ainsi tout le long du jour. Boire à petits coups du café d'Arabie,* noir, amer et brûlant, fumer lentement du tabac de Smyrne^ dans un long narguilé^ dormir, ne rien faire et penser moins encore, c'était là sa façon de gouverner. Chaque mois, rS il est vrai, un ordre venu de Stamboul lui enjoignait d'envoyer au trésor impérial un million de piastres, l'impôt du pachalick; ce jour-là, le bon Ali, sortant de sa quiétude ordinaire, appelait devant lui les plus riches marchands de Bagdad et leur demandait poliment deux 2o millions de piastres. Les pauvres gens levaient les mains au ciel, se frappaient la poitrine, s'arrachaient la barbe et juraient en pleurant qu'ils n'avaient pas un para; ils imploraient la pitié du pacha, la miséricorde du sultan. Sur quoi Ali, sans cesser de prendre son L£ PACHA BERGER 2J café, les faisait bâtonner sur la plante des pieds jusqu'à ce qu'on lui apportât cet argent qui n'existait pas, et qu'on finissait toujours par trouver quelque part. La somme comptée, le fidèle administrateur en envoyait la moitié au sultan et jetait l'autre moitié dans ses coffres, 5 puis il se remettait à fumer. Quelquefois, malgré sa patience, il se plaignait, ce jour-là, des soucis de la grandeur, et des fatigues du pouvoir; mais, le lende- main, il n'y pensait plus, et, le mois suivant, il levait l'impôt avec le même calme et le même désintéresse- 10 ment. C'était le modèle des pachas. Après la pipe, le café et l'argent, ce qu'Ali aimait le mieux, c'était sa fille, Charme -des -Yeux, Il avait raison de l'aimer, car, dans sa fille, comme dans un vivant miroir, Ali se* revoyait avec toutes ses vertus. Aussi 15 nonchalante que belle, Charme -des -Yeux ne pouvait pas faire un pas sans avoir auprès d'elle trois femmes tou- jours prêtes à la servir: une esclave blanche avait soin de sa coiffure et de sa toilette, une esclave jaune lui tenait le miroir ou l'éventail, une esclave noire l'amusait 20 par ses grimaces et recevait ses caresses ou ses coups. Chaque matin, la fille du pacha sortait dans un grand chariot traîné par des bœufs; elle passait trois heures au bain, et usait le reste du temps en visites, occupée à manger des confitures de roses, à boire des sorbets à la 25 grenade, à regarder des danseuses, à se moquer de ses bonnes amies. Après une journée si bien remplie, elle rentrait au palais, embrassait son père et dormait sans rêver. Lire, réfléchir, broder, faire de la musique, ce sont là des fatigues que Charme-des- Yeux avait soin 30 de laisser à ses servantes. Quand on est jeune, belle, riche et fille de pacha, on est née pour s'amuser, et qu'y 28 CONTES BLEUS a-t-il de plus amusant et de plus glorieux que de ne rien faire? C'est ainsi que raisonnent les Turcs; mais com- bien de chrétiens qui sont Turcs à cet endroit I ^ Il n'y a point ici-bas de bonheur sans mélange, autre- 5 ment la terre ferait oublier le ciel. Ali en fit l'ex- périence. Un jour d'impôt," le vigilant pacha, moins éveillé que de coutume, fit bâtonner par mégarde un raya grec, protégé de l'Angleterre. Le battu cria: c'était son droit; mais le consul anglais, qui avait mal lo dormi, cria plus fort que le battu, et l'Angleterre, qui ne dort jamais, cria plus fort que le consul. On hurla dans les journaux, on vociféra au parlement, on montra le poing à Constantinople." Tant de bruit pour si peu de chose fatigua le sultan, et, ne pouvant se débarrasser de 15 sa fidèle alliée, dont il avait peur, il voulut au moins se débarrasser du pacha, cause innocente de tout ce vacarme. La première idée de Sa Hautesse fut de faire étrangler son ancien ami; mais Elle réfléchit que le supplice d'un musulman donnerait trop d'orgueil et trop 20 de joie à ces chiens de chrétiens qui aboient toujours. Aussi, dans son inépuisable clémence, le commandeur des croyants se contenta-t-il* d'ordonner qu'on jetât le pacha sur quelque plage déserte, et qu'on l'y laissât mourir de faim. 25 Par bonheur pour Ali, son successeur et son juge était un vieux pacha, chez qui l'âge tempérait le zèle, et qui savait par expérience que la volonté des sultans n'est pas absolument immuable. Il se dit qu'un jour Sa Hau- tesse pourrait regretter un ancien ami, et qu'alors Elle 30 lui saurait gré d'une clémence qui ne lui coûtait rien. Il se fit amener en secret Ali et sa fille, leur donna des habits d'esclave et quelques piastres, et les prévint que. LE PACHA BERGER 29 si le lendemain on les retrouvait dans le pachalick, ou si jamais on entendait prononcer leur nom, il les ferait étrangler ou décapiter, à leur choix. AH le remercia de tant de bonté ; une heure après, il était parti avec une caravane qui gagnait la Syrie.^ Dès le soir on proclama 5 dans les rues de Bagdad la chute et Texil du pacha ; ce fut une ivresse universelle. De toutes parts on célébrait la justice et la vigilance du sultan, qui avait toujours Tceil ouvert sur les misères de ses enfants. Aussi le mois suivant, quand le nouveau pacha, qui avait la 10 main un peu lourde, demanda deux millions et demi de piastres, le bon peuple de Bagdad paya-t-il sans comp- ter,* trop heureux d'avoir enfin échappé aux serres du brigand qui, durant tant d'années, l'avait pillé impuné- ment. 15 "^ Sauver sa tète est une bonne chose, maïs ce n'est pas tout: il faut vivre; c'est une besogne difficile pour un homme habitué à compter sur le travail et l'argent d'au trui. En arrivant à Damas,' Ali se trouva sans res- sources. Inconnu, sans amis, sans parents, il mourait 20 de faim, et, douleur plus grande pour un père ! il voyait sa fille pâlir et dépérir auprès de lui. Que faire en cette extrémité? tendre la main?"* Cela était indigne d'un personnage qui, la veille encore, avait un peuple à ses genoux. Travailler ? Ali avait toujours vécu noblement, 25 il ne savait rien faire. Tout son secret, quand il avait besoin d'argent, était de faire bâtonner les gens; mais pour exercer en paix cette industrie respectable, il faut être pacha et avoir un brevet du sultan. Faire ce métier en amateur, à ses risques et périls, c^était s'exposer à 30 être pendu comme voleur de grand chemin. Les pachas n'aiment pas la concurrence, AH en savait quelque 30 CONTES BLEUS chose : la plus belle action de sa vie, c'était d'avoir fait étrangler de temps à autre quelque petit larron qui avait eu la sottise de chasser sur les terres des grands. Un jour qu'il n'avait pas mangé, et que Chàrme-des- 5 Yeuxj épuisée par le jeûne, n'avait pu quitter la natte où elle était couchée, Ali, rôdant par les rues de Damas, comme un loup affamé, aperçut des hommes qui char- geaient des cruches d'huile sur leur tête et les portaient à un magasin peu éloigné. A l'entrée du magasin était 10 un commis qui payait à chaque porteur un para par voyage. La vue de cette petite pièce de cuivre fit tres- saillir l'ancien pacha. Il se mit à la file, et, montant un étroit escalier, reçut en charge une énorme jarre, qu'il avait grand'peine à tenir en équilibre sur sa tête, même 15 en y portant les deux mains.^ Ali descendait pas à pas, quand, à la troisième marche, il sentit que son fardeau penchait en avant. Il se rejette en arrière, le pied lui glisse, il roule jusqu'au bas de l'escalier, suivi de la jarre brisée en éclats et de 20 l'huile qui l'inonde. Il se relevait tout honteux, quand il se sentit pris au collet par le commis de la maison. — Maladroit, lui dit ce dernier, paye-moi vite cin- quante piastres pour réparer ta sottise, et sors d'ici! Quand on ne sait pas un métier, on ne s'en mêle pas. 25 — Cinquante piastres ! dit Ali en souriant avec amer- tume. Oh voulez-vous que je les prenne.^ Je n'ai pas un para, — Si tu ne payes pas avec ta bourse, tu payeras avec ta peau,^ reprit le commis sans sourciller. 30 Et, sur un signe de cet homme, Ali, saisi par quatre bras vigoureux, fut jeté à terre, ses pieds passés entre deux cordes, et là, dans une attitude oh il n'avait que LE PACHA BERGER 3I trop souvent mis les autres, il reçut sur la plante des pieds cinquante coups de bâton aussi vertement appli- qués que si un pacha eût présidé à Texécution. Il se releva sanglant et boiteux des deux jambes, s'en- veloppa les pieds de quelques haillons et se traîna vers 5 sa maison en soupirant. — Dieu est grand, murmurait-il ; il est juste que je souffre ce que j'ai fait souffrir.^ Mais les marchands de Bagdad que je faisais bâtonner étaient plus heureux que moi: ils avaient des amis qui payaient pour eux, et moi 10 je meurs de faim, et j'en suis pour mes coups de bâton. ^ 11 se trompait; une bonne femme qui, par hasard ou par curiosité, avait vu sa mésaventure, le prit en pitié. Elle lui donna de Thuile pour panser ses blessures, un petit sac de farine et quelques poignées de haricots 15 pour vivre en attendant la guérison, et ce soir-là même, pour la première fois depuis sa chute, Ali put dormir sans s'inquiéter du lendemain. Rien n'aiguise l'esprit comme la maladie et la soli- tude. Dans sa retraite forcée, Ali eut une idée lumi- 20 neuse. «J'ai été un sot, pensa-t il, de prendre le métier de portefaix: un pacha n'a pas la tête forte; c'est aux bœufs qu'il faut laisser cet honneur. Ce qui distingue les gens de ma condition, c'est l'adresse, c'est la légèreté des mains; j'étais un chasseur sans pareil; de plus je 25 sais comment l'on flatte et l'on ment; je m'y connais, j'étais pacha: choisissons un état oU je puisse étonner le monde par ces brillantes qualités et conquérir rapi- dement une honnête fortune.» Sur ces réflexions, Ali se fit barbier. 30 Les premiers jours tout alla bien; le patron du nou- veau barbier lui faisait tirer de l'eau laver la boutique, 32 CONTES BLEUS secouer les nattes, ranger les ustensiles, servir le café et les pipes aux habitués. Ali se tirait à merveille de^ ces fonctions délicates. Si, par hasard, on lui confiait la tête de quelque paysan de la montagne, un coup de 5 rasoir donné de travers passait inaperçu: ces bonnes gens ont la peau dure et n'ignorent pas qu'ils sont faits pour être écorchés; un peu plus, un peu moins, cela ne les change guère et n'émeut en rien leur stupidité. Un matin, en l'absence du patron, il entra dans la lo boutique un grand personnage dont la vue seule était faite pour intimider le pauvre Ali. C'était le bouffon du pacha, un horrible petit bossu qui avait la tête en citrouille, avec de longues pattes velues, l'œil inquiet et les dents d'un singe. Tandis qu'on lui versait sur le 15 crâne une.mousse odorante, le bouffon, renversé sur son siège, s'amusait à pincer le nouveau barbier, à lui rire au nez, à lui tirer la langue. Deux fois, il lui fit tomber des mains le gobelet de savon, ce qui deux fois le mit en telle joie qu'il lui jeta quatre /^râtj. Cependant le pru- 20 dent Ali ne perdait rien de son sérieux; tout entier^ au soin d'une tête si chère, il faisait marcher son rasoir avec une régularité, avec une légèreté admirables, quand tout à coup le bossu fit une grimace si hideuse et poussa un tel cri, que le barbier, effrayé, retira brusquement la 25 main, emportant au bout de son rasoir la moitié d'une oreille, et ce n'était pas la sienne. Les bouffons aiment à rire, mais c'est aux dépens d'autrui. Il n'y a pas de gens qui aient l'épiderme plus sensible que ceux qui daubent sur la peau de leurs voi- 30 sins. Tomber à coups de poing sur Ali et l'étrangler tout en criant à l'assassin, ce fut pour le bossu l'affaire d'un instant. Par bonheur pour Ali, l'entaille était si LE PACHA BERGER 33 forte, qu'il fallut bien que le blessé songeât à son oreille, d*oli jaillissait le sang. Ali saisit ce moment favorable et se mit à fuir dans les ruelles de Damas avec la légè- reté d'un homme qui n'ignore pas que, s'il est pris, il est pendu. 5 Après mille détours, il se cacha dans une cave ruinée, et n'osa regagner sa demeure qu'au milieu des ténèbres et du silence de la nuit. Rester à Damas après un tel accident, c'était une mort certaine; Ali n'eut pas de peine à convaincre sa fille qu'il fallait partir, et sur lo l'heure. Leur bagage ne les gênait guère; avant l'au- rore ils avaient gagné la montagne. Trois jours durant, ils marchèrent sans s'arrêter, n'ayant pour vivre que quelques figues dérobées aux arbres du chemin, avec un peu d'eau trouvée à grand'peine au fond des ravines des- 15 séchées. Mais toute misère a sa douceur, et il est vrai de dire qu'au temps de leur splendeur, jamais le pacha ni sa fille n'avaient bu ni mangé de meilleur .appétit. A leur dernière étape, les fugitifs furent accueillis par 20 un brave paysan qui pratiquait largement la sainte loi de l'hospitalité. Après souper, il fit causer Ali, et, le voyant sans ressources, il lui offrit de le prendre pour berger. Conduire à la montagne une vingtaine de chèvres, suivies d'une cinquantaine de brebis, ce n'était 25 pas un métier difficile; deux bons chiens faisaient le plus fort^ de la besogne; on ne courait pas risque d'être battu pour sa maladresse, on avait à discrétion le lait et le fromage, et si le fermier ne donnait pas un para^ du moins il permettait à Chamie-des- Yeux de prendre au- 30 tant de laine qu'elle en pourrait filer pour les habits de son père et les siens. Ali, qui n'avait que le choix de 34 CONTES BLEUS mourir de faim ou d'être pendu, se décida sans trop de peine ^ à mener la vie des patriarches. Dès le lende- main, il s'enfonça dans la montagne avec sa fille, ses chiens et son troupeau. 5 Une fois aux champs, Ali retomba dans son indolence. Couché sur le dos et fumant sa pipe, il passait le temps à regarder les oiseaux qui tournaient dans Iç ciel. La pauvre Charme -des -Yeux était moins patiente: elle songeait à Bagdad; sa quenouille ne lui faisait point 10 oublier les doux loisirs d'autrefois. — Mon père, disait-elle souvent, à quoi bon la vie quand elle n'est qu'une perpétuelle misère? N'aurait-il pas mieux valu en finir tout d'un coup que de mourir à petit feu ?^ 15 — Dieu est grand, ma fille, répondit le sage berger, ce qu'il fait est bien fait. J'ai le repos; à mon âge, c'est le premier des biens; aussi, tu le vois, je me résigne. Ah! si seulement j'avais appris un métier I Toi, tu as la jeunesse et l'espérance, tu peux attendre un retour de 20 fortune. Que de raisons pour te consoler ! — Je me résigne, mon bon père, disait Charme-des- Yeux en soupirant. Et elle se résignait d'autant moins qu'elle espérait davantage. 25 11 y avait plus d'un an qu'Ali menait cette heureuse vie dans la solitude quand, un matin, le fils du pacha de Damas alla chasser dans la montagne. En poursuivant un oiseau blessé, il s'était égaré; seul et loin de sa suite, il cherchait à retrouver son chemin en descendant le 30 cours d'un ruisseau, quand, au détour d'un rocher, il aperçut en face de lui une jeune fille, qui, assise sur l'herbe et les pieds dans l'eau, tressait sa longue cheve- LE PACHA BERGER 35 lure. A la vue de cette belle créature, Yousouf poussa un cri. Charme -des- Yeux leva la tête. Effrayée de voir un étranger, elle s'enfuit auprès de son père et disparut aux regards du prince étonné. — Qu'est cela.^ pensa Yousouf. La fleur de la mon- 5 tagne est plus fraîche que la rose de nos jardins; cette fille du désert est plus belle que nos sultanes. Voici la femme que j'ai rêvée. Il courut sur les traces de l'inconnue aussi vite que le permettaient les pierres qui glissaient sous ses pieds. Il 10 trouva enfin Chamie-des- Yeux occupée à traire les bre- bis, tandis qu'Ali appelait à lui les chiens, dont les aboiements furieux dénonçaient l'approche d'un étranger. Yousouf se plaignit d'être égaré et de mourir de soif. Charme -des 'Yeux lui apporta aussitôt du lait dans un 15 grand vase de terre; il but lentement, sans rien dire, en regardant le père et la fille, puis enfin, il se décida- à demander son chemin. Ali, suivi de ses deux chiens, conduisit le chasseur jusqu'au bas de la montagne, et revint tout tremblant. L'inconnu lui avait donné une 20 pièce d'or: c'était donc un officier du sultan, un pacha peut-être? Pour Ali, qui jugeait avec ses propres souve- nirs, un pacha était un homme qui ne pouvait que faire le mal, et dont l'amitié n'était pas moins redoutable que la haine. 25 En arrivant à Damas, Yousouf courut se jeter au cou^ de sa mère. Il brûlait de raconter ce qu'il avait vu dans la montagne; il fit un portrait merveilleux de la belle inconnue, déclara qu'il ne pouvait vivre sans elle, et qu'il voulait l'épouser dès le lendemain. 30 — Un peu de patience, mon fils, lui répétait sa mère; laisse-nous savoir quel est ce miracle de beauté; après 36 CONTES BLEUS cela, nous déciderons ton père, et nous le ferons consen- tir à cette heureuse union. Quand le pacha connut la passion de son fils, il com- mença par se récrier et finit par se mettre en colère. 5 Jamais il ne donnerait les mains ^ à ce pauvre mariage, jamais! Jamais est un mot qu*un homme prudent ne doit point prononcer dans son ménage, quand il a contre lui sa femme et son fils. Huit jours* n'étaient pas écoulés que 10 le pacha, ému par les larmes de la mère, par la pâleur et le silence du fils, en* arrivait de guerre lasse* à céder. Mais en homme fort et qui s'estime à son juste prix, il déclara hautement qu'il faisait une sottise et qu'il le savait. 15 — Soit, dit-il, que mon fils épouse une bergère, et que sa folie retombe sur sa tête; je m'en lave les mains. Mais pour que rien ne manque à cette union ridicule, _ qu'on appelle mon bouffon. C'est à lui seul qu'il appar- tient d'obtenir et d'amener ici cette misérable chevrière 20 qui a jeté un sort sur ma maison. Une heure après, le bossu, monté sur un âne, gagnait la montagne, maudissant le caprice du pacha et les amours de Yousouf. Y avait-il du bon sens d'envoyer en ambassade à un berger, par la poussière et le soleil, 25 un homme délicat, né pour vivre dans un palais, et qui charmait les princes et les grands par la finesse de son esprit? Mais, hélas! la fortune est aveugle; elle met les sots au pinacle, et réduit au métier de bouffon le génie qui ne veut pas mourir de faim. 30 Trois jours de fatigue n'avaient pas adouci l'humeur du bossu, quand il aperçut Ali, couché à l'ombre d'un caroubier, et plus occupé de sa pipe que de ses brebis. LE PACHA BERGER 37 • Le bouffon piqua son âne, et s'avança vers le berger avec la majesté d'un vizir. — Drôle, lui dit-il, tu as ensorcelé le fils du pacha; il te fait Thonneur d'épouser ta fille. Décrasse au plus vite cette perle de la montagne, il faut que je l'emmène à 5 Damas. Quant à toi, le pacha t'envoie cette bourse et t'ordonne de vider au plus tôt le pays. Ali laissa tomber la bourse qu'on lui jetait, et, sans retourner la tête, demanda au bossu ce qu'il voulait. — Bête brute, reprit ce dernier, ne m'as-tu pas enten- 10 du? Le fils du pacha prend ta fiHe en mariage. — Qu'est-ce que fait le fils du pacha ?^ dit Ali. — Ce qu'il fait? s'écria le bouffon, en éclatant de rire.* Double pécore que tu es, t'imagines-tu qu'un si haut personnage soit un rustre de ton espèce? Ne sais- 15 tu que le pacha partage avec le sultan la dîme de la pro- vince, et que, sur les quarante brebis que tu gardes si mal, il y en a quatre qui lui appartiennent de droit, et trente-six qu'il peut prendre à sa volonté ? — Je ne te parle point du pacha, reprit tranquille- 20 ment Ali. Que Dieu protège Son Excellence! Je te demande ce que fait son fils. Est-il armurier ? — Non, imbécile. — Forgeron ? — Encore moins. 25 — Charpentier? — Non. — Chaufournier? — Non, non. C'est un grand seigneur. Entends-tu, triple sot ! il n'y a que les gueux qui travaillent. Le fils 30 du pacha est un noble personnage, ce qui veut dire qu'il a les mains blanches et qu'il ne fait rien. 38 CONTES BLEUS — Alors il n'aura pas ma fille, dit gravement le berger; un ménage coûte cher, je ne donnerai jamais mon enfant à un mari qui ne peut pas nourrir sa femme. Mais peut-être le fils du pacha a-t-il quelque métier moins 5 rude. N'est-il point brodeur? — Non, dit le bouffon, en haussant les épaules. — Tailleur ? — Non. — Potier ? 10 — Non. — Vannier? — Non. — Il est donc barbier? — Non, dit le bossu, rouge de colère. Finis cette 15 sotte plaisanterie, ou je te fais rouer de coups. Appelle ta fille ; je suis pressé. — Ma fille ne partira pas, répondit le berger. 11 siffla ses chiens, qui vinrent se ranger auprès de lui en grognant et en montrant des crocs qui ne parurent 20 charmer que médiocrement Tenvoyé du pacha. Le bossu retourna sa monture,^ et menaçant du poing Ali qui retenait ses dogues au poil hérissé: — Misérable ! lui cria-t-il, tu auras bientôt de mes nouvelles;^ tu sauras ce qu'il en coûte pour avoir une 25 autre volonté que celle du pacha, ton maître et le mien. Le bouffon rentra dans Damas la tête basse." Heu- reusement pour lui, le pacha prit la chose du bon côté.* C'était un petit échec pour sa femme et son fils, pour lui c'était un triomphe; double succès qui chatouillait 30 agréablement son orgueil. — Vraiment, dit-il, le bonhomme est encore plus fou que mon fils; mais, rassure-toi, Yousouf, un pacha n'a ■1 LE PACHA BERGER 39 que sa parole. Je vais envoyer dans la montagne quatre cavaliers qui m'amèneront la fille; quant au père, ne t'en embarrasse pas, je lui réserve un argument décisif. Et disant cela il fit gaiement un geste de la main, comme s'il coupait devant lui quelque chose qui le 5 gênait. Sur un signe de sa mère, Yousouf se leva et supplia son père de lui laisser l'ennui de mener à bonne fin cette petite aventure. Sans doute le moyen proposé était irrésistible. Mais Charme- des- Yeux avait peut-être la 10 faiblesse d'aimer le vieux berger, elle pleurerait; et le pacha ne voudrait pas attrister les premiers beaux jours d'un mariage. Yousouf espérait qu'avec un peu de douceur il viendrait facilement à bout^ d'une résistance qui ne lui semblait pas sérieuse. 15 — Fort bien, dit le pacha. Tu veux avoir plus d'esprit que ton père; c'est l'usage des fils. Va donc, et fais ce que tu voudras; mais je te préviens qu'à compter^ d'au- jourd'hui je ne me mêle plus de tes affaires. Si ce vieux fou de berger te refuse, tu en seras pour ta honte.' Je 20 donnerais mille piastres pour te voir revenir aussi mal- heureux que le bossu. Yousouf sourit, il était sûr de réussir. Comment Charme -des -Yeux ne l'aimerait-elle pas?* Il l'adorait. Ali reçut Yousouf avec tout le respect qu'il devait au 25 fils du pacha; il le remercia, et en bons termes, de son honorable proposition; mais sur le fond des choses** il fut inexorable. Point de métier, point de mariage; c'était à prendre ou à laisser. Le fils du pacha descendit de la montagne, la tête 30 basse. Que faire? Rentrer à Damas, pour y être en butte aux railleries de son père; jamais Yousouf ne s'y 40 CONTES BLEUS résignerait. Perdre Charme -des -Yeux? plutôt la mort. Faire changer d'avis à cet entêté de vieux berger? You- souf ne pouvait l'espérer; il en venait^ presque à regretter de s'être perdu par trop de bonté 1 5 Au milieu de ces tristes réflexions, il s'aperçut que son cheval, abandonné à lui-même, l'avait égaré. Yousouf se trouvait sur la lisière d'un bois d'oliviers. Dans le lointain était un village; la fumée bleuâtre montait au- dessus des toits; on entendait l'aboiement des chiens, le 10 chant des ouvriers, le bruit de l'enclume et du marteau. Une idée saisit Yousouf. Qui l'empêchait d'apprendre un métier? Était-ce si difficile? Charme -des -Yeux ne valait-elle pas tous les sacrifices? Le jeune homme attacha à un olivier son cheval, ses armes, sa veste 15 brodée, son turban. A la première maison il se plaignit d'avoir été dépouillé par les Bédouins,^ acheta un habit grossier, et, ainsi déguisé, il alla de porte en porte s'offrir comme apprenti. Yousouf avait si bonne mine que chacun l'accueillit à 20 merveille; mais les conditions qu'on lui fit l'effrayèrent. Le forgeron lui demandait deux ans pour l'instruire, le potier un an, le maçon six mois; c'était un siècle! Le fils du pacha ne pouvait se résigner à cette longue ser- vitude, quand une voix glapissante l'appela: 25 — Holà, mon fils, lui criait-on, si tu es pressé et si tu n'as pas d'ambition, viens avec moi: en huit jours je te ferai gagner ta vie. Yousouf leva la tête. A quelques pas devant lui, était assis sur un banc, les jambes croisées, un gros petit 30 homme, à la face réjouie: c'était un vannier. Il était entouré de brins de paille et de joncs, teints en toutes couleurs; d'une main agile il tressait des nattes, qu'il LE PACHA BERGER 4I cousait ensuite pour en faire des paniers, des corbeilles, des tapis, des chapeaux variés de nuances et de dessin. C'était un spectacle qui charmait les yeux. — Vous êtes mon maître, dit Yousouf, en prenant la l main du vannier. Et si vous pouvez m'apprendre votre 5 métier en deux jours, je vous payerai largement votre peine. Voici mes arrhes. Disant cela, il jeta deux pièces d'or à Touvrier ébahi. Un apprenti qui sème Tor à pleines mains, cela ne se voit pas tous les jours; le vannier ne douta point qu'il 10 n'eût affaire à un prince déguisé; aussi fit-il merveille. Et comme son élève ne manquait ni d'intelligence ni de bonne volonté, avant le soir il lui avait appris tous les secrets du métier. — Mon fils, lui dit-il, ton éducation est faite, tu vas 15 juger toi-même si ton maître a gagné son argent. Voici le soleil qui se couche; c'est l'heure oli chacun quitte son travail et passe devant ma porte. Prends cette natte que tu as tressée et cousue de tes mains, offre-la aux acheteurs. Ou je me trompe fort, ou tu peux en 20 avoir quatre paras. Pour un début, c'est un joli denier.^ Le vannier ne se trompait pas; le premier acheteur offrit trois parasy on lui en demanda cinçy et il ne fallut pas plus d'un'e heure de débats et de cris pour qu'il se décidât à en donner quatre. Il tira sa longue bourse, 25 regarda plusieurs fois la natte, en fit la critique, et enfin se décida à compter ses quatre pièces de cuivre, l'une après l'autre. Mais au lieu de prendre cette somme, Yousouf donna une pièce d'or à l'acheteur, il en compta dix au vannier, et, s'emparant de son chef-d'œuvre, il 30 sortit du village en courant comme un fou. Arrivé près de son cheval, il étendit la natte à terre, s'enveloppa la 42 CONTES BLEUS tête dans son burnous et dormit du sommeil le plus agité et cependant le plus doux qu'il eût goûté de sa vie. Au point du jour, quand Ali arriva au pâturage avec ses brebis, il fut fort étonné de voir Yousouf installé S avant lui sous le vieux caroubier. Dès qu'il aperçut le berger, le jeune homme se leva, et prenant la natte sur laquelle il était couché : — Mon père, lui dit-il, vous m'avez demandé d'ap- prendre un métier; je me suis fait instruire;^ voici mon lo travail, examinez-le. — C'est un joli morceau, dit Ali; si ce n'est pas encore très bien tressé, c'est honnêtement cousu. Qu'est- ce qu'on peut gagner à faire par jour une natte comme celle-là ? 15 — Quatre paras, dit Yousouf, et avec un peu d'habi- ■ tude j'en ferai deux au moins dans une journée. — Soyons modeste, reprit Ali, la modestie convient au talent qui commence. Qa2Ltxt paras par jour, ce n'est pas beaucoup ; mais quatre paras aujourd'hui et quatre 20 paras demain, cela fait huit paras, et quatre paras après-demain, cela fait douze paras. Enfin c'est un état qui fait vivre son homme,* et si j'avais eu l'esprit de l'apprendre quand j'étais pacha, je n'aurais pas été réduit à me faire berger. 25 Qui fut étonné de ces paroles? ce fut Yousouf. Ali lui conta son histoire; c'était risquer sa tête, mais il faut pardonner un peu d'orgueil à un père. En mariant sa fille, Ali n'était pas fâché d'apprendre à son gendre que Charme -des- Yeux n'était pas indigne de la main d'un 30 fils de pacha. Ce jour-là on rentra les brebis avant l'heure. Yousouf voulut remercier lui-même l'honnête fermier qui avait LE PACHA BERGER 43 reçu le pauvre Ali et sa fille; il lui donna une bjourse pleine d'or, pour le récompenser de sa charité. Rien^ n'est libéral comme un homme heureux. Chamie-des- Yeux^ présentée au chasseur de la montagne, et prévenue des projets de Yousouf, déclara que le premier devoir 5 d'une fille était d'obéir à son père. En pareil cas, dit-on, les filles sont toujours obéissantes en Turquie. Le soir même, à la fraîcheur de la nuit tombante, on se mit en route pour Damas. Les chevaux étaient légers, les cœurs plus légers encore, on allait comme le vent; 10 avant la fin du second jour, on était arrivé. Yousouf voulut présenter sa fiancée à sa mère. Quelle fut la joie de la sultane, il n'est besoin de le dire. Après les premières caresses, elle ne put résister au plaisir de montrer à son époux qu'elle avait plus- d^esprit que lui, 15 et se fit une joie ^ de lui révéler la naissance de la belle Charme -des- Yeux, — Par Allah ! s'écria le pacha, en caressant sa longue barbe afin de se donner une contenance ^ et de cacher son trouble, vous imaginez-vous, madame, qu'on puisse sur- 20 prendre un homme d'État tel que moi ? Aurais-je con- senti à cette union, si je n'avais connu ce secret qui vous étonne? Apprenez qu'un pacha sait tout! Et sur l'heure il rentra dans son cabinet pour écrire au sultan, afin qu'il ordonnât du sort d'Ali. Il ne se 25 souciait point de déplaire à Sa Hautesse pour les beaux yeux* d'une famille proscrite. La jeunesse aime le roman dans la vie, mais le pacha était un homme sérieux, qui tenait à vivre et à mourir pacha. Tous les sultans aiment les histoires, si l'on en croit 30 les Mille et une Nuits} Le protecteur d'Ali n'avait pas • dégénéré de ses ancêtres ; il envoya tout exprès un navire 44 CONTES BLEUS en Syrie pour qu'on lui amenât à Constant inople Tancien gouverneur de Bagdad. Ali, revêtu de ses haillons et sa houlette à la main, fut conduit à la cour, et, devant une nombreuse audience, il eut la gloire d'amuser son maître 5 toute une après-dînée. Quand Ali eut terminé son récit, le sultan lui fit re- vêtir une pelisse d'honneur. D'un pacha Sa Hautesse avait fait un berger; elle voulait maintenant étonner le monde par un nouveau miracle de sa toute-puissance, et 10 d'un berger elle refaisait un pacha. A cet éclatant témoignage de faveur, toute la cour applaudit. Ali se jeta aux pieds du sultan pour décliner un honneur qui ne le séduisait plus. Il ne voulait pas, disait-il, courir le risque de déplaire une seconde fois au 15 Maître du monde, et demandait à vieillir dans l'obscurité, en bénissant la main généreuse qui le retirait de l'abîme oli il était justement tombé. La hardiesse d'Ali effraya l'assistance, mais le sultan sourit: 20 — Dieu est grand, s'écria-t-il, et nous garde chaque jour une surprise nouvelle. Depuis vingt ans que je règne, voici la première fois qu'un de mes sujets me de- mande à n'être rien. Pour la rareté du fait, Ali, je t'accorde ta prière; tout ce que j'exige, c'est que tu ac- 25 ceptes un don de mille bourses.* Personne ne doit me quitter les mains vides. De retour à Damas, Ali acheta un beau jardin, tout rempli d'oranges, de citrons, d'abricots, de prunes, de raisins. Bêcher, sarcler, greffer, tailler, arroser, c'était 30 là son plaisir; tous les soirs il se couchait le corps fatigué, l'âme tranquille; tous les matins il se levait le corps dispos, le cœur léger. LE PACHA BERGER 45 Charme- des 'Yeux eut trois fils, tous plus beaux que leur mère. Ce fut le vieil Ali qui se chargea de les élever. A tous il enseigna le jardinage, à chacun d'eux il fit apprendre un métier différent. Tous trois furent pachas. Profitèrent-ils des conseils 5 de leur aïeul? J'aime à le croire, quoique les annales des Turcs n'en disent rien. On n'oublie pas ces premières leçons de l'enfance. Hommes de bien, souvenez-vous de ce que vous devez à vos pères et dites-vous que, la plupart du temps, les 10 méchants et les pachas ne sont que des enfants mal élevés. 46 CONTES BLEUS VI PIF PAF* OU l'art de gouverner les hommes Conte de tous les Pays L LE ROI BIZARRE^ ET LE PRINCE CHARMANT Dans le royaume des Herbes-Folles,* heureux pays, terre bénie du ciel, oli les hommes ont toujours raison, où les femmes n'ont jamais tort, vivait, il y a longtemps, un roi qui ne songeait qu'au bonheur de son peuple, et qui, 5 dit-on, ne s'ennuyait jamais. Son peuple l'aimait-il? On en doute.* Ce qui est sûr, c'est que les courtisans avaient pour leur prince peu d'estime et moins d'amour. Aussi l'avaient-ils surnommé le roi Bizarre, seul titre sous lequel il soit connu dans l'histoire. 10 Resté veuf après un an de mariage. Bizarre avait reporté toute son affection sur son fils et héritier. C'était le plus joli des enfants. Sa figure était fraîche comme une rose du Bengale ; de beaux cheveux blonds lui tombaient sur les épaules en boucles dorées; joignez 1$ à cela des yeux bleus et limpides, un nez droit, une petite bouche, et un menton pointu, vous aurez un portrait de chérubin. A huit ans, cette jeune merveille dansait à ravir, montait à cheval comme Franconi,*^ et faisait des armes comme Gâtechair.* Qui n'eût été 20 séduit par son sourire et la façon toute royale dont il PIF PAF 47 saluait la foule en passant, quand il était de bonne humeur? Aussi la voix du peuple, qui ne se trompe jamais, Tavait-elle baptisé le prince Charmant, et le nom lui en est resté. Charmant était beau comme le jour ; mais le soleil lui- 5 même a, dit-on, des taches, et les princes ne dédaignent pas de ressembler au soleil. L'enfant éblouissait la cour par sa bonne mine; mais il y avait quelques ombres qui n'échappaient point à l'œil perçant de l'amour ou de l'envie. Souple, agile, adroit à tous les exercices du 10 corps, Charmant avait l'esprit nonchalant; il s'était mis en tête de tout savoir sans rien étudier. Trois précepteurs, choisis parmi les plus habiles et les plus patients, un abbé, un philosophe, un colonel, avaient essayé tour à tour de fléchir ce jeune courage; l'abbé y 15 avait perdu sa philosophie, le philosophe sa tactique, et le colonel son latin. Resté maître du champ de bataille. Charmant n'écoutait plus que son caprice ; il vivait sans contrainte et sans loi. Têtu comme une mule, colère comme un dindon, friand comme un chat, fainéant 20 comme une couleuvre, du reste prince accompli, il était la gloire du beau pays des Herbes-Folles, l'espoir et l'amour d'un peuple qui dans ses rois n'estime que la grâce et la beauté. II. MADEMOISELLE PAZZA Quoiqu'il eût été élevé à la cour, le roi Bizarre était 25 un homme de sens; l'ignorance de Charmant ne lui plaisait guère, et souvent il se demandait avec inquié- tude ce que deviendrait son royaume entre les mains d'un prince que le plus bas des flatteurs tromperait aisé- 48 CONTES BLEUS ment Mais que faire? Plutôt que de voir pleurer son fils, Bizarre lui eût cédé sa couronne; la tendresse le désarmait. Chaque soir, après le conseil, le roi Bizarre allait finir 5 sa journée chez la marquise de Costoro. C'était une vieille dame qui autrefois avait fait danser^ le roi sur ses genoux, et qui seule pouvait lui rappeler les doux souvenirs de son enfance et de sa jeunesse. EUç était, disait-on, fort laide et un peu sorcière; mais le monde lo est si méchant, que de ses médisances il ne faut jamais croire que la moitié. La marquise avait de grands traits et de nobles cheveux blancs; il était aisé de voir qu'elle avait été belle au temps jadis. Un jour que Charmant avait été plus déraisonnable 15 que de coutume, le roi entra chez la marquise d'un air soucieux. Suivant son habitude, il s'assit devant une table de jeu toute prête, et prenant des cartes, il com- mença une patience.^ A peine avait-il rangé seize cartes en un carré parfait, qu'il poussa un long soupir. 20 — Marquise, s'écria-t-il, vous voyez le plus malheureux des pères et des rois. Malgré sa gentillesse naturelle, Charmant devient chaque jour plus volontaire et plus vicieux. Grand Dieul devais-je laisser après moi un héritier semblable, et confier le bonheur de mon peuple 25 à un sot couronné ! — Ainsi est faite la nature, répondit la marquise. Fainéantise et beauté marchent de compagnie ; esprit et laideur ne se quittent guère; j'en ai l'exemple dans ma maison. On m'a envoyé il y a quelques jours une arrière- 30 petite-nièce, qui n'a plus que moi de parente; c'est noir comme un crapaud, maigre comme une araignée, avec cela malin comme un singe, et savant comme un livre, et PIF PAF 49 ça n'a pas dix ans. Jugez-en vous-même, Sire, voici mon petit monstre qui vient vous saluer. Bizarre tourna la tête et aperçut un enfant qui répon- dait de tous points à Téloge que faisait la marquise. Un front bombé, des yeux noirs et sauvages, des cheveux 5 ébouriffés et relevés à 1^, chinoise, une peau mate et brune, de grandes dents blanches, des mains rouges et de longs bras, cela ne faisait pas une nymphe bocagère.^ Le petit monstre s'approcha du roi et lui fit une révé- rence si sérieuse que Bizarre ne put s'empêcher de rire, 10 quoiqu'il en eût peu d'envie. — Qui es-tu ? dit le roi en prenant le menton de l'enfant. — Sire, dit-elle, on m'appelle Pazza.* — Et pourquoi t'appelle-t-on Pazza ? 15 — Parce que ce n'est pas mon nom, Sire. — Voilà qui est étrange, dit le roi. — Non, Sire, répondit l'enfant, voilà qui est naturel. Ma tante prétend que je suis trop folle pour qu'aucun saint veuille m'avouer pour sa filleule; c'est pourquoi 20 elle m'a donné un nom qui ne peut offenser personne en paradis. — Bien répondu, mon enfant ; je vois que tu n'es pas une fille ordinaire. Puisque tu en sais si long,* peux-tu me dire ce que c'est qu'un savant } 25 — Oui, Sire ; un savant est un homme qui sait ce qu'il dit quand il parle, et ce qu'il fait quand il agit. — Oh î dit le roi, si mes savants étaient tels que tu les imagines, je ferais de l'Académie* mon Conseil d'État, et je lui donnerais mon royaume à gouverner. 30 Qu'est-ce qu'un ignorant ? — Sire, reprit Pazza, il y a trois espèces d'ignorants : 50 CONTES BLEUS celui qui ne sait rien, celui qui parle de ce qu'il ne sait pas, et celui qui ne veut rien apprendre ; tous trois sont bons à brûler ou à pendre. — C'est un proverbe que tu me récites là; sais-tu 5 comment on appelle les proverbes ? — Oui, Sire ; on les nomme la sagesse des nations. — Et pourquoi les nomme-t-on ainsi ? — Parce qu'ils sont fous, reprit Pazza ; ils disent blanc et noir,^ il y en a de toutes les couleurs et pour lo tous les goûts. Les proverbes sont comme les cloches, qui répondent oui ou non, suivant l'humeur de celui qui écoute leur chanson. Sur quoi Pazza, sautant des deux pieds, attrapa une mouche qui bourdonnait au nez du roi, puis, laissant 15 Bizarre tout interdit, elle alla prendre sa poupée et s'as- sit à terre en la berçant dans ses bras. — Eh bien ! Sire, dit la marquise, que pensez-vous de cette enfant ? — Elle a trop d'esprit, répondit le roi, elle ne vivra 20 pas. — Ah ! Sire, s'écria l'enfant, ce que vous dites là n'est pas honnête pour ma tante, qui n'a plus dix ans. — Silence ! petite folle, dit la vieille dame en sou- riant ; est-ce qu'on fait la leçon aux rois ? 25 — Marquise, dit Bizarre, il me vient une idée telle- ment étrange que j'ose à peine vous la confier, et cepen- dant j'ai une grande envie de la suivre. Je ne puis rien faire de mon fils, la raison n'a pas de prise sur cet entêté ; qui sait si la folie ne réussirait pas mieux ? Si 30 je m'en croyais,^ je ferais de Pazza le précepteur de Charmant. Cet indocile, qui résiste à tous ses maîtres, serait peut-être sans défense contre un enfant. La seule PIF PAF 51 objection, c'est que personne ne sera de mon avis; j'aurai tout le monde contre moi. — Bah ! dit la marquise, tout le monde est si bête que c'est avoir raison que de ne pas penser comme ces gens-là. 5 m. LA PREMIÈRE LEÇON C'est ainsi que Pazza fut chargée d'instruire le jeune prince. Dès le lendemain on envoya Charmant chez la marquise, et on lui permit de jouer avec Pazza. Restés seuls, les deux enfants se regardèrent en silence. Pazza, la plus hardie, parla la première. 10 — Comment t'appelles -tu? dit -elle à son nouveau compagnon. — Ceux qui ne me connaissent pas m'appellent Al- tesse, répondit Charmant d'un ton piqué; ceux qui me connaissent m'appellent simplement Monseigneur, et 15 tout le monde me dit : Vous. L'étiquette le veut ainsi. — Qu'est-ce que l'étiquette ? dit Pazza. — Je ne sais pas, répondit Charmant. Quand jp saute, quand je crie, on me dit que c'est contre l'éti- quette; alors je me tiens tranquille et je m'ennuie: 20 voilà l'étiquette. — Puisque nous sommes ici pour nous amuser, reprit Pazza, il n'y a donc pas d'étiquette ; tutoie-moi comme si j'étais ta sœur, je te tutoierai comme si tu étais mon frère, et je ne t'appellerai pas monseigneur. 25 — Mais tu ne me connais pas. — Qu'est-ce que ça fait ?^ dit Pazza; je t'aimerai, ça vaudra mieux. On dit que tu danses à merveille; ap- prends-moi à danser, veux- tu ? 52 CONTES BLEUS — La glace était rompue ; Charmant prit la jeune fille par la taille, et en moins d'une demi-heure lui apprit la polka de ce temps-là. — Comme tu danses bien ! lui dit-il ; tu as saisi le S mouvement tout de suite. — C'est que tu es un bon maître, lui dit-elle ; à mon tour^ de t'apprendre quelque chose. Elle prit un bea*. livre 4'ini3.ges et lui fit voir des monuments, des poissons, des hommes d'État, des per- 10 mquets, des savants, des bêtes curieuses, des fleurs, toutes choses qui amusèrent beaucoup Charmant. — Vois-tu, lui dit Pazza, il y a l'explication de toutes les images: lisons-la. — Je ne sais pas lire, reprit Charmant. 15 — Je te l'apprendrai; je serai ta petite maîtresse. — Non, répondit le royal entêté, je ne veux pas lire. Mes maîtres m'ennuient. — C'est très bien; mais je ne suis pas un maître; tiens, voilà un A, un bel A ; dis : A. 20 — Non, reprit Charmant en fronçant le sourcil ; jamais jç ne dirai : A. — Pour me faire plaisir?* — r- Non, jamais ! En voilà assez,* je n'aime pas qu'on ne soit pas de mon avis. 25 — Monsieur, dit Pazza, un homme galant ne refuse rien aux dames. Laisse-moi tranquille,* reprit le jeune prince en se rengorgeant; je ne t'aime plus; désormais appelle-moi monseigneur. 30 — Monseigneur Charmant ou mon charmant seigneur, répondit Pazza rouge de colère, vous lirez ou vous direz pourquoi. PIF PAF 53 -—Je ne lirai pas. — Non I une fois, deux fois, trois fois ? — Non! non! non! Pazza leva la main; pif! paf ! voilà le fils du roi souf- fleté. On avait dit à Pazza qu'elle avait de Tesprit jus« s qu'au bout des doigts; elle avait eu tort de prendre la chose au sérieux; il ne faut jamais rire avec les enfants. En recevant ce premier avis, Charmant pâlit et trembla, le sang lui monta au visage, de grosses larmes lui vinrent dans les yeux; il regarda sa jeune maîtresse lo d'un air qui la fît tressaillir. Puis tout à coup, et par un suprême effort, il reprit possession de lui-même, et d'une voix légèrement émue: — Pazza, dit-il, voici l'A. Et le même jour, et dans la même séance, il apprit les 15 vingt-quatre lettres de l'alphabet. A la fin de la semaine, il épelait couramment. Le mois n'était pas écoulé qu'il lisait à livre ouvert.* Qui fut heureux? Ce fut le roi Bizarre. Il embrassait Pazza sur les deux joues, il la voulait toujours auprès de 20 son fils ou auprès de lui; il faisait de cette enfant son amie et son conseil, au grand dédain de tous les courti- sans. Charmant, toujours sombre et silencieux, apprit tout ce que put lui enseigner son jeune mentor, et retourna bientôt auprès de ses anciens précepteurs, qu'il 25 émerveilla par son intelligence et sa douceur. Il répétait si bien sa grammaire, que l'abbé se demanda un jour si par hasard ces définitions, qu'il n'avait jamais comprises, n'avaient pas un sens. Charmant n'étonna pas moins le philosophe, qui tous les soirs lui enseignait le con- 30 traire de ce que l'abbé lui avait appris le matin. Mais de tous ses maîtres, celui qu'il écouta avec le moins de 54 CONTES BLEUS répugnance fut le colonel. Il est vrai que Bayonnette, — c'était le nom du colonel, — était un habile stra- tégiste. Ce fut lui qui apprit à son élève que la plus noble S étude d'un prince c'était l'école de bataillon,^ et que le fond de la politique c'était de passer des revues afin de faire la guerre, et de faire la guerre afin de passer des revues. Y***^ Peut-être n'était-ce pas tg^xLkJ^ de cette façon que 10 Bizarre entendait l'art de gouverner; mais, outre qu'il se réservait l'awnuv il était si heureux des progrès de Charmant, qu'il ne voulait troubler en rien cette œuvre admirable d'une éducation longtemps désespérée. — Mon fils, lui disait-il souvent, n'oublie pas que tu 15 dois tout à Pazza. Tandis que le roi parlait ainsi, Pazza, rouge de plaisir, regardait tendrement le jeune homme. Malgré tout son esprit, elle était assez folle pour l'aimer. Charmant se contentait de répondre froidement que la reconnaissance 20 est la vertu des princes, et que Pazza apprendrait un jour que son élève n'avait rien oublié. IV. LES NOCES DE PAZZA Quand le prince Charmant eut atteint sa dix-septième année, il alla un matin trouver le roi Bizarre, dont la santé déclinait et qui avait grand désir de marier son 25 fils avant de mourir. — Mon père, lui dit-il, j'ai longtemps réfléchi à vos sages paroles; vous m'avez donné la vie, mais Pazza a plus fait encore en éveillant mon esprit et mon âme; je ne vois qu'une façon de payer la dette de mon cœur, PIF PAF 55 c'est d'épouser la femme à qui je dois ce que je suis; je viens vous demander la main de Pazza. — Mon cher enfant, répondit Bizarre, voilà une dé- marche qui t'honore. Pazza n'est pas de sang royal; ce n'est pas elle qu'en toute autre occasion je t'aurais 5 choisie pour femme. Mais quand je pense à ses vertus, à son mérite, et surtout au service qu'elle nous a rendu, j'oublie de vains préjugés. Pazza a l'âme d'une reine; qu'elle monte donc avec toi sur le trône. Dans le pays des Herbes-Folles on aime assez l'esprit et la bonté pour 10 te pardonner ce que les sots appelleront une mésalliance, et que j'appelle un mariage princier. Heureux qui peut se choisir une femme intelligente, capable de le com- prendre et de l'aimer! Dès demain on célébrera vos fiançailles, dans deux ans on vous mariera. 15 Le mariage se fit plus vite que le roi ne l'avait prévu. Quinze mois après ces mémorables paroles, Bizarre mou- rut de langueur et d'épuisement. Il avait pris au sérieux son métier de roi; la royauté l'avait tué. La vieille marquise et Pazza pleurèrent leur ami et leur bien- 20 faiteur; mais elles furent seules à pleurer. Sans être un mauvais fils. Charmant était absorbé par les soins de l'em- pire; la cour attendait tout du nouveau règne et ne son- geait plus au vieux roi, dont la mort avait fermé la main. Après avoir honoré la mémoire de son père par des 25 obsèques magnifiques, le jeune prince célébra son ma- riage avec une splendeur qui charma le bon peuple des Herbes-Folles. L'impôt en fut doublé; mais qui eût regretté un argent si noblement employé? On vint de toutes les parties du royaume pour contempler le nouveau 30 roi; on n'admira pas moins Pazza, dont la beauté et l'air de bonté séduisaient tous les cœurs. Il y eut des MON ONCLE ET MON CURE 9 à n'y prendre aucun intérêt. Les hommes de la Répu- blique me laissaient froide, et les Empereurs se confon- daient dans ma tête. Le curé avait beau pousser des exclamations admiratives, se fâcher, raisonner, rien n'ébranlait mon insensibilité et mon idée personnelle. 5 Par exemple, racontant Thistorie de Mucius Scé- vola,^ je terminais ainsi : « Il brûla sa main droite pour la punir de s'être trompée, ce qui prouve qu'il n'était qu'un sot ! » Le curé, qui m'écoutait un instant auparavant d'un 10 air béat,^ tressautait d'indignation. «Un sotl mademoiselle... Et pourquoi cela? — Parce que la perte de sa main ne réparait pas son erreur, répondais-je, que Porsenna n'en était ni plus ni moins vivant, et que le secrétaire ne s'en portait pas 15 mieux. — Bien, ma petite ; mais Porsenna fut assez effrayé pour lever le siège immédiatement. — Ceci, monsieur le curé,* prouve que Porsenna n'était qu'un poltron. 20 — Soit ! mais .Rome était délivrée, et grâce à qui ? grâce à Scévola, grâce à son action héroïque ! » Et le curé, qui, frémissant, à l'idée de se brûler le bout du petit doigt, n'en admirait que mieux* Mucius Scévola, de s'exalter,*^ de se démener pour me faire 25 apprécier son héros. « J'en tiens pour ce que j'ai dit, reprenaîs-je tranquillement; ce n'était qu'un sot, et un grand sot ! » Le curé, suffoqué, s'écriait: 30 « Quand les enfants se mêlent de raisonner, les mor- tels entendent bien des sottises. PIF PAF 57 Charmant, et je vous préviens que si vous ne finissez pas cette mauvaise plaisanterie, ce n'est pas un soufflet, mais trois que je vous donnerai avant d'entrer dans votre appartement! Dépêchez-vous de me faire sortir, ou je jure que je tiendrai ma parole. 5 — Jurez donc, madame, cria le prince, furieux de ne point intimider sa victime: j'accepte votre serment. Je jure aussi que vous n'entrerez pas dans mon apparte- ment que je n'aie été^ assez lâche pour recevoir trois fois un outrage qui ne se lave que dans le sang. Rira bien 10 qui rira le dernier. — Ici! Rachimbourg! A ce nom terrible entra dans la chambre un geôlier barbu, à la mine menaçante. D'un geste il poussa la reine sur un misérable grabat, et ferma la porte avec un bruit de clefs et de verrous fait pour effrayer le plus innocent. 15 Si Pazza versa des larmes, personne ne l'entendit. Fatigué de ce silence, Charmant s'éloigna, la rage dans le cœur, et se promît qu'à force de rigueurs il briserait cet orgueil qui le bravait. La vengeance, dit-on, est le plaisir des rois. 20 Deux heures plus tard, la marquise recevait, par une main sûre, un petit billet qui lui apprenait le triste sort de sa nièce. Comment ce billet était-il arrivé? je le sais, mais ne veux trahir personne. S'il s'était trouvé par hasard un geôlier charitable, il est bon de le mena- 25 ger; la race en est rare et se perd tous les jours. yyf' ^^ y uj, EFFROYABLE ÉVÉNEMENT Le lendemain, la Gazette de la cour annonça que la reine avait été prise d'une folie furieuse le soir même de ses noces, et qu'on avait peu d'espoir de la sauver. 58 CONTES BLEUS Chacun plaignit le roi, qui reçut d'un air sombre et gêné les témoignages d'affection qu'on lui prodiguait. C'était le chagrin qui sans doute l'accablait; mais ce chagrin parut fort allégé après la visite de la marquise de Costoro. 5 La bonne dame était bien triste, et elle avait grand désir de voir sa pauvre enfant; mais elle était si vieille, et elle se trouvait si faible et si sensible, qu'elle supplia le roi dé lui épargner un spectacle déchirant. Elle se jeta dans les bras de Charmant, qui l'embrassa avec 10 tendresse, et elle se retira en disant qu'elle mettait tout son espoir et toute sa confiance dans l'amour du roi et dans le talent du premier médecin de la cour. Elle était à peine sortie que le médecin, se penchant à l'oreille de Charmant, lui dit deux mots qui amenèrent 15 sur la figure du prince un sourire aussitôt comprimé. La marquise écartée, on n'avait plus rien à craindre; la vengeance était assurée. C'était un grand médecin que^ le docteur Wieduwillst.* Né au pays des Songes, il avait quitté de bonne heure ?o sa terre natale pour chercher fortune au royaume des Herbes-Folles. C'était un trop habile homme pour qu e l a fortune lui échappâ t. Dans les cinq ans qu'il avait passés à la célèbre université de Lugenmaulberg,* la théorie médicale avait changé vingt-cinq fois. Grâce à 25 cette éducation solide, le docteur avait une fermeté de principes que rien ne pouvait ébranler. Il avait, disait-il, la franchise et la brusquerie d'un soldat; quel- quefois même il jurait, surtout avec les dames. Cette brutalité lui permettait d'être toujours de l'avis du plus 30 fort et de se faire payer pour n'avoir pas d'opinion. C'est entre ses mains incorruptibles que la pauvre reine était tombée. PIF PAF 59 Il y avait trois jours qu'elle était enfermée, et la ville commençait déjà à parler d'autre chose, quand un matin Rachimbourg, échevelé, entra brusquement dans la chambre du roi et se jeta tout tremblant à ses pieds. — Sire, dit-il, je vous apporte ma tête. La reine a 5 disparu cette nuit. — Que m'annonces-tu là ? s'écria le roi en pâlissant. La chose est impossible ; le cachot est grillé de toutes parts. — Oui, dit le geôlier, la chose est impossible, cela est 10 certain ; les grilles sont à leur place, les murs aussi, les serrures et les verrous n'ont pas bougé : mais il y a ici- bas des sorcières qui passent à travers les murs sans déranger une pierre; qui sait si la prisonnière n'était point de cette espèce-là ? A-t-on jamais su d'où elle était 15 venue ? Le roi envoya chercher le docteur; c'était un scep- tique qui ne croyait guère aux sorciers. 11 sonda les murailles, il remua les grilles, il interrogea le geôlier: tout fut inutile. On envoya des gens sûrs par toute la 20 ville, on fît épier la marquise, dont lejdof^eur se ^é fiflît; après huit jours, il fallut renoncer à toutes les recher- ches. Rachimbourg perdit son emploi de geôlier, mais comme il possédait le secret royal, qu'on avait besoin de lui* et qu'il brûlait de se venger, on le fit concierge du 25 château. Furieux de sa mésaventure, il exerçait sa sur- veillance avec un tel zèle qu'en moins de trois jours il arrêta six fois Wieduwillst lui-même et désarma tous les soupçons. Au bout d'une semaine, des pêcheurs apportèrent à la 30 cour la robe et le manteau de la reine ; le flot avait jeté à la plage ces tristes dépouilles, toutes souillées de sable 6o CONTES BLEUS et d'écume. La pauvre folle s'était noyée, personne n'en douta en voyant la douleur du roi et les larmes de la marquise. On assembla le conseil qui, d'une voix una- nime, décida que légalement la reine était morte, que 5 légalement le roi était veuf, et que, dans l'intérêt du peuple, on supplierait Sa Majesté d'abréger un deuil dou- loureux et de se remarier au plus tôt, afin de consolide] la dynastie. Cette décision fut remise au prince par Wieduwillst, premier médecin de la cour et président du lo conseil royal ; il fit un discours si touchant que toute la cour en pleura, et que Charmant se jeta dans les bras du docteur en l'appelant cruel ami. Il n'est besoin de dire quelles funérailles on célébra pour une reine si regrettée. Ce fut une pompe admi- 15 rable; mais ce qu'il y eut de plus admirable, ce fut l'at- titude des jeunes filles de la cour. Chacune regardait Charmant, que ses habits de deuil rendaient encore plus beau; chacune pleurait d'un œil pour honorer la prin- cesse et souriait de l'autre pour séduire le roi. Ah ! si 20 la photographie eût été inventée, quels portraits l'anti- quité nous eût transmis, et quels modèles pour nos peintres ! Chez ces bonnes gens il y avait des passions : l'amour, la haine, la colère animaient ces figures vivan- tes; aujourd'hui nous sommes tous si vertueux et si 25 sages, que nous avons tous même habit, même chapeau et même physionomie. La civilisation est le triomphe de la morale et la perte de l'art. Après le récit des funérailles, qui, suivant l'étiquette, tenait six colonnes, la Gazette de la cour régla le grand 30 et le petit deuil, le bleu et le rose; ce sont les couleurs tristes au pays des Herbes-Folles. La cour fut tenue' de s'affliger profondément pendant trois semaines, et de PIF PAF 6l se consoler peu à peu dans les trois semaines suivantes ; mais comme le petit deuil tombait en carnaval,^ et qu'on protégeait le commerce, il fut décidé qu'on donnerait au château un bal masqué. Aussitôt les tailleurs et les couturières se mirent à l'œuvre; grands et petits solli- 5 citèrent des invitations, et on se mit à intriguer comme s'il s'agissait du sort de la monarchie. C'est de cette façon solennelle que fut pleurée la pauvre Pazza. 'r^ VI. LE BAL MASQUÉ Enfin il arriva ce grand jour si impatiemment attendu. 10 Depuis six semaines le bon peuple des Herbes-Folles avait la fièvre. On ne parlait plus de ministres, de séna- teurs, de généraux, de magistrats, de princesses, de duchesses, de bourgeoises; on ne parlait que de masques et de déguisements. La politique faisait silence,* ou, 15 pour mieux dire, la nation était coupée en deux grands partis: les conservateurs qui allaient au bal, et l'opposi- tion qui n'y allait pas. Si l'on en croit le récit officiel, la fête effaça par sa beauté toutes les fêtes passées et à venir. On avait mis 20 le bal au milieu des jardins, dans une rotonde magnifi- quement décorée. C'était en suivant tout un labyrinthe de longues charmilles, à peine éclairées par des lampes d'albâtre, qu'on arrivait tout à coup à une salle resplen- dissante d'or, de verdure, de fleurs et de lumières. Un 25 orchestre, à demi-caché dans le feuillage, faisait entendre une musique tour à tour ardente ou légère. Joignez à cela la richesse des costumes, l'éclat des diamants, le charme de l'intrigue, i ljeût jallu l' âme glacée d'un vieux stoïcien pour résister à l'ivresse du plaisir. 30 02 CONTES BLEUS Et cependant le prince Charmant ne s*amusait pas. Caché sous un domino bleu, et la figure entièrement masquée, il s'était adressé aux danseuses les plus élé- gantes et les plus gaies; il avait prodigué son esprit et 5 ses grâces, et n'avait trouvé partout qu'indifférence et froideur. On l'écoutait à peine, on bâillait en lui répon- dant, on avait hâte de le quitter. Tous les regards, toutes les avances étaient pour un domino noir, à nœuds roses, qui se promenait nonchalamment au milieu de la 10 fête, et qui recevait en pacha ^ tous les compliments et tous les sourires. Ce domino, c'était le seigneur Wiedu- willst, grand ami du prince, mais encore plus ami de son propre plaisir. Dans un moment de distraction, le doc- teur avait dit le matin, par hasard, sous le sceau du 15 secret, et à deux dames seulement, que le prince aurait des nœuds roses à son domino noir. Était-ce sa faute si les dames sont peu discrètes, ou si le prince avait changé d'habit? Tandis que le docteur jouissait, bien malgré lui, de 20 son triomphe imprévu. Charmant alla s'asseoir dans un coin de la salle, et cacha son front dans ses deux mains. Seul, au milieu de la foule et du bruit, il songeait, et l'image de Pazza se dressait devant lui. Il ne se repro- chait rien, sa vengeance était juste, et cependant il sen- 25 tait je ne sais quel^ remords. Pauvre Pazza !. sans doute elle avait été bien coupable, mais du moins elle l'aimait, mais elle le comprenait, mais elle l'écoutait, les yeux brillants de joie. Quelle différence avec toutes ces sottes qui, au premier mot, n'avaient pas deviné à son esprit 30 un prince en domino 1 Il se levait brusquement pour quitter le bal, quand, à peu de distance, il aperçut un masque qui, lui aussi. PIF PAF 63 s'était retiré de la fête et semblait rêver. Un domino entr'ouvert laissait voir une robe de bohémienne et des souliers à boucles enfermant un pied plus petit que celui de Cendrillon. Le roi s'approcha de l'inconnue et vit au travers du $ masque de velours deux grands yeux noirs dont le regard mélancolique le surprit et le charma. — Beau masque, lui dit-il, ta place n'est point ici. Elle est dans cette foule ardente et curieuse qui cherche le prince pour se disputer son sourire et son cœur. Là- 10 bas, il y a une couronne à gagner, ne le sais-tu pas ? — Je n'y prétends rien,^ répondit le domino d'une voix grave et douce. Jouer à ce jeu de hasard, c'est risquer de prendre le valet pour le roi. J'ai le cœur trop fier pour courir cette chance. 15 — Mais si je te montrais le prince ? — Que lui dirais-je? reprit l'inconnue; je n'aurais plus le droit de le blâmer sans offense ni de le louer sans flatterie. — Tu en ^ penses donc beaucoup de mal ? 20 — Non. Un peu de mal et beaucoup de bien ; qu'im- porte ? Après ces mots, le domino ouvrit son éventail et re- tomba dans sa rêverie. Cette indifférence étonna Charmant; il parla avec 25 vivacité, on lui répondit froidement; il pressa; il pria, et fit tant qu'on se résigna enfin à l'écoutennon plus dans la salle de bal, 011 la cKaîeur était accablante et la curiosité indiscrète, mais sous ces longues charmilles, oli de rares promeneurs cherchaient un peu de silence et de 3c fraîcheur. La nuit avançait; déjà plusieurs fois la bohémienne 8o MON ONCLE ET MON CURÉ lorsque vous aviez six ans; vous paraissiez alors gaie et bien soignée, et depuis, ma foi ! je vous avais pres- que oubliée. Je le regrette vivement aujourd'hui, puis- que vous n'étiez pas heureuse. s — Vous me garderez toujours auprès de vous main- tenant, mon oncle? — Certes, oui, répondit M. de Pavol presque avec vivacité. — Quand je dis toujours..., je veux dire jusqu'à 10 mon mariage, car je me marierai bientôt. — Vous vous marierez bientôt! Comment, vous sortez à peine de nourrice et vous parlez de vous ma- rier! Le mariage est une sotte invention, apprenez cela, ma nièce.» 15 Nous tournions dans une avenue de grands ormes qui conduisait au château. Ma cousine nous attendait sur le perron. Elle me reçut dans ses bras avec la majesté d'une reine qui accorde une grâce à ses sujets. 20 « Dieu, que vous êtes belle ! » dis-je en la regardant avec stupéfaction. Certes, il est rare de rencontrer des beautés incon- testables, mais celle de ma cousine s'imposait et ne pouvait être discutée. Elle ne plaisait pas toujours, 25 sa physionomie étant hautaine et parfois un peu dure. Elle avait des cheveux bruns plantés bas sur le front, un profil grec d'une pureté parfaite, une carnation superbe, des yeux bleus avec des cils foncés et des sourcils bien dessinés. Grande, forte, elle eût porté 30 plus de dix-huit ans^ si sa bouche, malgré un arc un peu dédaigneux qui menaçait de trop s'accentuer plus tard, n'avait eu des mouvements enfantins dénotant PIF PAF 65 prochez de cette lampe; je verrai si vous me dites la vérité. Charmant tendit la main avec assurance; la bohé- mienne en suivit toutes les lignes, et soupira. — Vous avez raison, seigneur, dit-elle; vous n'avez 5 jamais aimé. Mais cela ne suffit point à ma jalousie. Avant moi une autre femme vous a aimé. La mort ne rompt pas ces liens sacrés; la reine vous aime encore, vous lui appartenez! Accepter ce cœur dont vous ne pouvez plus disposer, ce serait de ma part une profana- 10 tion et un crime. Adieu. — Madame, dit le roi d'une voix mal assurée,^ vous ne savez pas ce que vous me faites souffrir. Il e?t des choses que je voulais ensevelir dans un éternel silence et que vous me forcez de révéler. La reine ne m'a jamais 15 aimé: l'ambition seule a dicté sa conduite. — Cela n'est pas,* dit l'inconnue en quittant le bras du prince. La reine vous aimait. — Non, madame, reprit Charmant; il y a eu dans tout ceci une abominable intrigue dont mon père et moi 20 nous avons été les victimes. — Assez! dit l'étrangère, dont les mains s'agitaient, dont les doigts se crispaient de façon étrange. Res- pectez les morts ; ne les calomniez pas. — Madame, s'écria le prince, je vous l'affirme, et per- 25 sonne n'a jamais douté de ma parole: la reine ne m'a jamais aimé; c'était une créature méchante. — Ah! dit le domino. — Volontaire, violente, jalouse ! — Si elle était jalouse, elle vous aimait, interrompit le 30 masque. Cherchez une preuve qui ait au moins un air de vraisemblance; n'accusez pas un cœur qui était tout à vous.* 66 CONTES BLEUS — Elle m'aimait si peu, dit le roi tout ému, que le soir même de son mariage elle a osé me dire en face qu'elle ne m'avait épousé que pour ma couronne. — Cela n'est pas, dit la bohémienne en levant les 5 mains, cela n'est pas. — Madame, dit Charmant, je le jure. — Tu en^ as menti I cria l'étrangère. Et pif! paf! voici deux soufflets qui aveuglent le prince, voilà l'inconnue qui s'enfuit. 10 Furieux, le roi recula de deux pas et porta la main à la garde de son épée; mais on ne va pas au bal comme en guerre. Pour toute arme le prince trouva un nœud de rubans. Il courut après son ennemie, mais o\x était- elle passée? Dans ce dédale de charmilles. Charmant 15 se perdit vingt fois; il ne rencontra que de paisibles dominos qui se promenaient deux à deux, et ne s'inquié- taient guère de son passage. Haletant, désespéré, il rentra dans la salle du bal; c'est là sans doute que l'étrangère avait cherché un refuge: mais comment la 20 découvrir? ♦ Une idée lumineuse traversa l'esprit du prince, s'il pouvait faire tomber tous les masques, il retrouverait sans doute la bohémienne, confondue par la présence du roi, trahie par sa propre agitation. Aussitôt Charmant 25 sauta sur une chaise et d'une voix qui fit tressaillir tout le bal : — Mesdames et messieurs, dit-il, le jour approche, le plaisir languit ; ranimons la fête par un nouveau caprice, à bas l'incognito ! ^ Je donne l'exemple ; qui m'aime me suive ! 30 II ôta son domino, jeta son masque et parut dans le costume espagnol le plus galant et le plus riche qu'un prince ait jamais porté. PIF PAF 67 Ce fut un cri général ; tous les yeux se portèrent sur le roi d'abord, puis tout aussitôt sur le domino noir à rubans roses, qui s'éloignait au plus vite, avec une mo- destie qui n'avait rien d'affecté. Chacun se démasqua, toutes les femmes approchèrent du prince, et l'on remar- 5 qua qu'il avait le goût le plus vif pour le costume bohé- mien. Jeunes ou vieilles, toutes les bohémiennes reçu- rent son hommage, il leur prit la main, il les regarda d'un air qui fit mourir d'envie les autres masques; puis, tout à coup, il fit un signe à l'orchestre, la danse recom- 10 mença, le prince disparut. 11 courut aux charmilles comme s'il allait y retrouver la traîtresse qui l'avait outragé. Qui le conduisait? La vengeance sans doute? Le sang lui bouillait dans les veines, il marchait au hasard, il s'arrêtait brusquement. 15 Il regardait, il écoutait, il épiait. A la moindre lueur qui traversait le feuillage, il se lançait comme un fou riant, pleurant tout ensemble, la tête perdue. Au détour d'une allée il rencontra Rachimbourg, qui s'avança vers lui, l'air effaré, le* mains tremblantes. 20 — Sire, murmura-t-il d'une voix mystérieuse. Votre Majesté l'a vu ? — Qui ? demanda le roi. — Le fantôme. Sire ; il a passé près de moi, je suis un homme perdu; demain je serai mort. 25 — Quel fantôme ? dit Charmant. Que me chante cet imbécile?^ — Un spectre, un domino aux yeux de flamme, qui m'a fait mettre à genoux^ et qui m'a donné deux souf- flets. 30 — C'est elle ! s'écria le roi, c'est elle ! Pourquoi l'as-tu laissée sortir? 63 CONTES BLEUS — Majesté, je n'avais pas ma hallebarde ; mais si ja- mais je la revois, morte ou vivante, je Tabats. — Garde-t'en bien ! ^ dit le roi. Si jamais elle revient, ne l'effraye pas, suis-la, découvre sa retraite. Mais où 5 est-elle? oii a-t-elle passé? Conduis-moi; si je la re- trouve, ta fortune est faite. — Sire, dit l'honnête concierge en regardant la lune, si le fantôme est quelque part, il est là-haut; je l'ai vu, comme je vous vois, qui se dissipait dans le brouillard. lo Mais avant de s'envoler il m'a dit deux mots pour Votre Majesté. — Parle vite. — Sire, ces mots sont terribles; jamais je n'oserai les répéter à Votre Majesté. 15 — Parle donc; je le veux, je l'ordonne. — Sire, le fantôn^ a dit d'une voix sépulcrale: «Va dire au roi que s'il en épouse une autre, il est mort. La bien-aimée reviendra.» — Tiens, dit le prince dont les yeux brillaient d'un 20 éclat étrange, prends ma bourse. Désormais je t'attache à ma personne; je te nomme mon premier valet de chambre. Je compte sur ton dévouement et ta discré- tion. Que ce secret reste à jamais entre nous. — C'est le second, murmura Rachimbourg; et il s'é- 25 loigna d'un pas ferme, en homme qui ne se laisse ni abattre par la peur ni éblouir par la fortune. Le lendemain, la Gazette de la cour contenait dans la partie non officielle les lignes suivantes, véritable lettre sans adresse: 30 «On a fait courir le bruit ^ que le roi pensait à se re- marier prochainement. Le roi sait ce qu'il doit à son peuple et se sacrifiera toujours au bonheur de ses sujets. PIF PAF 69 Mais le peuple des Herbes-Folles a trop de délicatesse pour ne pas respecter une douleur récente. Le roi ne songe qu'à une femme aimée; c'est du temps ^ qu'il es- père une consolation qui lui est refusée aujourd'hui.» Cette note agita la cour et la ville. Les jeunes filles 5 trouvèrent que le prince avait des scrupules excessifs; plus d'une mère haussa les épaules et dit que le roi avait des préjugés bourgeois; mais le soir il y eut brouille dans tous les ménages. Point de femme qui ne cher- chât querelle à son indigne époux et ne le forçât d'avouer 10 qu'il n'y avait dans tout le royaume qu'un cœur capable d'aimer et qu'un mari fidèle: c'était le roi Charmant. i\'%i^ [ VII. DEUX CONSULTATIONS Après tant d'agitations, le roi fut pris d'un ennui cruel. Pour se distraire, il essaya de tous les plaisirs. Il chassa, il présida son conseil, il alla à la comédie et à 15 l'Opéra, il lut un roman carthaginois, il passa dix revues, rien n'y fit;^ un souvenir inexorable, une image toujours présente ne lui laissait ni repos ni trêve. La bohémienne le poursuivait jusque dans ses rêves; il la voyait, il lui parlait, elle l'écoutait; mais, par je ne sais quelle fatalité, 20 dès que tombait le masque, ce qui apparaissait toujours, c'était la pâle et triste figure de Pazza. Pour procurer des émotions au prince,' pour chasser le chagrin par une diversion énergique, le docteur soupait tous les soirs en tête à tête avec Sa Majesté, et lui versait 25 largement l'ivresse et l'oubli. Wieduwillst ne s'épargnait guère;* mais le vin n'avait point de prise sur cette robuste cervelle; le docteur eût défié Bacchus et Silène^ avec lui. Tandis que Charmant, tour à tour bruyant ou silencieux, yo CONTES BLEUS se jetait aux extrêmes de la joie et de la tristesse, tou- jours agité, jamais heureux. Wieduwillst, calme et souriant, dirigeait la pensée du prince, et, par pure bonté d'âme,^ se chargeait pour lui de toutes les fatigues et de 5 tous les soucis du gouvernement. Déjà trois décrets avaient mis entre ses mains la police, la justice et les finances. La façon dont il ad- ministrait rimpôt lui ôtait toute inquiétude personnelle sur Tavenir. La justice frappait les imprudents qui 10 criaient trop fort, la police faisait taire ceux qui parlaient trop bas. Toutefois, et malgré l'habileté de ces combi- naisons politiques, le peuple, cet éternel ingrat, n'appré- ciait pas son bonheur. Le docteur avait de l'ambition, il était né pour être 15 vizir. Chaque matin quelque nouvelle ordonnance faisait sentir au peuple que le roi n'était rien, que le ministre était tout; Charmant était le seul qui ne s'aperçût point de sa nullité.^ Enfermé d^s son palais, et rongé d'ennui, il n'avait pour toute compagnie qu'un page, placé auprès 20 de lui par le premier ministre à la recommandation de Rachimbourg. Wieduwi llst con naissait trop les hommes pour rien refuser à un premier valet de chambre. Espiègle, bavard, indiscret, du reste bon musicien et joueur, Tonto' (c'était le nom de l'enfant) amusait le roi 25 par sa gentillesse; il ne plaisait pas moins au ministre, mais par d'autres vertus. Dévoué à son bienfaiteur, l'aimable page lui rapportait innocemment toutes les paroles du prince; c'était du reste un métier peu diffi- cile; le roi rêvait toujours, et ne disait rien. 30 C'est une belle chose que d'avoir le profit de la puissance; mais l'appétit vient en mangeant,* même aux ministres. Il fallait à l'ambitieux docteur et les honneurs PIF PAP 71 et l'éclat de la royauté. Détrôner Charmant n'entrait pas dans la pensée de son meilleur ami; les peuples ont quelquefois de sots préjugés et tiennent à de vieilles habitudes; mais rien n'était plus aisé que d'effrayer un prince malade, et de l'envoyer au loin chercher une 5 guérison qui se ferait attendre.^ En son absence, on régnerait par procuration. Charmant était jeune, il croyait encore à la vie; et d'ailleurs comment eût-il résisté aux tendres inquiétudes du bon docteur ? Une consultation réunit un . soir au 10 palais les trois plus fortes têtes de la Faculté ; ^ le grand Tristan,' le gros Jocondus, le petit Guilleret, trois hommes célèbres, trois, génies qui avaient fait fortune, chacun avec une idée, ce qui fait qu'ils n'en avaient jamais eu davantage.* 15 Après que le roi eut été interrogé, regardé, ausculté, tourné et retourné, Tristan prit la parole,* et d'une voix brutale: « — Sire, dit-il, il faut vous soigner comme un paysan, et vivre sans rien faire. Votre maladie est une anémie, 20 une atonie constitutionnelle. Il n'y a qu'un voyage aux Eaux-Claires qui puisse vous guérir. Partez vite, sinon vous êtes un homme mort; voilà mon avis. — Sire, dit le gros Jocondus, je partage entièrement l'admirable opinion de mon cher confrère. Vous souffrez 25 de vous trop bien porter.* Votre maladie est une plé- thore constitutionnelle. Allez boire des Eaux-Claires, vous guérirez. Partez vite, sinon vous êtes un homme mort; voilà mon avis. — Sire, dit le petit Guilleret, je ne puis qu'admirer le 30 diagnostic de mes maîtres. Je m'incline devant leur science. Votre maladie est une névrose constitutionnelle. 72 CONTES BLEUS Buvez des Eaux- Claires. Partez vite, sinon vous êtes un homme mort: voilà mon avis. Sur quoi on rédigea une consultation unanime que Tonto porta sur Theure même à la Gazette de la cour; 5 puis les trois docteurs se levèrent, saluèrent le ministre, saluèrent le roi, tendirent la main^ et descendirent l'es- calier du palais en se querellant ou en riant, je ne sais lequel. Le texte de la chronique est douteux, il y a un pâté d'encre à cet endroit. lo Après le départ des trois médecins, Wieduwillst lut des yeux la consultation, réfléchit longtemps et regarda le roi. Charmant, qui ce soir-là avait soupe un peu mieux que de coutume, avait l'œil hagard, et n'avait pas même écouté les docteurs. 15 — Sire, dit-il, l'avis unanime de ces messieurs est que si vous voulez guérir, il faut vous rendre aux Eaux-Claires et abandonner les affaires de votre État. C'est là un parti qui me paraît peu digne de la Majesté royale. Un grand prince doit se sacrifier pour son peuple, et . . . 20 — Assez, dit le roi; fais-moi grâce de* cette vieille morale; arrive à la conclusion. Tu veux que je parte, mon bon ami, tu en brûles d'envie;* et cela, par intérêt pour moi, je le sais. Fais un décret qui te confie la régence; je le signerai. 25 — Sire, le décret est là, dans le portefeuille; un bon ministre a toujours des projets de loi pour toutes les circonstances. On ne sait pas ce qui peut arriver. Charmant prit la plume, et d'une main nonchalante signa le décret sans le lire; il le tendit au ministre, qui 30 approchait en souriant; puis tout d'un coup le roi retira la pièce, et par caprice il la lut. — Quoi! dit-il, pas d'exposé des motifs? Rien qui PIF PAF 73 assure mon peuple de la bienveillance que je te porte !^ Docteur, tu es trop modeste; demain ce décret sera dans la Gazette, avec un exposé fait de la main de ton maître et de ton ami. Adieu; ces messieurs m'ont fatigué. 5 Le docteur sortit d'un pas léger, la tête haute, les yeux brillants; il était encore plus fier et plus insolent que de coutume. Charmant retomba dans sa rêverie et songea que, malgré tout, il n'était pas le plus malheureux des princes, puisque le ciel lui avait donné un ami. lo Tout à coup, sans se faire annoncer^ entra dans la chambre du roi le plus étrange petit docteur qu'on ait jamais vu dans un château. Il avait une perruque blanche et bouclée qui lui tombait au milieu du dos, une barbe couleur de neige qui lui descendait sur la poitrine, 15 et avec cela des yeux si vifs et si jeunes, qu'on eût dit qu'ils étaient venus au monde soixante ans après le reste du corps. — OU sont ces drôles? cria-t-il d'une voix pointue en franpant avec sa canne. Oh sont-ils, ces ignorants, ces 20 cuistres, ces malappris, qui ne m'ont pas attendu? Ah! dit-il au roi stupéfait, vous êtes le patient, c'est fort bien: tirez-moi* votre langue, vite, je suis pressé. -— Qui êtes- vous? dit le roi. — Le docteur Vérité, le plus grand médecin du monde; 25 vous le verrez bientôt, malgré ma modestie. Demandez à Wieduwillst, mon élève, qui m'a fait venir du pays des Songes; je guéris tout, jusqu'aux maladies qui n'en sont pas!* Tirez-moi votre langue; bien. Où est la consul- tation? très bien. Savez-vous quelle est votre maladie? 3° C'est le chagrin et pis encore. — Vous voyez cela? dit Charmant tout effrayé. 74 CONTES BLEUS — Oui, mon fils, c'est écrit sur votre langue. Mais je vous guérirai; demain à midi ce sera fait — Demain, dit le roi, mais tous mes trésors . . . — Silence! mon fils. Quel est ce portefeuille? celui 5 du ministre? Bien. Signez-moi ces trois papiers? — Ce sont des décrets en blanc,^ dit le roL Qu'en voulez-vous faire ? — Ce sont mes ordonnances à moi,* signez. Bien, mon fils, soyez obéissant; demain, à midi, vous serez lo gai comme un pinson. Première ordonnance: je sup- prime six régiments. Seconde ordonnance: Un sou dans la poche du paysan en vaut vingt dans la caisse du prince; je supprime le quart des impôts. Troisième ordonnance: La liberté est comme le soleil, c'est le 15 bonheur et la fortune du pauvre; laissez-lui sa place au soleil. J'ouvre les prisons politiques, et je démolis les prisons pour dettes. Vous riez, mon fils; c'est bon signe quand un malade rit de son médecin. — Oui, dit Charmant, je ris en songeant à la figure 20 que ferait demain Wieduwillst, s'il lisait ces ordonnances dans la Gazette de la cour. Assez de folies, docteur bouffon, rendez-moi ces papiers; finissons cette farce de carnaval. — Qu'est-ce cela ? dit le petit homme en prenant le 25 décret de régence. Le ciel me pardonne, c'est une abdication I Y pensez-vous, prince Charmant ? Quoi ! l'héritage de vos pères, ce peuple que Dieu vous a confié, ton honneur, ton nom, tu jettes tout aux pieds diin aventurier ? Tu te laisses détrôner et duper par un per- 30 fide? Cela n'est pas possible, cela ne me va pas;* je m'y oppose, entends-tu ? — Quel est l'insolent qui tutoie son prince ? PIF PAF 75 — N'y faîtes pas attention, reptit le médecin; je suis de la religion des quakers et des amis de la paix. La politesse n'est pas dans les mots* Charmant, est-tu fou? est-ce que tu rêves ? N'as-tu plus rien dans le cœur? — C'est trop fort^ cria le roi. Sors d'ici, misérable, 5 ou je te fais passer par la fenêtre.^ — Sortir? cria le petit docteur de sa voix la plus aigre. Non! pas avant que j'aie anéanti cet acte de folie et de stupidité. Ton abdication, je la déchire, je la foule aux pieds. 10 Charmant saisit ce furieux et appela ses gardes. Personne ne répondit. Tantôt menaçant, tantôt sup- pliant, le petit vieillard se débattait avec une incroyable vivacité. D'un coup de pied il jeta la lampe par terre; mais le roi, sans s'effrayer de l'obscurité, tenait ferme le 15 sorcier dont les forces faiblissaient. — Laissez-moi, murmurait l'inconnu; au nom du ciel, laissez-moi. Vous ne savez pas ce que vous faites, vous me brisez le bras. Paroles et prières, tout était inutile. Soudain, pif! 20 paf! pif! paf! une volée de soufflets donnée par une une main hardie s'abat sur les joues du roi. Surpris, Charmant lâche prise et se jette à l'aventure sur son invisible ennemi. Mais il ne saisit que le vide,' trébuche et appelle à grands cris un secours qui ne vient pas. 25 Pareille chose ne fût pas arrivée chez un ministre; les rois sont toujours les plus mal gardés. VIII. LA FIN d'un rêve 4 Enfin une porte s'ouvrit. Rachimbourg entra, suivant l'étiquette, afin de déshabiller Sa Majesté; le fidèle ser- j6 CONTES BLEUS viteur parut fort intrigué de trouver le roi sans lumière et marchant à tâtons de long des murs. — Oïl est-il, ce médecin du diable! demanda Char- mant, qui écumait de fureur. S — Sire, dit le valet de chambre, il y a plus d'une heure que Son Excellence a quitté le château. — Qui te parle de Wieduwillst ? cria le roi. OU est passé le scélérat qui vient de m'insulter? Rachimbourg regarda le prince d'un air contrit et leva lo les yeux au ciel en soupirant. — Un homme sortit par cette porte qui mène chez toi, dit Charmant. Comment est-il entré ? par oli s'est-il sauvé ? — Sire, dit Rachimbourg, je n'ai point quitté mon 15 poste, et je n'ai vu personne. — Je te dis qu'un homme était dans cette chambre il y a un instant. — Sire, Votre Majesté ne se trompe jamais; si un homme était dans cette chambre, il y est encore, à 20 moins qu'il ne se soit envolé, ou que Votre Majesté n'ait rêvé. — Triple sot, ai-je l'air d'un homme qui rêve? Cette lampe, est-ce moi qui l'ai renversée ? Ces papiers, est-ce moi qui les ai déchirés.^ 2$ — Sire, dit Rachimbourg, Dieu me préserve de dé- mentir mon souverain. Votre Majesté me paye, ce n'est pas pour que je la contrarie. Mais il y a cette année une épidémie de rêves singuliers. On ne sait pas tout ce qu'on peut faire ou souffrir en dormant. Tout à 30 l'heure, le sommeil m'a pris malgré moi, et si je n'étais pas sûr d'avoir rêvé, j'affirmerais qu'une main invisible m'a donné deux soufflets qui m'ont réveillé en sursaut. PIF PAF 77 — Deux soufflets! dit le roi; c'est le fantôme! — Votre Majesté a mille fois raison, je ne suis qu'une bête, s'écria Rachimbourg; c'est le fantôme! — Et je ne l'ai pas reconnu! dit Charmant. Pourtant c'était sa voix et son geste. Que veut dire ceci ? Est-ce 5 une insulte nouvelle ? Est-ce un avis du ciel ? Y a-t-il un danger qui me menace? N'importe, je resterai dans mes États. Mon ami, pas un mot de tout ceci; prends cette bourse, garde-moi le secret. — C'est le troisième, murmura le fidèle Rachim- 10. bourg ; sur quoi il déshabilla le roi avec un zèle et une adresse qui, plusieurs fois, firent sourire Sa Majesté. Tant d'émotions coup sur coup éloignent le sommeil. Il faisait petit jour quand le prince s'endormit, et grand 15 jour quand il s'éveilla. Dans ce prem ier moment qui n'est plus le sommeil et qui nest pas encore le réveil. Charmant crut entendre un bruit étrange; les cloches sonnaient, les canons tonnaient, trois ou quatre musiques militaires jouaient chacune un air différent. Le roi 20 sonna, Rachimbourg entra, tenant à la main un bouquet de fleurs. — Sire, dit-il, que Sa Majesté permette au plus humble de ses serviteurs de lui exprimer le premier la joie universelle. Votre peuple est ivre de reconnaissance et 25 d'amour. L'impôt diminué! les prisons ouvertes! l'armée réduite! Sire, vous êtes le plus grand roi du monde; jamais la terre n'a vu un prince tel que vous. Montrez-vous au balcon; répondez à ces cris de Vïve^ le roi! souriez à ce geuple qui vous bénit, ma ^ 30 Rachimbourg n'aoïeva pas, les larmes lui coupèrent la voix;^ il voulut s'essuyer les yeux; mais il était si ému 78 CONTES BLEUS qu'au lieu d« son mouchoir, il tira la Gazette de la cour et se mit à la baiser comme un f oiu Charmant prit le journal, et, tandis» qu'on l'habillait, essaya en vain de rassembler ses idées. Par quel hasard 5 ces folles ordonnances ce trouvaient-elles dans le journal officiel? Qui les y avait mises? Comment Wieduwillst ne paraissait-il point ? Le prince voulait réfléchir, con- sulter, interroger; mais le peuple était là, sous les fenê- • très: on ne fait pas attendre^ cette autre majesté. 10 Dès que le roi parut au balcon, il fut salué par des cris d'enthousiasme qui, malgré tout, lui firent battre le cœur. Les hommes lançaient leurs chapeaux en l'air, les femmes agitaient leurs mouchoirs, les mères élevaient dans leurs bras leurs enfants et leur faisaient tendre au 15 ciel des mains innocentes en répétant Vive le roi/ Les gardes du palais avaient des fleurs au bout des fusils, les tambours battaient, les officiers remuaient leurs épées qui brillaient au soleil. C'était un délire. L'émotion générale gagna Charmant ; il se mit à pleurer sans savoir 20 pourquoi A l'instant midi sonna ;^ le fantôme avait raison, le prince était guéri. Après le peuple, ce fut le tour des corps de l'État,* qui tous, ministres en tête, vinrent féliciter et remercier le roi d'avoir si bien compris les vœux de ses fidèles con- 25 seillers. Un seul personnage manquait à la fête: c'était Wieduwillst. Oli avait-il caché sa fureur et son dépit? On l'ignorait.* Un billet mystérieux reçu le matin même l'avait décidé à fuir; et cependant ce billet ne contenait que ces simples mots: Le roi sait tout! Qui avait écrit 30 cette lettre fatale? Ce n'était pas le prince; seul peut- être dans le palais il songeait à son ministre, et s'éton- nait de ne pas le voir auprès de lui» PIF PAF 79 Tout à coup Tonto entra pâk ; îl courut au roi et lui remit un pli cacheté qu'un officier apportait à bride abattue.^ Le gouverneur de la province, le général Bayonnette, annonçait au prince une* terrible nouvelle; les six régiments licenciés s'étaient révoltés, Wieduwillst s à l^ir tête. Les séditieux avaient proclamé la déchéance du roi, qu'ils accusaient de crimes abominables, et notamment du meurtre de la reine. Ils étaient nom- breux, bien commandés ; ils approchaient de la ville, à peine défendue par quelques régiments douteux et lo mécontents. Bayonnette suppliait le roi de venir à l'instant même et de prendre le commandement; une heure de retard, tout était perdu. Entraîné par Tonto et par Rachimbourg, le roi, suivi de quelques officiers, sortit secrètement du palais. Une 15 proclamation placardée sur les murs de la ville, et affichée à tous les coins de rue, déclara qu'il n'y avait rien de vrai dans les bruits que faisaient courir quelques malveillants, et que jamais l'armée n'avait été ni plus dévouée ni plus fidèle. Ce fut alors une panique univer- 20 selle; la Bourse baissa de quatre francs^ en une demi- heure, et ne remonta que sur la nouvelle non officielle que le roi avait été bien reçu au quartier général. IX. AUX GRANDS MAUX LES GRANDS REMÈDES La nouvelle était fausse; le prince avait été très froidement accueilli. C'était sa faute. Triste, abattu, 25 Charmant n'avait trouvé ni une plaisanterie pour les soldats ni un mot de confiance pour les officiers. Il entra sous la tente du général et se laissa tomber sur un siège en soupirant. Tonto n'était guère moins accablé. 8o CONTES BLEUS — Sire, dit Bayonnette, laissez-moi vous parler avec la franchise d'un soldat, avec la liberté d'un ancien amL L'armée murmure, elle hésite; il faut l'enthousiasmer ou nous sommes perdus. L'ennemi est en vue, attaquons. 5 Cinq minutes décident quelquefois du destin des empires; nous en sommes là.^ N'attendez pas qu'il soit trop tard. — C'est bien, dit le roi; faites monter à cheval;* dans un instant je suis* à vous. lo Resté seul avec Rachimbourg et Tonto, le roi prit la parole, et d'un ton désespéré: — Mes bons amis, dit-il, quittez un maître qui ne peut plus rien faire pour vous. Je ne disputerai point à mes ennemis une vie misérable. Trahi par l'amitié, 15 assassiné par un perfide, je reconnais dans mon malheur, la main de Dieu qui me frappe. C'est le châtiment de mon crime: j'ai tué la reine par ma stupide vengeance; l'heure est venue d'expier ma faute ; je suis prêt. — Sire, dit Tonto, essayant de sourire, secouez ces 20 tristes pensées. . Si la reine était là, elle vous dirait de vous défendre. Vous pouvez m'en croire, ajouta-t-il en .tortillant sa moustache naissante.^ Je connais les femmes, moi! Fussent-elle s mortes, elles aimeraient encore à se venger. D'ailleurs vous n'avez pas tué la 25 reine; et peut-être n'est-elle pas si morte que vous pensez. — Enfant, qu'est-ce que tu dis? s'écria le roi. Tu perds la tête. — Je dis qu'il y a des femmes qui font exprès de 30 mourir* pour faire enrager leurs maris; pourquoi n'y en aurait-il paai, ^i ressusc iteraient pour les faire enrager davantage? Laissez les morts; songez aux vivants qui PIF PAF 8l VOUS aiment. Vous êtes roi, battez-vous en roi; et s'il faut tomber, tombez en roi. — Sire, dit Bayonnette, entrant Tépée à la main, le temps presse. — Général, faites sonner le boute-selle, cria Tonto, 5 nous partons. ^ Charmant laissa sortir le général, et regardant Tonto: — Non, dit-il, je ne partirai pas. Je ne sais ce que j'éprouve; j'ai horreur de moi-même. Je ne crains pas la mort, je vais me tuer, et cependant j'ai peur, je ne me 10 battrai pas. — Sire, dit Tonto, au nom du ciel, rappelez votre courage. A cheval, il le faut. — Grand Dieu 1 s'écria-t-il en se tordant les mains, le roi ne m'écoute pas, nous sommes perdus! — Allons, dit-il, en prenant le prince 15 par son manteau, levez- vous, Sire ; à cheval, malheureux ! Charmant, sauve ton royaume, sauve ton peuple, sauve tout ce qui t'aime. Lâche ! regarde-moi, je ne suis qu'un enfant, je vais mourir pour toi. Ne te déshonore pas, bats-toL Si tu ne te lèves pas, moi, ton serviteur, je 20 t'insulte; tu es un lâche, entends-tu, un lâche! Et, pif! paf! voilà le roi souffleté par un page in- solent. — Mort de ma vie! cria le roi en tirant son épée. Avant de mourir j'aurai le plaisir de tuer ce misérable! 25 Mais le misérable avait couru hors de la tente. D'un bond il avait sauté à cheval, et l'épée à la main, il marchait droit à l'ennemi en criant: — Le roi! mes amis, le roi! Sonnez, trompettes! En avant! en avant! 30 Charmant, fou de colère, s'était élancé à la poursuite du page. Comme un taureau à qui on montre le drapeau 82 CONTES BLEUS rouge» il courait tête baissée, sans s'inquiéter du danger ni de la mort; Bayonnette courait après le roi; l'armée courait après son général: c'est la plus belle charge de cavalerie qu'on ait jamais vue dans l'histoire. 5 Au bruit des escadrons qui faisaient trembler la terre, l'ennemi, surpris, eut à peine le temps de se mettre en bataille. Mais un homme a reconnu le roi ; c'est l'infâme Wieduwillst. Charmant est seul, et, tout occupé de sa vengeance, il ne voit rien que le page qu'il poursuit. Le 10 traître se précipite sur le prince, le sabre au poing. C'en était fait du roi,^ si, par un dévouement hardi, Tonto, enfonçant l'éperon dans le ventre de son cheval, n'eût fait cabrer l'animal et ne l'eût jeté sur Wieduwillst. Le page reçut le coup destiné à son maître ; il poussa un 15 grand cri, ouvrit les bras et tomba; mais au moins sa mort fut vengée. Dans la gorge du perfide médecin le roi enfonça son épée jusqu'à la garde, et, avec un certain plaisir, la retira toute dégouttante de sang. L'homme est décidément le roi des animaux . • . 20 féroces. La mort du traître décidait la journée» L'armée royale, électrisée par l'héroïsme de son chef, eqt bientôt dissipé quelques bataillons sans consistance. La rébellion, qui n'avait plus rien à espérer, demanda 25 grâce, et fut aussitôt écoutée par un prince heureux et clément. Une heure après être sorti de ce camp oli il voulait mourir, Charmant y rentrait en triomphateur, ramenant avec lui vainqueurs et vaincus, confondus dans les 30 mêmes rangs. Les premiers criaient fort, les seconds bien davantage. Rien n'aiguise le dévouement comme un peu de trahison. PIF PAF 83 X. où l'on voit qu'il ne faut pas juger les gens sur l'ap- parence, ET que TONTO n'était PAS TONTO Le roi entra dans la tente pour s'y reposer un instant ; la vue de Rachimboui^ lui remit Tonto en mémoire.^ — Le page est mort ? demanda-t-il. — Non, Sire, répondit Rachimbourg; malheureuse- ment pour lui, il vit encore ; il est perdu. Je l'ai fait 5 transporter chez sa tante, la marquise de Costoro. — C'est le neveu de la marquise? dit le roi. On ne me l'a jamais dit. — Votre Majesté l'aura oublié,' répondit tranquille- ment le valet d& chambre. Le pauvre enfant a une 10 grave blessure à l'épaule; il ne s'en relèvera pas. Ce serait un grand bonheur pour lui que de voir Votre Majesté avant que de mourir. — C'est bien, dit le roi ; conduis-moi près de ce mori- bond. 15 £n arrivant au château, le roi fut reçu par la mar- quise et introduit dans une chambre oU les rideaux ne laissaient entrer qu'un jour douteux.* Sur un lit de repos était couché le page, pâle et sanglant; il eut ce- pendant la force de soulever la tête et de saluer le roi. 20 — Qu'est ceci? s'écria Charmant; voilà la plus étrange blessure que j'aie vue de ma vie: le page n'a plus qu'une moustache. — Sire, dit la marquise, c^est probablement le fer du sabre qui aura brûlé l'autre moustache en passant. 25 — Quel prodige! dit le prince; d'un côté c'est Tonto, mon page, ce mauvais sujet;* de l'autre, c'est . . . non, je ne me trompe pas, c'est toi, mon bon ange et mon sauveur, c'est toi, ma pauvre Pazza. 84 CONTES BLEUS Et le roi se mit à genoux, et prit une main qu'on lui abandonnait. — Sire, dit Pazza, mes jours sont comptés, mais avant de mourir . . . 5 — Non, non, Pazza, tu ne mourras pasl s'écria' le prince tout en larmes. — Avant de mourir, ajouta-t-elle en baissant les yeux, je voudrais que Votre Majesté me pardonnât les deux soufflets que ce matin, dans un zèle indiscret . . . 10 — Assez, dit le roi; je te pardonne. Après tout, un trône et l'honneur valent bien ... ce que j'ai reçu. — Hélas I dit Pazza, ce n'est pas tout — Comment, dit le roi, qu'y a-t-il encore? — Sire, s'écria la marquise, qu'avez-vous fait ? Voilà 15 mon enfant qui se meurt. — Reviens à toi, Pazza, s'écria le roi. Parle, et sois sûre que je te pardonne d'avance tout ce que tu as fait. Hélas! ce n'est pas toi qui as besoin de pardon. Sire, le docteur, le petit docteur qui s'est permis de 20 donner à Votre Majesté . . . — Vous l'avez envoyé? dit le roi en fronçant le sourcil. — Non, Sire, c'était moi-même. Hélas ! que n'aurais- je pas fait pour sauver mon roi? C'est moi qui, toujours ' 25 pour retirer Votre Majesté des embûches d'un traître, me suis per mis . . . lSSCz, dit Charmant, je* te pardonne, quoique la leçon ait été un peu forte.* — Hélas I ce n'est pas tout, dit Pazza. 30 — Encore I dit le roi en se levant. — Ahl ma tante, je me trouve mal,' dit la pauvre Pazza. PIF PAF 85 Cependant à force de soins, elle revint à la vie, et tournant ses yeux languissants vers le roi tout ému: — Sire, dit-elle, la bohémienne du bal masqué, qui s'est permis . . . — Était-ce toi, Pazza? dit Charmant. Ohl pour 5 ceux-là, je te les pardonne, je les ai bien mérités. Douter de toi, la sincérité même. Mais, j'y pense, s'écria le roi, te souviens-tu de ce serment téméraire que tu me fis le Boir de notre mariage? Méchante, tu as tenu ta promesse; à moi^ de tenir la mienne. Pazza, dépêche- 10 toi de guérir et de rentrer dans ce château d'oU le bon- heur est sorti avec toi. — J'ai une dernière faveur à demander à Votre Majesté, dit Pazza. Rachimbourg a été témoin ce matin d'une scène dont je rougis et que tout le monde 15 doit ignorer. Je recommande à votre bonté ce fidèle serviteur. — Rachimbourg, dit le roi, prends cette bourse, et, sur ta tête, garde-nôus le secret. Rachimbourg mit un genou en terre auprès du lit de 20 la reine, et, baisant la main de sa souveraine: — Majesté, dit-il tout bas, c'est le quatrième secret, et le quatrième . . . Puis, se relevant: — Dieu bénisse la main qui me protège 1 cria-t-il à haute 25 voix. Quelques moments après cette scène touchante, Pazza était endormie. Le roi, toujours inquiet, causait avec la marquise. — Ma tante, disait-il, croyez-vous qu'elle guérisse ? 30 — Bah 1 dit la vieille dame, le plaisir fait revenir des portes du tombeau la femme la plus malade. Qu'est-ce 86 CONTES BLEUS donc que le bonheur? Embrassez la reine, mon neveu, cela lui fera plus de bien que tous vos médecins. Le roi se baissa vers la reine endormie et la baisa sur le front. Un sourire angélique, un songe heureux peut- 5 être, éclaira ce pâle visage. Et le roi se mit à pleurer comme un enfant. XI. où IL EST PROUVÉ QUE LA FEMME DOIT OBÉISSANCE A SON MAKI La marquise avait raison (les femmes ont toujours raison . . . passé soixante ans). Quinze jours ^ de bon- heur mirent Pazza sur pied* et lui permirent de faire une 10 entrée triomphale auprès du roi son époux. Sa pâleur et son bras en écharpe ajoutaient encore à sa grâce et à sa beauté. Charmant n'avait d'yeux que pour la reine, et le peuple faisait comme le roi. Pour arriver au château, il fallut plus d'une heure. 15 L'édilité de la capitale des Herbes-Folles n'avait pas élevé moins de trois arcs de triomphe, forteresses menaçantes, défendues chacune par trente-six députa- tions et trente-six discours. Le premier arc, fait en treillis, garni de fleurs et de verdure, portait pour 20 inscription: AU PLUS TENDRE ET AU PLUS FIDÈLE DES ÉPOUX Il était confié à la garde de cinq ou six mille jeunes filles, en robes blanches et en rubans roses. C'était le printemps de l'année, l'espéranjce de l'avenir qui venait saluer la Gloire et la Beauté. 25 Le second monument, plus lourdement construit, en charpentes couvertes de tapisseries, portait au sommet PIF PAF 87 la Justice, louchant, et tenant sa balance de travers. Au-dessous était écrit: « AU PÈRE DU PEUPLE, AU MEILLEUR ET AU PLUS SAGE DES PRINCES Des prêtres, des administrateurs, des magistrats en robes de toutes les couleurs, y figuraient la Religion, la Sagesse et la Vertu ; du moins c*est ce (m e dirent au roi 5 ces vénérables et discrètes personnes qui ne se trompent jamais. Venait enfin un arc immense, véritable trophée mili- taire, construit avec des canons, et portant pour devise: AU PLUS HARDI ET AU PLUS VAILLANT DES ROIS C'est là que l'armée attendait son général et que la 10 reine fut saluée par la voix majestueuse de cent canons et de deux cents tambours. Toute éloquence humaine faiblit auprès de celle-là et lui laisse toujours le dernier mot. Je ne vous parlerai pas du dîner, qui n'en finit pas,^ et 15 des soixante autres discours qu'on tira de la Gazette de la cour, oli ils avaient déjà servi deux ou trois fois, et qu'on y remit en dépôt, à l'usage des générations futures. Enfin elle s'acheva, cette interminable soirée oii le roi avait prodigué ses plus aimables sourires. A minuit, 20 Charmant prit la reine par la main, puis il lui dit: — Pazza, ma chérie, je n'affecte pas une fausse modestie; je sais bien que je suis la plus forte tête de mon conseil; mes ministres eux-mêmes sont forcés de le reconnaître, ils sont toujours de mon avis; mais avec 25 88 CONTES BLEUS tout cela,^ il y a plus de sagesse dans ton petit doigt que dans toute ma royale cervelle. Aussi mon parti est arrêté.* Que ma cour, que mon peuple célèbre ma sagesse, ma bonté et même ma vaillance, c'est bien, 5 j'accepte cet hommage. Toi seule as le droit d'en rire, et tu ne me trahiras pas. Mais, dès aujourd'hui, je t'abandonne ma puissance. Le roi, ma chère Pazza, ne sera que le premier de tes sujets, le ministre fidèle de tes volontés. Tu feras la pièce, je la jouerai; les bravos 10 seront pour moi, suivant l'usage, et je te les revaudrai à force d'amour. — Mon ami, ne parlez pas ainsi. — Je sais ce que je dis, reprit le roi avec vivacité; je veux que tu commandes, j'entends que, dans mon empire 15 comme dans une maison, rien ne se fasse que par toi; je suis le maître, je suis le roi, je le veux, je l'ordonne. — Sire, dit Pazza, je suis votre femme et votre ser- vante, mon devoir est de vous obéir. Après quoi, dit la chronique, ils vécurent longtemps, 20 heureux et contents, et ils s'aimèrent beaucoup. C'est la morale des meilleurs contes et de toutes les bonnes histoires. NOTES NOTES Pag« 1« — I. RBLgaae, a fortified sea-port of Austria. 2. on, the indefinhe construction is often best translated by the passive voice. Pag^e 2« — I. seras. In English we use the présent time.-~ que résumes the quand ; omit in translating. 2. jeune, i.e. new, newly made. 3. qui mettait ses enfants sur la paille, reduced his childrtn t» poverty. Pagre 8. — I. par-dessus le marché^ into (lit, ''above'*) the bargain, 2. une branche de sapin. In former times a branch of a fir-tree was hung over the doors of tavems; hence the proverb: "Good wine needs no bush." 3. nouyeau, comp. wi^ jeune, page 2, note 2. Pag« 4* — I. éclaircit, note subjunctive slter en attendant çue» 2; mon, the English idiom is **our** 3. quoi qu'il pût faire, in spite of ail ke could do. II Page 6* — I. ils, after aussi the inversion of subject and pre- dicate, as in interrogative sentences, is common. 2. remerciât, subjunctive after sans que, 3. Cher ami, my dear. Page 6. — I. qui dort, which is idle (lit., "asleep"). 2. fen serai quitte pour, / shall only hâve to. 91 92 NOTES ^' "^"^ 3. à tirer ma vache je n'en finirai pas, i/ I lead tny cow I shall never get home ; lit., "I shall never finish pulling my cow." 4. qui ferait mieux mon affaire, which would suit me better. Page 7« — I. gras à lard, veryfat 2. Dom, a title of honor, formerly given to members of certain monastic orders in France and also to noblemen in Portugal. 3. peine perdue, it was Hme thrawn away. Page 8. — I. ne se fit-il aucun scrupule, did not hesitate; lit., " did not scruple." 2. Marché fait, iVs a bargain; note absolute construction. 3. moi, hère untranslatable. Compare with Old English con- struction: '* Whip me such honest knaves," Othello, act I, scène i, Une 49. 4. du, note regular use of definite article with parts of the body instead of possessive pronoun. 5. bien éperonné, with long spurs. Page 9. — I. il finissait par se faire, hefinally resigned himself, 2. le, note use of article only instead of préposition and article in English. 3. comme ci, comme ça, so-so. 4. vous ayez fait là de belle besogne, y ou hâve mode a fine pièce of work of it. 5. Que, whether. Page 10. — I. de votre côté, on your {side) part, 2. Marché conclu, comp. with page 8, note 2. 3. vieille, hère dear, 4. qui nous regardent de si haut, who so look down upon us. 5. chemin faisant, on the way. Page 11. — I. sous son toit, in his pen; lit., ''under his roof." 2. je vous reconnais là, that isjust likeyou. 3. par monts et par vaux, up hill and down hill (lit., "dales"). 4. que, omit in translating. It introduces the logical subject, and the words following it should be translated as the subject of est. Page 12. — I. tous les huit jours, every week, 2. je me suis senti une faim de chasseur, l felt as hungry as a hunter. p. 13-23] NOTES III 93 Pagre 13. — I. j^ague, a large city in the Austrian empire, capital of the kingdom of Bohemia. 2. on, see page i, note 2. 3. assez lourd de sa personne^ a raiher heavy and rough- looking man. Page 14. — I. de rire, laughed. Note the so-called historical infinitive. Page 15» — I. de ton chef, of your own accord, 2. Voilà, cf. English ^ Lo and behold." 3. à jour, rooJUss, 4. grand temps, high Hme. Page 16. -^ I. je ferai, Iwill imitate, 2. chose dite, chose faite, no sooner said than donc. 3. Cou-con, cou-cou, an onomatopœia imitating the cuckoo's cry. 4. à tour de bras, with ail his mighu j Page 17. — I. je prends pour ma part, / takefor myself, 2. on y Tiendra, we^ll take that nexU IV Page 18* — I. rien, merely. 2. les voilà grandes, they are now grown up, 3. qui fait exprès d'embellir, who grows beautiful on purpose* \ Page 19. — I. Bon Dieu, gracions! 2. je te bats comme plâtre, Iwill beatyou mercilessly 3. la faim la prit, she became hungry. Page 21. — I. cherchant de tous ses yeux, looking around anxiously for. Page 22. — i. du sang répandu, lit., " blood that had been shed," trans., the ground was covered with blood, 2. la battraient jusqu'à la faire mourir, would beat her to death; comp. with page 19, note 2. Page 23. — i. pour toutes, hère as; or the only. 2. à nous, ours; note use of personal pronoun. 94 NOTES tP- 2*-» Page 24. — i. noircit, here^^x ont 2. 86 sera oubliée après, must hâve forgotUn the Urne while lookingfor; note elliptic form of sentence, also.use of future. Page 26. ~ i. Bagdad, a city of Asiatic Turkey. 2. de la vieille roche, of the old school, 3. la tfecqiie, Mecca^, the ''Holy Ci^y" o£ Mohammedaos, is situated in Arabia. 4. Arabie, ArMa^ a peninsula of Southern Asia. 5. Smyme, Smyma^ a sea-port in the Turkish province of Na- tolia in Asia Minor. Page 28* — i. à cet endroit, in that respecL 2. nn jour d'impôt, on a tax4evying day. 3. on montra le poing à Constantinople, they threatened lUrkey; lit., " they (showed) shook their fist to Constantinople." 4. il, see page 5, note i. Pag^ 29* — I. Syrie, SyHuy a province of Asiatic Turkey. 2. sans compter, without stopping to count it; readily» 3. Damas, Damascus^ a city of Syria. 4. tendre la main, i.e. to beg. Page 80* — I. en 7 portant les deux mains; the others bal- anced their burdens on their heads, touching it, if at ail, with but one handk 2, avec ta peau, withyour suffering; lit., ''with your skin." Page dl« ■— I. ce que j'ai fait souffrir, what I mode others suffer» 2. j'en suis pour mes coups de bâtons, / hâve nothing but my beating; '. abandon, £or- sake, give up. abattre, to knoolç down* dis* hearten. abattre (aO» to conte down, fali. abattu -e, dejected. abbé, m,f abbot, priest. abdication,/., abdication, abime, m., abyss. ablation^/., ablution; faire ses — s, to perf orm one^s ablutions, aboiement, m., barking. abominable, abominable, abord (d')* at fiist; aboyer, to bark. abréger, to shorten* abridge» abricot, m,, apricot. absence,/., absence, absorbé -e, absorbed. académie,/., academy. accablant -e, oppressive^ accabler, to overwbelm. accepter, to accepta accident, m., accident, mishap. accompli -e, perfect, accom^ plished. accorder, to grant accourir, to rush forth, hasteti. accueillir, to welcome, receive. accuser, to accuse. achat, m,, purchase. acheter, to buy. acheteu-r -a», buyer. achever, to finish, complète, achieve» achever (a^), to be finished, corne to an end, acquisition,/., acquisition, acte, m,, act, deed. action,/., action, deed. adieu, farewell, adieu, administrateur, manager, ad- ministrator. administTjpr, to manage, ad- minister. admirable, admirable, admirer, to admire. adorer, to adoxe. adoucir, to soften. adresse^ /., skilfulness, cleveiw ness, address. adresser (s'), to address. adroit -e^ skilful. affaire,/., a£Eair, business; — s, business, affaisser (s'), to sink. affamé -e, famished, hungry. affecté -e, afEected. affecter, to affect. 103 I04 YOCABULARY affection,/., affection. afficher, to post up. afBbrmer, to affinn. affliger (a% to grieve, mourn. aiireii-x -ae, awf uL afin, to, in order to, that, so that; — de, — qne, in order to, so that âge, m., âge. agile, quick, nimble, agile, agir, to act. agir (s'), to be question, agitation,/., agitation, émotion, agité -e, restless, agitated. agiter, to stir up, agitate, waive. agiter (s'), to be restless, be agitated. agneau, m., lamb. agréablement, agreeably. aie, s^â avoir. aïeul, m., grandfather, ancestor. aigre, shrill. aiguiser, to sharpen. aile,/., wing. ailleurs (d'), moreover, besides. aimable, amiable, aimer, to like, love; j'aime mieux, I would rather. aimer (s'), to love one another. aîné -e, eldest. ainsi, thus, so. air, m., air, appearance, look; avoir V — , to look like. aisé -e, easy. aisément, easily. ajouter, to add. albâtre, m,, alabaster. AïifProp, noun. Allah, M^ the Arabie name oi the Suprême Being; Allah. allée,/., walk (of parks). alléger, to alleviate, relieve. aller, to go; an pis — , at the worst. aller (s'en), to go away. allié -e, ally. allons, see aller; — ^ corne. alors, then. alourdir, to make heavy. alphabet, m., alphabet. Altesse, /., Highness. ambassade,/., embassy. ambitien-z -se, ambitious. ambition,/., ambition. âme,/., soûl, mind. amener, to bring. am-er -ère, bitter. amertume,/., bittemess. ami -e, f riend. amitié,/., friendship. • amour, m., love. amusant -e, amusing. amuser, to amuse. amuser (s'), to amuse oneself. an, m., year. ancêtres, m. plur,, ancestors. ancien -ne, former, old. âne, m.f ass, donkey. anéantir, to annihilate, destroy. anémie,/., anaemia. ange, m., angel; bon — , guard- ian angel. angélique, angelical. anglais -e, English. Angleterre,/., England. animal, m.; animal. VOCABULARY lOS animer, to animate. BSïnà\e&yf,plur,t aimais. année,/., year. annoncer, to announce. antiquité,/., antiquity. août, fn,f August. apaiser, to quiet, pacify. apercevoir, to perceive, see. apercevoir (s'), to notice, per- ceive. apparaître, to appear. apparence,/., appearance. appartement, m., apartments. appartenir, to belong. appeler, to call. appeler (s')» to be called. appentis, m., shed. appétit, m., appetite. applaudir, to applaud. appliquer, to apply. apporter, to bring. apprécier, to appreciate. apprendre, to leam, hear, teach, let know. après, af ter, af terwards. après-demain, the day after to- morrow. après-dinée,/., aftemoon. apprenti -e, apprentice. approche,/., coming. approcher, to approach, corne near, bring near, draw near. approcher (s'), to corne near, Arabie,/., Arabia. [approach. araignée,/., spider. arbre, m., tree. arc, m.f arch ; — de triomphe, triumphal arch. ardent -e, lively, ardent, pas- sionate. argent, m., money, silver. argumeiit, m., argument, arme,/., arm; faire des — s, to fence. armée,/., anny. armer, to cock, arm. armurier, m., gunsmith. arracher, to pull off, tear down. arracher (s')» to tear off. arrêter, to stop, arrest. arrêter (s'), to stop, put up. arrhes, /. //»r., eamest-money, eamest. arrière, back ; en — , backward. arrière-petite-nièce, /., great- grandniece. arriver, to arrive, happen, oc- cur, come to. arroser, to water. art, m.j art. assassin, m,, assassin; à V — I murder I assassiner, to assassinate. assembler, to convoke, assemble, asseoir (s')» to sit down. assez, enough, sufficiently, prêt- ty, rather. assis -e, seated. assistance, /., audience, by- standers. associé, m., partner, assurance,/., assurance, assurer, to assure, atonie,/., debility, attacher, to hitch,fasten, attach. attaquer, to attack. io6 VOCABULARY attardé -e, beUited^ late. atteindre, to reach. atteler, to hitch up. attendant (en)» while waiting, meanwhile. attendre, to wait, wait for, ex- pect. attention,/., att^ition; faiie — > to pay attention, attitude,/., attitude, position, attrait, m., attraction, attraper, to catch, attrister, to sadden. an, to the. anbe,/., dawn. anberge, /., inn. ancnn -e, any, (iviik ntg^ none, not any. an-deasouB, below. au-dessns, aboyé, au-devant, in front of. audience,/., audienca^ aujourd'hui, today« auprès, near. aurore,/., dawn. ausculter, to auscultate; aussi, also, so, therefore ;•—... que, as . . . as. aussitôt, at once, immediately. autant, as much, as many, so much, so many. automne, m., Autunm. autour, around. autre, other; l'un après V — , one after the other. autrefois, formerly; d' — , of former days. autrement, otherwise. autrui, m., othen^ other peopls; bien d'— , another's property* avance, /., advance^ par — , in advance; avancer, to advance, go on, move f orward, corne forth. avancer (s*), to advance, proceed, go forth. avant, before; en — , f orward. avec, with, according to. avenir, m., future, aventure,/., adventure; à V — , at random. aventurier, /«., adventurer. avertir, to wam, inform. aveugle, blind. aveugler, to blind. avis, f»., counsel, advice, opin* ion, waming, mind; être de 1' — de quelqu'un, to hâve the same opinion as some one, side with. avoir, m., property, possessions, avoir, to hâve, avouer, to own, acknowledge, avow, conf ess. ayant, see avoir. B bagage, iw ., baggage. Bagdad, m., Fagdad. bah 1 pooh, pshaw. bailler, to yawn. bailli, m., bailiff. • bain, m., bath ; au — , in bath« ing. baiser, to kiss. baisser, to corne down, lower. VOCABULARY 107 baisser (se)) to lean to, stoop. baly m,^ bail ; — masqué, masked bail, masquerade. balance,/., pair of scales. balayer, to sweep. balcon, m., balcony. banc, m,y bench. baptiser, to christen, baptize. barbe,/., beard. Barbe-Bleue,/, Ëlue-Beard. barbier, m., barber, barbu -e, bearded. bardeau, ««., shingle. barreau, m., iron-bar» bas, fw., bottom, foot. bas -se, low, down; en — , downwards; là~, over there. bataille,/., battle ; champ de*^, battlefîeld; se mettre en ^, to draw up in battle array. bataillon, m*^ battalion. bâton, m. y stick, staff. bâtonner, to bastinade, cane* battre, to beat, battre (se), to fight. battu -e, beaten. bayard -e, talkative. bayonnette,/., bayonet. beau, bel -le, beautiful, hand- some, fine. beaucoup, many, much. beauté, /., beauty. bec, m., beak. bêcher, to break the ground with a spade. Bédouin, m., Bédouin, an Arab of the désert. bêler, to bleat. belle-fille, /., step-daughter. bénir, to bless. bercer, to rock. berger, m., shepherd. bergère, /., shepherdess. besogne,/, work. besoin, m., need. bête, slUy, stupid% bête,/, beast, animal, fool. beurre, f»., butter. bien, w., property, good; — d'autrui, another*s property; — s, goods; homme de — , good man. bien, very, well, quite, many, indeed, much ; si — que, so well that ; si — , so much, so well. bien-aimé -e, beloved. bienfaiteur, m.» benefactor» bientôt, soon. bienveillance, /, favor» good- will, benevolence. billet, m., note, bise,/, north-wind. bizarre, odd, whimsical. blâmer, to blâme, blanc -he, white. blessé -e, wounded. blesser, to wound. blessure,/, wound. bleu -e, blue. bleuâtre, bluish. blond -e, fair, blonde, bocag-er -ère, of groves, rural, bœuf, m., ox. Bohême,/, Bohemia. bohémien -ne, Bohemian. io8 VOCABULARY boire, to drink ; — à petits coups, to sip. boiSy m,, wood. boiten-z -se, lame, bombé -e, arched, convez, prom- inent, bon -ne, good, kind ; à qnoi — , what îs the use of, what good is it. bond, m,, bound. bonheur, m., happiness, good luck; — sans mélange, un- alloyed happiness; par — , happily. bonhomie,/*., good nature, easy humor. bonhomme, m., good-natured man, fellow. bonsoir, good evening. bonté,/., kindness. bossn -e, hunchback. bouche,/., mouth. boucher, to stop up, flll. boucle,/., look (of hair), buckle, clasp. bouclé -e, curly. bouffon, m,f buffoon. bouger, to move, budge. bouillir, to boil. bouquet, m., bouquet, bourdonner, to buzz. bourgeois -e, person of the middle class, citizen, bourgeois -e, ordinary, common. bourgeon, m,, bud. bourse,/., purse, stock-exchange. bout, m,f end, tip, bit. boute-selle, m., signal to saddle; sonner le — , to sound the signal to saddle. boutique,/., shop. branche,/., branch. bras, fn.f arm. brave, good, kind, brave, braver, to defy, set at défiance, bravo, bravo, well done; les — s, applause. brebis,/., ewe. brevet, m., warrant bride,/., bridle. brider, to bridle; tout bridé, already bridled. brigand, m,, brigand, briller, to shine. brin, m., bit, sprig. briser, to break, brillant -e, brilliant. brodé -e, embroidered. broder, to embroider. brodeu-r -se, embroiderer. bronze, m., bronze, brouillard, m.^ fog. brouille,/., quarrelling. bruit, m., noise, ado, rumor. brûlant -e, hot, buming. brûler, to be impatient, bum. brun -e, brown, dark. brune, /., dusk ; à la — , in the twilight. brusquement, suddenly. brusquerie, /., abruptness. brut -e, brutish. brutal -e, rude. brutalité, /., roughness, brutal- ity. bruyant -e, noisy. VOCABULARY 109 ba, see boire, buffet, tn,^ sideboard. buisson, 01., bush. burnous, m. y Arabian cloak. butte, /., knoll, rising ground ; être en — , to be exposed. pà, now, that; or — , now, well now. cabaret, m,, drlnking-place, inn. cabinet, m.^ office, cabinet. cabrer (se), to rear; faire — un cheval, to make a horse rear. cabrioler, to caper. cacher, to hide, conceal. cacher (se), to hide oneself. cacheter, to seal. cachot, m., dungeon. cadavre, m,y corpse. cadet -te, younger. cadre, m., frame. café, m., cofïee. caisse,/., cash-box, treasury. calme, calm. calme, m., calmness, tranqull- lity. calomnier, to calumniate,slander. camp, m,y camp. campagne,/., country, fields. canne,/., cane, canon, m., cannon. capable, capable, capitale, /., capital, caprice, m., whim, caprice, capuchon, m., cowl. car, for, because. caravane,/., caravan. caresse,/., caress, embrace. caresser, to stroke, caress. carnaval, m,y camival. carotte,/., carrot. caroubier, m., carob-tree. carré, m., square. carrefour, m., cross-road. carte,/., playing-card, card. carthaginois -e, Carthaginian. cas, m., case. cause,/., cause, reason. causer, to talk, converse. cavalerie,/., cavalry. cavalier, rider. cave,/., cellar. ce, it. ce, cet, m., cette,/., that, this. ce qui, que, that, which, what. ceci, this. céder, to yield, give up. ceinture,/., belt. cela, that. célèbre, celebrated. célébrer, to celebrate. celle, the one, that, she; — -ci, this one; ^là, that one. celui, he, that, the one; — -ci, this one; — ^là, that one. Cendrillon,/, Cinderella. cent, hundred. [yet. cependant, however, meanwhile, cérémonie,/., ceremony. cerisier, m., cherry-tree. certain -e, certain, cervelle,/., brain. ces, thèse, those. cesse (sans), ceaselessly, without ceasing. IIO VOCABULARY cesser, to cease. ceux, thèse, those. chacun -e, eaçb one, every one. chagrin, m,j sorrow, grief, chaise,/., chair, chaleur,/., warmth, beat, chambre,/., room, cbamber. champ, ///., field ; — de bataille, batUefield. chance,/., chance, rislc. changer, to change, exchange, changer (se), to be changed. chanson,/., song. chant, fft.j singing. chanter, to crow, slng. chapeau, ///., bat. chaque, each, every. char, m.f wagon, cart. charge,/., load, charge; en — , as a load. chargement, f//., cargo, load. charger, to load, charge with, intrust with. charger (se), to take charge, chariot, m., wagon, chariot, charitable, charitable. charité, /., charity. charmant -e, charming. charme, »/., charm. charmer, to charm, delight. charmille, /., hedge of yoke- elm trees. charpente, /., timber-work, frame-work. charpentier, m,^ carpenter. charrue,/., plow. chasser, to hunt, chase, drive away. chasseur, m., hunter. chat, m.f cat. château, ^/., castle. châtiment, m.t chastisement chatouiller, to tickle, flatter. chauffer (se), to warm oneself. chaufournier, m., lime-burner. chef, m,, chief, head, master, leader. chef-4' œuvre, tn,, masterpiece. chemin, m,, way, road; yoleor de grand — , highwayman. cher, dearly, dear. ch-er -ère, dear. chercher, to seek, look for, search, to try ; aller — , to go for; to go and look for; en* voyer — , to send for» chéri -e, darling, beloyed. chérubin, m., cherub. cheval, //<., horse ; monter à — , to ride on horseback ; à — 1 to horse 1 chevaux, plur, of cheval, chevelure,/., hair. cheveu, m.^ hair. chèvre,/., female goat. chevreau, m., kid. chevrière,/., goat-herd. chez, at the house of, to, in. chien, m., dog. chinois -e, Chinese; à la — , after the Chinese fashion. choisir, to choose. choix, m,t choice. chose, /., thiixg; quelque — , something. chrétien -ne, Christian. VOCABULARY III chronique,/., chronicle, history. chute,/., downfall. cicatrice,/., scar. ciel, m., heaven, sky. cinq, five. cinquantaine,/., about fifty. cinquante, fifty. circonstance, /., circumstance, case, citron, m., lemon. citrouille,/., pumpkîn. civilisation,/., civllizatlon. clair -e, clear, limpid. clef, /., key. clémence,/., clecnency, mercy. clément -e, merciful, clément. clin, m., wink ; en un — d'œil, in the winking of an eye. cloche,/., bell. clou, m., nail. cochon, m., pig. cœur, m., heart, courage. coffre, m,, coffer. coiffure,/., hair-dress. coin, m,f corner. colère, passionate, choleric. colère, /., anger ; se mettre en —, to get angry. collègue, m.f coUeague. collet, m,, coat collar. colonel, m., colonel, colonne,/., colninn. combattant, m., iîghter, com- batant. combien, how much, how many. combinaison,/., combination. comédie,/., comedy. commandé -e, offlcered. commandement, m., command. commander, to command, order. oommandeur, m., commander. comme, as, like. commencer, to commence, begin. comment, how, what. commerce, m., trade, commerce. commis, m., clerk. commun -e, common, mutual. compagne, /., cotapanion, wife. compagnie,/., company; mar- cher de — , to go together. compagnon, m., companion. compère, m., companion, crony. compliment, m., compliment. comprendre, to underàtand. comprimé -e, suppressed, re- strained. compter, to reckon, count, count out. concierge, m., janitor. conclure, to conclude. conclusion,/., conclusion. concurrence,/., compétition. condition, /., condition. conduire, to drive, lead, conduct, take. conduite,/., conduct, behavior. confiance,/., /:onfidence, trust. confier, to intrust, confîde. confisquer, to confiscate. confiture,/., préserves. confondre, to confound, mix, mingle. • congé, m.f furlough, leave. connaître, to know. conquérir, to conquer. 112 VOCABULARY conseil, m., counsel, advice, coancil; — d'Stat, State Council. conseillera m,f adviser, counsel- lor. consentir, to consent, consenrateur, m., conservative. consistance, /., consistency, stability. consolation,/., consolation, consoler (se), to be consoled, con- sole oneself. consolider, to strengthen, consol- idate. Constantinople, m., Constanti- nople. constitutionnel -le, constitu- tional. construire, to build, construct. consul, m.f consul, consultation, /., consultation, conférence, consulter, to consult. conte, m,t taie, story. contempler, to behold, gaze on. contenance,/., countenance. contenir, to contain. content -e, satisfied, contented. contenter (se), to be satisfied with, content oneself with. conter, to tell, relate, continuer, to continue, go on. contrainte, /, restraint. contraire, m., opposite, contrary. contrarier, to bother^ oppose, contradict. contrat, m., contract, agreement. contre, against. contrit ~e, contrite, pénitent. convaincre, to convince. convenir, to suit, fit, become. convoitise,/., eager désire. coq, m.f cock, rooster. Coranda, m., prop, noun. corbeille,/., fiât, wide basket. corde,/., rope. corne,/., hom. corolle,/., corol. corps, m.f body. corridor, m., corridor, halL Costoro, prop. noun, costume, m., costume. côté, m,f side; du — , in the direction; d'un — , from one side. coteau, m., hill. cou, m. y neck. coucher, to lie down. coucher (se), to set, lie down, retire, go to bed. coucou, m.f cuckoo. coude, m,f bend, elbow. coudre, to sew. couleur,/., color. couleuvre,/., adder. coup, m., blow, stroke; donner des —s de tête, to butt ; tout à — , ail at once; boire à pe- tits — s, to sip; — de pied, kick ; — sur — , one af ter the other. coupable, guilty. couper, to eut, divide. cour,/., court-yard, court. courage, m., courage. couramment, fluently, readily. VOCABULARY 113 courir, to run ; faire — des bruits, to spread reports, couronne,/., crown. couronner, to crown. courroux, m., wrath. cours, m,j course, current. court -e, short, courtisan, m., courtier. cousait, see coudre, cousu -e, see coudre, couteau, m,^ knife. coûter, to cost. coutume,/., custom; que de — , than usual. couturière,/., dressmaker. couvert, see couvrir, couvrir, to cover. couvrir (se), to cover oneself. craignait^ see craindre, craindre, to fear. crampon, m.y cramp-hook, brace. crâne, m,, skuU. crapaud, m., toad. créature,/., créature. crever, to die (of animais). cri, m.t cry, exclamation. crier, to cry out, exclaim. crime, m.y crime. criminel -le, criminal. critique, /., criticism ; faire la — , to criticize. croc, m., tooth (of dogs). croire, to believe. croiser, to cross, croix,/., cross; fit le signe de la — , made a sign of the cross, crossed herself. croyant -e, believar. cruche,/., jug. cruel -le, cruel. crut, see croire, cueillir, to pick. cuisine,/., kitch en; faire la to cook. cuistre, m., pedantic fellow. cuivre, m., copper. curieu-x -se, curions, curiosité, /., curiosity. Damas, m.^ Damascus. dame,/., lady. damnation,/., damnation, danger, m.y danger, dans, in, within, during. danse,/., dancing, dance. danser, to dance. danseuse, /., dancing-girl, dancer. dauber, to drub, banter, jeer. davantage, more, de, of, to, from, off, with, by, in, over. débarrasser (se) de, to get rid of. débat, m.y debate, discussion, débattre (se), to struggle, strive. débris, m.y débris, remains, rub- bish. début, m.y beginning. décapiter, to behead. déchéance, /., fall, dethrone- ment. déchirant -^, heart-rending. déchirer, to tear. décidément, decidedly. décider, to décide. XI4 VOCABULARY décider (se), to make onei'a mind up, décide, décisi-f -ve, décisive, décision,/., décision^ déclarer, to déclare, décliner, to décline, décorer, to decorate. découvrir, to discovçr. décrasser, to brush up, clean. décret, m,y decree. décrocher, to imhoQk, take down. dédaigneu-z -se, disdainf ul. dédain, m., disdain. dédaigner, to disdain. dédale, m.^ labyrinth, maze. défendre, to défend. défendre (se), to défend oneself, fight. défense, /„ def ence ; sans — » defenceless. défier, to challenge, defy. défier (se), to distrust, suspect. défigurer, to disfigure. définition,/., définition, dégénérer, to degenerate^ dégouttant -e, dripping. déguisement, ///., dlsiguisement, disguise. déguiser^ to disguise, déjà, already. déjeuner, ///., breakfast délicat -e, délicate, délicatesse, /., refinement, delb cacy. • délire, m., frenzy. délivrer, to rid, free, demain, to-morrow. demander, to ask, beg. demander (se), to ask oneself, wonder. démarche, /., step, measure, proceeding. démasquer (se), to take off one's mask. démentir, to contradict. demeure, /., dwelling, houso, home, demi -e, half. demoiselle, young lady. démolir, to demoUsh, pull down. denier, m., money. dénoncer, to announce, de* nounce. dent,/., tooth. départ, m„ departur^H dépêcher (se), to hurry. dépens, m, plur.j expense, cost ; aux — , at the expense. dépenser, to spend, use up. dépérir, to décline, waste away. dépit, m. y spite, vexation. déplaire, to displease. déplaisir, m., displeasure, anger. dépôt, m., deposit; en — , as a deposit in trust. dépouille,/., remains, spoil. dépouiller, to skin, despoil, pilfer. depuis, since, for. députation,/, deputation. déraisonnable, unreasonable. déranger, to dérange, displace, demi-er -ère, last, latter. dérober, to steal. [behind. derrière, behind; par — , from VOCABULARY 115 deSy some, of the, from the, by the. dès, as soon as, from, since. désagrément, m,, unpleasant- ness. désarmer, to disarm. * descendre, to put up, go down, descend, foUow down. désert, m,f désert. désert -e, deserted. désespéré -«, despaired of, des- perate. désespérer, to drive to despair. déshabiller, to undress. déshonorer (se), to disgrâce oneself. désintéressement, m„ disinter- estednçss. désir, m,f désire. désirer^ to désire. déscenvré -e, idle person. désoler (se), to grieve, be dis- consolate. désormais, henceforth. dessécher, to dry up. dessin, m., pattern, drawing. dessons, m., lower part; au — , beneath, under. destin, m., destiny, fate. destiner, to intend, destine, détour, m,, by-way, circuitous road, winding, tuming; au — de, on turning around. détrôner, to dethrone. dette,/., debt. deuil, m.f mouming; grand (petit) — , deep (light) mourn- ing. deux, two ; les — , both ; — à — , two by two. devant, before, in front of. devenir, to become. devenu, see devenir, deviner, to guess, divine, devise,/., motto. devoir, m., duty. devoir, to owe, ought, must, be to, hâve to. dévotion,/., dévotion. dévoué -e, devoted. dévouement, m., dévotion, self- sacrifice. Dewitz, prop, noun. diable, m., devil, fellow; diable 1 the deucel diagnostic, m., diagnostic, diamant, m.y diamond. dicter, to prompt, dictate. Dieu, /ff ., God ; — merci, Thank Godl différence,/., différence, différent -e, différent, difficile, difiicult, hard. digne, worthy; peu — , un- worthy. dimanche, m., Sanday. dîme,/., tithe. diminuer, to reduce, lessen. dindon, m.y turkey. dîner, m.y dinner. dîner, to dine. dire, to say, tell; c'est- — , that is to say; vouloir — , to mean. dire (se), to say to oneself, to tell one another. ii6 VOCABULARY diriger, to direct, lead. discours, m., discourse, oration, speech, discr-et -ète, discreet. discrétion, /., discrétion ; à — , ati libitum. disparaître, to disappear. disperser, to scatter. dispos, active, nimble, cheer- f ul, well. disposer, to dispose, disputer, to contend for. disputer (se), to contend for. dissiper, to squander, scatter. dissiper (se), to vanish. distinguer, to distinguish. distraction, /., absent-minded- ness. distraire (se), to amuse oneself. diyan, m., divan. diversion,/., diversion. dix, ten. dix-septième, seventeenth. Dobrunka,/.,/rf?/. noun, docteur, m., doctor. dogue, m.f dog, bulldog, mastiff. doigt, m,y fînger; montrer au — , to point out with the fînger. doit, see devoir, domino, m., domino, don, ;//., gift. donc, then, therefore. donner, to give. dont, whose, of which, from which. doré -e, golden, dormir, to sleep. dos, m.t back. double, double, doubler, to double, doucement, gently, sweetly, slowly. douceur, /., gentleness, meek- ness, sweetness. douleur,/., sorrow, grief, douloureu-z -se, sorrowf ul. doute, m.y doubt; sans — , witb- out doubt. douter, to doubt. douteu^z -se, doubtf ul, untrust- worthy. dou-z -ce, sweet, gentle, soft, douze, twelve. drapeau, m., flag. dresser, to raise. dresser (se), to arise. droit, m,, right ; de — , by right. droit -e, right, straight; tout — , straight ahead. drôle, m., rascal. [some. du, of the, from the, to the, duchesse,/, duchess. duper, to deceive, gull. dur -e, coarse, hard. durant, during, for. duvet, vi.^ down. dynastie,/., dynasty. £ eau,/., water. ébahi -e, amazed, aghast. éblouir, to dazzle. ébouriffé -e, dishevelled, in dis- ordei. ébranler, to shake. VOCABULARY 117 écarlate,/., scarlet. écarter, to put aside, discard, set aside. échanger, to exchange, swop. échapper, to escape. écharpe, /., sling; en — , in a sling. échec, m,y check, failure. échelle,/., ladder. échevelé -e, dishevelled. échoué ~e, stranded. éclaircir, to clear up. éclairer, to light, illuminate, light up. éclat, m,f splinter, brightness, glitter, brilliancy. éclatant --e, brilliant, striking. éclater, to split , burst ; — de rire, to burst out laughing. école,/., school. écorcher, to flay, skin. écouler, to elapse, pass. écouter, to listen. écrier (s'), to exclaim, cry out. écrire, to write. écu, m.j an old silver coin worth about sixty cents, écume,/., foam. écumer, to foam. écurie,/, stable, édilité,/, city council. édredon, m., eider-down cover. éducation, /, éducation. effacer, to éclipse, throw in the shade. effaré -e, wild. effort, ;//., effort, effrayer, to frighten. effrayer (s'), to be frightened. effroyable, frightful. égaré -e, strayed, lost. égarer, to mislead, lead astray. égarer (s'), to lose one*s way. église,/., church. ehl ahl welll — bienl welll élancer (s'), to rush. électriser, to electrify. élégant -e, élégant. élève, w./, pupil. élever, to raise, bring up, lift up, erect. élever (s'), to arise. elle -s, she, her, it, they, them. éloge, m.j praise, commendation. éloigné -e, distant, éloigner, to drive away. éloigner (s'), to go away. éloquence,/, éloquence, émailler, to enamel, stud. embarrasser (s'), to trouble one- self, be solicitous about. embaumer, toperfume. embellir, to grow beautiful. embrasser, to embrace, kiss. embûche,/, snare, ambush. émeraude,/, emerald. émerveiller, to astonish, amaze. émeut, see émouvoir, emmener, to take away, carry away. émotion,/, émotion, émouvoir, to move, stir up, affect. emparer (s'), to take hold. empêcher, to prevent. [help. empêcher (s'), to refrain from. II s VOCABULARY empereur, m., emperor. empire, m,, empire. emplir, to fîU. emploi, m,y employment. employer, to use, employ. emporter, to carry away, take away. ému -e, moved, affected. en, on, in, into, by, with, as, while. en, of them, of hîm, of her, of it. enclume, /, anvil. [of a horse. encolure, f,y neck and shoulders encore, yet, again, still, more, encre, yi, ink. endommager, to damage, endormi -e, asleep. endormir (s'), to go to sleep. endroit, m., place, énergique, energetic. enfance,/., childhood, youth. enfant, m.^ child. enfermer, to shut up, enclose, conceal. enfin, at last, iînally, in short. enfoncer, to drive in. enfoncer (s'), to bury oneself; — dans un bois, to drive into a wood. enfuir (s'), to run away, flee. engager, to engage, enjoignait, see enjoindre, enjoindre, to command. ennemi -e, ennemy. ennui, ;;;., trouble, annoyance, weariness, ennui, ennuyer, to bother, annoy, tire, weary. ennuyer (s'), to Ibe wearîed, hâve a tedious time of it. ennuyeu-x -se, wearisome. énorme, enormous. enrager, to be mad ; faire — , to madden. enroué -e, hoarse. enseigner, to teach. ensemble, together. ensevelir, to bury, ensorceler, to bewitch. ensuite, then, after, afterwards. entaille,/., gash, eut. entendre, to hear, understand» mean. entendu -e, knowing, intelligent. entêté -e, stubbom, obstinate. enthousiasme, enthusiasm. enthousiasmer, to make enthusi- astic. enti-er -ère, entire, whole. * entièrement, entirely. entourer, to surround, entraîner, to carry away, draw away, hurry away. entre, between, in. entrée,/., entrance. entrer, to enter. entr'ouvert -e, half-open, partly open. envelopper, to wrap. envelopper (s'), to wrap oneseK up, wrap. envie,/., wish, désire, envy. environs, m, //., vicinity, en* virons, envoler (s'), to fly away. envoyé, m., messenger. VOCABULARY 119 envoyer, to send; — cherclier, to send for. épargner, to spare. épargner (a')> to spare oneself. épaule,/., shoulder; hau98erle8 — 8| to shrug one's shoulders. épée, /., sword. épeler, to spell. éperon, m., spur. épidémie,/., épidémie. épiderme, m., epidermis. épier, to watch, spy. épouser, to marry. époux, m.f husband. époux, m. //., married people, couple. éprouver, to f eel. épuisement, m., exhaustion. épuiser, to exhaust. équilibre, m., equUibrium, bal- ance. escadron, m., squadron. escalier, m., stairway. esclave, nt., slave. espagnol -e, Spanish. espèce,/., kind, species. espérance,/., hope. espérer, to hope. espiègle, frolicsome. espoir, m., hope. esprit, m.f intelligence, mind, clevemess, wit. essayer, to try. essuyer, to wipe. estime,/., esteem, regard. estimer, to value, prize. estimer (a*), to value oneself. et. and. étable,/., stable. état, m,, profession, trade, state, commonwealth ; homme d' — , statesman ; mes — s, my king- dom. étape,/., halting-place. été, m,, Summer. étendre, to stretch, lay. étemel -le, etemal. étiquette, /., étiquette. étoile,/., star. étonner, to astonish. étonner (s'), to be astonished. étrange, strange. étrang-er -ère, stranger, for- eigner. étrangler, to strangle. être, to be. étroit -e, narrow. étude,/., study. étudiant, student. étudier, to study. eut, see avoir. eux, they, them{ ^mémM, themselves. éveillé -e, awake, caref ul. éveiller, to awake. éveiller (s'), to wake up. événement, m., event. éventail, m,, fan. exactement, exactly. examiner, to examine. Excellence,/., Excellence. excellent -e, excellent. excécution,/., exécution. exemple, m., example. exercer, to practise, perform. excessi-f -ve, excessive. I20 VOCABULARY exiger, to exact, require. exily m,, exile. exister, to exist. expérience, /., expérimenta ex- périence; faire V — , to ex- périence. expier, to expiate. explication,/., explanation. expliquer (s'), to explain to one- self, understand. exposé, m.y statement. exposer (s')» to expose oneself, be liable. exprès, purposely; faire — , to do something purposely. exprimer, to express. extrême, m. y extrême. extrémité,/., extremity. F face,/., front, fore-part, face ; en — de, opposite; en — , in my face, fâché -d, sorry ; n'était pas — , was pleased. fâcheu-x -se, unpleasant, vexa- tious. facile, easy, comfortable. facilement, easily. façon,/., way, manner. faculté,/., faculty. faible, weak, feeble. faiblesse,/., weakness. faiblir, to weaken, become weak. faim,/., hunger; mourir de — , to starve to death; avoir — , to be hungry. i fainéant -e, lazy. fainéantise,/., laziness. faire, to make, do. faire (se), to get used, become. fait, m.y fact. falloir, to be necessary, must, take. famille,/., family. famine,/., famine, hunger. fantaisie,/., fancy, désire, fantôme, m., phantom, ghost. farce,/., farce, fardeau, m., burden, load. farine,/., flour. fatal -e, fatal, fatalité,/, fatality. fatigue,/, fatigue, weariness. fatigué -e, tired. fatiguer, to fatigue, tire, weary. fatiguer (se), to tire oneself, fatigue oneself. faute,/, fault, mistake. fau-x -sse, false. faveur, /., favor. favorable, favorable, propitious. favori -te, pet. féliciter, to congratulate. femme,/., wife, woman. fenêtre,/, window. fente,/., crack. fer, fn.f iron, blade. ferais, see faire, ferme, /, f arm-house. ferme, firm, steady ; tenir — , to hold fast. fermer, to close. fermeté,/., firmness. fermier, m., farmer. 'i H VOCABULARY 121 fermière,/., farmer*s wife. féroce, ferocious. fête,/., festival, fête. feu, m,y fîre. feuillage, m., foliage. feuille,/, leaf. fiançailles,/ //Mr., betrothing. fiancée,/., fiancée, bride, ficeler, to bind, tie. fidèle, faithful, trusty. fi-er -ère, proud. fièvre,/, fever; avec l'inquié- tude de la — , with a f everish anzîety. figue,/, fig. figure,/, figure, face, figurer, to represent, imperson- ate. fil, m.f thread. file,/. Une; à la — , in line. filer, to spin. fille,/, daughter, girl. filleule,/, goddaughter. fils, m., son. fin, /., end; mener à bonne —, to bring to a successf ul termi- nation. fin -e, sly, cunning. finances,///., finances. finesse, /., finesse, delicacy, shrewdness. finir, to finish, end; en — avec, to put an end to. fit, see faire, flamme,/, flame. flatter, to flatter, flatterie,/, flattery. flatteu-r -se, fiatterer. fléchir, to bend, bow. fleur,/, flower. flot, m,f wave. foin, tn,f hay. fois, /., time; une — , once; deux — , twice. folie, /, folly, madness, blunder, foolishness, nonsense. fonction,/, function, work. fond, m.j bottom, foundation, main point, fondre, to melt. force,/, strength, force ; à — de, by dint of. forcé -e, f orced. forcer, to compel, force, oblige, forgeron, m., blacksmith. fort, hard, very, very much, loudly. fort -e, strong, stout, large, forteresse,/, fortress. fortune,/, fortune, wealth. fou, fol -le, fool, crazy, mad, madman. foudre, /, lightning, thunder- bolt. foule,/, crowd. fouler, to trample; — aux pieds, to trample under foot. fraîcheur,/, coolness. fra-is -iche, fresh. fraise,/, strawberry. franc, m., franc, about 20 cents, franchise,/, frankness. Franconi, m,y prop, noun. frapper, to knock, rap, hit, strike. [oneself. frapper (se), to strike, strike 122 VOCABULARY frère, m,, brother. friand -e, epicure, gourmand. froid, m.f cold. froid -e, cold. froidement, coldly. froideur,/., coldness. fromage, m,, cheese. froncer, to contract, knit; — les sourcils, to f rown. front, m.f forehead. fruit, m.f fruit, f ugiti-f -ve, fugitive, fuir, to flee, escape. fumée,/., smoke. fumer, to smoke. funérailles,///., funeral. fureur,/., fury, rage; entrer en — , to get into a fury. furieu-z -se, furious. fuseau, m., spindle. fusil, m., shot-gun, rifle, fût, seg être. futile, trivial, unimportant. futur -e, future. gagner, to eam, gain, win, pro- ceed, go, reach, seize, over- take. gai -e, cheerful, merry, gay* gaiement, gayly. galant -e, gallant, élégant. garçon, m., boy. garde, m., guard. garde,/, hilt, guard, keeping. garder, to keep, guard. garder (se) de, to be careful not to. garnir, to adom. gâté -e, spoiled. Gâtechair, prop, noun, gazette,/, gazette. gazon, m., grass. gémir, to whine, moan. gendre, m.t son-in-law. gêné -e, embarrassed. gêner, to hinder, impede, incon- venience. général, m,, gênerai, général -e, gênerai ; en — , gen- erally. génération,/, génération, généraux, plur, of général, généreu-z -se, generous. génie, m.y genius. genou, m., knee; se mettre à — ^z, to kneel down. gens, m.f,pLy people. gentillesse,/, gracef ulness, prêt- tiness. geôlier, m., jailer. gerbe,/, sheaf. geste, m., gesture. glace,/, ice. glacé -e, cold, f rozen. glacer, to f reeze. glapissant -e, shrill. glisser, to slip. gloire,/, glory. glorieu-z -se, glorious. gobelet, m., mug. gonfler, to swell. gorge,/, throat. goût, m., taste; avoir du — pour, to hâve a likingfor. goûter, to taste, enjoy. VOCABULARY 123 gouyeraementi m,, goverament. gouverner, to govern, rule. gouyemeur, m., govemor. grabat, m,, pallet. grâce, /., grâce, gracefulness, mercy; — à, thanks to. grain, m., grain, grammaire,/.» grammar. grand, m., grandee, nobleman. grand -e, large, great, tall. grandeur,/., greatness. grappe, /., bunch. gras -se, fat. grave, grave, serious. gravement, gravely. gré, m,, wish, will; savoir — , to be pleased, be thankf ul. grec -que, Greek, Grecian. greffer, to graft. grenade,/., pomegranate. grille,/., grating. grillé -e, grated. grimace, /., grimace, wry face, grimper, to climb. gri» -e, gray. grogner, to growl. gros -se, big, large, fat. grossi-er -ère, coarse, com> mon. guère, hardly, scarcely; ne . . . guère, hardly, not at ail. guérir, to cure, recover, get cured. gnérison,/., recovery. guerre,/., war. gueux, m,f beggar, poor fellow. Guilleret, m,yprop, noun. ' dénotes aspirate h, habile, skilf ul, able, clever. habileté,/., ability, clevemess. habit, m,^ dothing, coat, gar- ment habitant -e, inhabitant. habitude, /., habit, custom. habitué -•, accusComed, used, customer. 'hagard, m., haggard, wild. * haillon, m., rag. 'haine,/., hatred. 'haletant -e, out of breath, panting. 'hallebarde,/., halberd. 'harangue,/., speech. ' hardi -e, bold. 'hardiesse,/., boldness. * haricot, m., bean. 'hasard, m»^ chance, hazard; par — , by chance, acciden- tally ; au — , at random. 'hâte,/., haste; avoir — , to be in haste, hasten. 'hausser, to raise. 'haut -e, high, great, lofty; lâ- — , up there; à — e voiz, aloud. * hautement, aloud, resolutely. 'Hautesse,/., Highness. hélas 1 alas! Hélène,/., Helen. herbe,/., grass. * hérissé -e, bristling up, shaggy. héritage, m,y inheritance, heir- dom. hériti-er -ère, heir. 124 VOCABULARY héroïque, heroical. héroïsme, m., heroism. hésiter, to hesitate, waver. heure,/., hour ; sur 1' — , at once ; avant 1* — , before the usual time; de bonne — , early; tout à 1' — , a while ago. heureusement, happily. heureu-z -se, happy, lucky, for- tunate, good. ' hideu-z -se, hideous. histoire,/., story, history. *holàI there! stopl hommage, m.^ homage. homme, m.^ man; — de bien, good man. honnête, honest, good, polite. honnêtement, honestly, prop- erly. honneur, m.f honor. honorable, honorable, honorer, to honor. 'honte,/, shame. * honteu-z -se, ashamed. horloge,/, clock. horreur,/, horror. horrible, horrible, 'hors, out. hospitalité,/, hospitality. hôte, m., host, inn-keeper, guest. hôtelier, m., inn-keeper. hôtellerie,/, inn, hostelry. 'houlette,/, sheep-crook. 'huche,/, kneading-trough. huile,/, oil. ' huit, eight. humain -e, human. humble, humble. humeur,/., humor. ' hurler, to howl, yell. ici, hère; d' — là, from now to that time; ^bas, hère below. idée,/, idea. ignoble, vile, ignoble. ignorance,/, ignorance. ignorant -e, ignorant person, ignoramus. ignorer, to be ignorant of, not to know. il -s, he, it, they. image,/, picture, image. imaginer, to imagine, fancy. imaginer (s'), to imagine, fancy» think. imbécile, m., idiot, fool. immense, immense. immobile, motionless, immov- able. immortelle,/, immortelle. immuable, unchangeable, im- mutable. impatiemment, impatiently. impérial -e, impérial. impérieu-z -se, haughty, im- perious. implorer, to implore. importer, to matter; que t'im- porte ? what does it matter tG« you? qu'importe? what does it matter? n' — , just the same, no matter. imposer, to impose. impossible, impossible. impôt, m., tax. VOCABULARY "S imprévu ~e, unforeseen, unex- pected. imprudent -e, imprudent, impunément, with impunity. inaperçu -e, unnoticed. incarné -e, incarnate, incliner (s'), to bow, bow down. incognito, m. y incognito. incomparable, incomparable, inconnu -e, unknown. incorruptible, incorruptible. incroyable, incredible. indifférence,/., indifférence. indigne, unworthy. indiscr-et -ète, indiscreet. indocile, indocile, unmanage- able. indolence,/., indolence, idleness. industrie,/., industry. inépuisable, inexhaustible. inexorable, inflexible, inexo- rable. infâme, infamous. ingénieu-z -se, ingénions, ingrat -e, ungratef ul. injure,/., insuit, abuse, innocemment, artlessly, inno- cently. innocent -e, innocent, inonder, to inundate, flood. inqui-et -ète, anxious, unquiet, restless. inquiéter (s'), to care about, bother, mind. inquiétude, /., anxiety; avec V — de la fièvre, with a fever- ish anxiety. inscription,/., inscription. inscrire, to inscribe, insolent -e, insolent, installer, to install. installer (s'), to install oneself, place oneself. instant, m., instant, moment; à V — même, on this very moment, instruire, to instruct, teach. insulte,/., insuit, insulter, to insuit, intelligence, /., intelligence, cleverness. intelligent -e, intelligent, clever. interdit -e, abashed, conftised. intérêt, m., interest. interminable, interminable, interroger, to question. interrompre, to interrupt. intimider, to intimidate. intrigue,/., intrigue, intrigué -e, puzzled. intriguer, to intrigue, introduire, to introduce, show in. inutile, useless. inventer, to invent, invisible, invisible, invitation,/, invitation, irais, see aller, irrésistible, irrésistible, isolé -e, isolated, lonely. ivre, intoxicated. ivresse,/, joy, intoxication. jadis, of old, formerly. jaillir, to gush ont. jalousie,/, jealousy. 120 VOGABULARY jaloa-z -se^ jeialous. jamais, ever; ne . . • — , nevef. jambe,/., leg. jambon, m.^ ham. janvier, w., January. jardin, w., garden. jardinage, m., gardening. jarre,/., jar. jaune, yellow. jauni -e, yellow. je, I. jeter, to throw, cast; se — , to rush. [table. jeu, m., game ; table de — , card- jeun (à), fasting, without having eaten anything. jeune, young. jeûne, /»., fasting, fast. jeunesse, /., youth, young people. Jocondus, w., prop. noun, - joie,/., joy. joindre, to add. Joli -e, pretty. joliment, pleasingly, nicely. jonc, m.j willow, rush. joue,/., cheek. jouer, to play, act» joueu-r -se, player, gambler. jouir, to enjoy. jour, w., day, daylight ; tous les — s, every day; à la tombée du —, at the end of the day ; tout le long du — , ail the day long; au point dû — > at daybreak; petit —, morning twilight; granâ — , broad day- light. journal, m,, newspapen journaux, plur, of journal. journée,/., day. joyeu-z -se, joyful, cheerful. juge, «., judge. juger, to judge. juin, /«., June. jurer, to swear. jusque, until, to; — ^ dans, evcn in. juste, just, correct, exact, justement, justly. justice,/., justice, police. la, the, her, it. là, there; ^bas, over there; ^haut, up there. . labourer, to plow. labyrinthe, w., labyrînth. lâche, cowardly, coward. lâcher, to let go; — prise, to let go one's hold. laid -e, ugly, homely. laideur,/., ugliness, homeliness. laine,/., wool. laisser, to leave, let, allow. lait, m., milk. lampe, /., lamp. lancer, to throw. lancer (se), to rush, langage, m.^ language. langue, /., tongue ; tirer la — , to put out one's tongue. langueur,/., debility, languor. languir, to flag, languish. languissant -e, languid. lard, «., bacon, pig*s fat. VOCABULARY 127 Uigummitf iargely, generoudy, fuUy. larme,/., tear. larroii, m,, thief; petit—, petty thief. las -se, tired. lasser (se), to grow tired latin, m., Latin. latte,/., lath. laver, to wash. le, the, him, it. leçon,/., lesson. légalement, legally. lég-er -ère, light, nimble, active. légèrement, slightly. légèreté, /., lightness, nimble- ness. lendemain, m,f next day. lentement, slowiy. lequel, lesquels, laquelle, les- quelles, which, whom. les, the, them. lèse-majesté, /., lese-maj esty . lettre,/., letter. leur, their. leur, to them, for them, of them. lever, to raise, lift, levy. lever (se), to rise. libéral -e, libéral. liberté,/., liberty. licencier, to muster out, ' dis- band. lien, m,, tie, bound. lien, m., place; au — de, instead of. ligne,/., Une. limpide, clear, limpid. lire, to read. lisière,/., edge, outsktrts. lit, m,, bed; — de repos, couch. litière,/., litter. livre, m.f book. logis, m.y house, lodging, home; au — , at home, loi,/., iaw, rule; projet de — , bill. loin, far; au — , in the distance, out, far away. lointain -e, remote ; dans le — , in the distance, loisir, m.f leisure. long -ue, long; le — - de, along. longtemps, a long time. lors, then ; depuis -^, f rom that time. lorsque, wlien. loucher, to squint. louer, to praise. loup, m., wolf. lourd -e, heavy. lourdement, heavily. lueur,/., light, glimmer. Lugenmaulberg, m., prop. noun, lui, he, him, it, on him, to him, to her, on her ; chez — , in, to, at his house. lui-même, himself, itself. lumière,/., light. lumineu-z -se, luminous, bright lune,/., moon. lutter, to struggie, fight. ma, my. maçon, m., brick-layer, mason. madame,/., madam, lady. 128 VOCABULARY mademoiselle,/., Miss, magasin, m., store, magistrat, ^//., magistrate. magnifique, magnificent. magnifiquement, magniôcently. maigre, thin, lean. main, /., hand; à pleines — s, plentifuUy. maintenant, now. mais, but. maison,/., house, home, maître, m., master, owner, pro- prietor, teacher. maîtresse, /., lady, mistress, teacher. majesté, /., majesty. majestueu-z -se, majestic. mal, m., harm, evil ; aux grands maux les grands remèdes, a desperate disease needs a desperate cure, mal, badly ; plus — , worse. malade, sick, ill, patient, maladie,/., sickness, disease. maladresse, /., awkwardness, blunder. maladroit -e, awkward person. malappris -e, ill-bred person. malgré, in spite of, notwith- standing. malheur, m., misfortune. malheureusement, unhappily. malheureu-z -se, uniucky, un- fortunate. mali-n -gne, sly, shrewd. malveillant, m., evil-minded person. manger, to eat manquer, to be wanting, lack, be missing. manteau, m., cloak. maquignon, m., horsedealer. marais, m., marsh, swamp. marâtre,/., step-mother. marbre, m., marble. marchand, m., merchant. marchandise, /., merchandise, goods. marche,/., step. marché, m., market, bargain, contract ; à bon — , cheap, marcher, to walk, move, go; — de compagnie, to go to- gether. marguerite^., daisy. mari, m,, husband. mariage, m., marrîage, wedding; prendre en — , take for a wife. marier, to marry; à — , mar- riageable. marmite,/., pot. marquise,/., marchioness. Mars, m.f March. marteau, m.t hammer. masque, m., mask, masquerader. masqué -e, masked; bal — , masquerade bail, mat -e, dull. matin, m., moming; de grand — , very early in the moming; tous les — s, every moming; au — , in the moming. matinée,/, moming. maudire, to curse. mauvais -e, bad. VOCABULARY 129 mei me, to me. méchant -e, bad, wicked. mécontent -e, dissatisfied, dis- contented. Mecque (la), Mecca. médecin, m,, physician. médical -e, médical. médiocrement, middlingly, toler- ably. médisance,/., slander. méfier (se), to distrust. mégarde, /., inadvertence ; par — , inadvertently. meilleur -e, better, best. mélancolique, melancholy. mélange, m,, mixture; bonheur sans — , unalloyed happiness. mêler, to mix. mêler (se), to meddle, trouble oneself. membre, m., limb. même, same, very, himself, her- self, itself. même, even. mémoire,/., memory. mémorable, mémorable. menaçant -e, threatening. menace,/., threajt. menacer, to threaten, menace. ménage, m., household, couple, housekeeping, family ; en — , in married life. ménager, to spare, treat kindly. ménagère,/., housewife, wife. mener, to drive, lead, conduct. mentir, to lie. menton, m., chin. mentor, m., tutor, mentor. merci, thanks. mère,/., mother. mérite, m., merit. mériter, to deserve, meri^. merveille,/., marvel; à — , ad- mirably well. menreilleu-z -se, marvellous. mes, my. mésalliance,/., misallîance. mésaventure,/., misadventure. mesdames, ladies. messieurs, m. pi., gentlemen, métier, m,, loom, trade, profes- sion, business, mettre, to put, place, mettre (se), to begin, set about; — en route, to set out, start. meuble, m,, fumiture. meurtre, m., murder. midi, m.f noon, twelve o'clock. mien le, la -ne, les -s, les -nés, mine. mieux, better. mignon -ne, délicate, pretty, tiny. milieu, m., middle. militaire, military. mille, thousand. millier, m,, thousand. million, m., million, mine, /., look, aspect, appear- ance. ministre, m,, minister. minuit, m., midnight. minute,/., minute, miracle, m., miracle, wonder. miroir, m,, mirror, looking- glass. I30 VOCABULARY misérable, wretch, misérable wretch, misérable, misérablement, miserably. misère,/., misery. miséricorde,/., mercy, merciful- ness. modèle, m., modeL modeste, modest. modestie,/., modesty. moi, I, me, to me; — -même, myself. moindre, less, least moins, less; dn — , at least; au — , at least. mois, m,, month. moitié,/., half. moment, m., moment, mon, my. monarchie,/., monarcby. monde, /»., world; tout le — , everybody; venir au —, to come into the world. Monseigneur, m,j my Lord. Monsieur, m,, sir, gentleman. monstre, m.y monster. mont, ni.f mount, mountain. montagne,/., mountain. monter, to mount, ascend, go up, get up, rise ; — à cheval, to ride on horseback. montrer, to show, montrer (se), to show oneself. monture, /, steed, animal for riding. monument, m*, building, monu- ment. moquer (se), to laugh at, make fun of. morale,/., morals, morality. morceau, m.^ pièce. moribond -e, dying person, mori- bund. mort,/., death. mort -e, a dead person, dead. mot, m., Word. motif, m,, motive, mouche,/., fly. mouchoir, m.^ handkercfaief. mourir, to die; — de faim, to starve to death. mourir (se), to be dying. mousse,/., moss, lather. moustache, /., moustache. mouton, m.f sheep. mouvement, m,^ motion, move- ment. moyen, m,, means, way. mule, <., mule, mur, m., wall. mûr ^e, ripe, muraille,/, wall. murmurer, to murmur. museau, m., nose, muzzle. musicien -ne, musician. musique, /., music, band; faire de la — , to hâve music. musulman, /., Mussulman, Mo- hammedan. mutin -e, obstinate, unruly, fractions. mystère, m., mystery. mystérieu-z -se, mysterious. N naissance, /., extraction, des- cente birth. VOCABULARY Ï3I naître, to be born. oargoilé, ;»., narghileh, Turkish pipe, natal -e, native, natal, nation,/., nation, natte,/., matting. nature,/., nature. naturel -le, natural. navire, tn,^ ship, vessel. ne . . . pas, not, no ; ne . . . que, only. néanmoins, nevertheless, how- ever. né -e, see naître, neige,/., snow. neu-f -ve, new; tout — , brand new. neveu, m,, nephew. névrose, /., nervous disorder, lieurose. nez, xn., nose; rire au — de quelqu'un, laugh in any one's face. ni, nor; ni • . . ni, neithei; . . . nor. nièce,/., nièce. noble, noble. noblement, nobly, like a noble, noce,/., wedding. nœud, m.t bow. m noir -e, black. noircir, to blacken, grow black. nom, m.f name, noun. nombren-z -se, numerous. nommer, to rAa.iiie, call, appoint. nommer (se), to be named, called. non, no, not. nonchalamment, indolently. nonchalant -e, indolent, care- nos, our. [less. notamment, especially. note,/., note, notre, our. nourrir, to feed, support, nous, we, us, to us, ourseives. nouveau, nouvel -le, new. nouvelle,/., news; point de — ^s, no news. noyer (se), to be drowned, drown oneself. nuance,/., hue, shade, tint, nuit, /., night; cette —, last night. nullité,/., nuUity. nymphe,/., nymph. Obéir, to obey. obéissance,/., obédience, obéissant -e, obedient. objection, /., objectiop. obliger, to oblige, compel. obscurcir (s')» to grow dark. obscurité, /., obscurity, dark- ness. obsèques, /. //., obsequies, f u- neral. observation,/., observation, obtenir, to obtain, get. occasion,/., occasion; en toute autre — , under any other circumstances. occuper, to occupy. occuper (s'), to occupy oneself, apply oneself. 132 VOCABULARY odew,/., odor. odorant -e, fragrant. œil, m., eye ; en on clin d' — , in the winking of an eye. œillet, m., pink. œuyre, /., work. offense,/., offence. offenser, to offend. offert, s⣠offrir. officiel -le, officiai. officier, m,, officer. offre,/., offer. offrir, to offer. offrir (s'), to qSer oneself. ohl O, hol oie,/., goose. oignon, m., onion. oiseau, m., bird. olivier, m,, olive-tree. ombrageu-z -se, shy. ombre,/., shade, shadow. on, one, people, they. opéra, m., opéra. opinion,/., opinion. opposer (s'), to be opposed. opposition,/., opposition party. or, but, now; — ça, now, well now. or, m,f gold. orange, /., orange. orchestre, m.^ orchestra. ordinaire, ordinary, usual. ordonnance, /., order, prescrip- tion. ordonner, to order, décide, com- mand. ordre, m., order. oreille,/., ear. orgueil, m., pride, conceit orgueilleu-z -se, haughty per- son, proud. oser, to dare. ôter, to remove, take off. oh, where, when; d' — , from where. OU, or; — ... — , either ... or. oubli, m,, forgetfulness. oublier, to forget.' oublier (s')> to forget oneself. oui, yes. outil, m.f tool. outrage, m,, outrage, insuit, outre, besides, in addition to, above. ouvert, seg ouvrir, ouvrier, m., workman. ouvrir, to open. ouvrir (s'), to open, be opened. pacha, m. y pasha. pachalick, m., pashalic ; the ter- ritory govemed by a pasha. page, m., page, paille,/., straw. pain, m.j loaf of bread. paisible, peaceful. paix,/., peace. palais, m,f palace, pâle, pale, pâleur,/., paleness. pâlir, to tum pale, wan, become pale. panier, f«., basket panique,/, panic. panser, to dress (a wound). VOCABULARY 133 papier, m., paper. par, by, through, on, in. para, m., the 40th of a piastre, i,â,, about the loth of a cent. paradis, m., paradise. paraître, to appear, look, seem. parce que, because. par-dessus, over, moré. pardon, m,, pardon, mercy. pardonner, to pardon, forgive. pareil -le, such, similar, alike; sans — , without equal. parent -e, relative, parents, m. pL, relatives. parfait -e, perfect. parier, to bet. parlement, m,, parliament. parler, to speak, talk. parmi, among. parole, /., word; tenir sa — , to keep one's word; prendre la — , to begin to speak. part, /., share, part; quelque — , anywhere, somewhere; de toutes — s, on ail sides. partager, to share, divide. parti, y//., décision, party. partie,/., part, partir, to leave, go, départ, partout, everywhere. parut, sâe paraître, pas, m., step; revenir sur ses — , to retrace one*s steps; — à — , step by step. passage, m., passing, passage. passé, m., past. passer, to pass, spend, be over. passion,/., passion. pAté, w., blot (of ink). pater, m., the Lord 's prayer, (^Paier, Latin for " Father "). patience,/., a game of cards. patient, m., patient. patient -e, patient. pâtre, m.f shepherd. patriarche, m., patriarch. patron, m., employer, master. patte,/., foot (of animais). pâturage, m., pasture-ground. pauvre, poor, misérable. payer, to pay. pays, m.f country. [man. paysan, m., peasant, country- paysanne,/., country woman. Pazza,/.,/r^/. noun. peau, /., skin. pêcheur, m., iîsherman. pécore,/., stupid créature, block- head. peine,/., trouble, difficulty; à grand' — , with great diffi- culty ; à — , hardly, scarcely. peintre, m,, painter. pelisse,/., cloak, pelisse pencher, to lean, incline. pencher (se), to lean. pendant, during. pendre, to hang. pensée,/, thought. penser, to think. perçant -e, keen, sharp. percer, to break through. perdre, to lose. perdre (se), to lose oneself, ruin oneself, lose one's way, dis- appear, be lost. 134 VOCABULARY père, m,, father; — b, ancestore, forefathers. perfide, perfidious person. péril, m.f péril, danger; à ses risques et — s, at one*s risk. périr, to perish, die. perle,/., pearl. permettre, to permit, allow. permettre (se), to take the liberty. perpétnel -le, perpétuai, endless. perroquet, m., parrot. perruque,/., wig. persil, m,, parsley. personnage, m., personage, per- son. personnel -le, personal, private. personne,/., person; wit neg, nobody, anybody. perte,/., loss, ruin. petit -e, small, little. peu, little, few; un — , a little; — à —, little by little. peuple, tn,^ people, nation, peur, /., fear, fright; avoir — , to be afraid; faire — , to frighten. ];>eut, see pouvoir, peut-être, perhaps. philosophe, m,^ philosopher, philosophie,/., philosophy. photographie,/., photography. phrase,/., sentence, physionomie, /., physiognomy. piastre,/., a Turkish coin worth about four and a half cents. pièce, /., pièce, coin, paper, document, play. pied, m., foot, à — , on foot; fouler aux — s, to trample under foot ; coup de — , kick. Pierre, m.. Peter. pierre,/., stone. pieusttnent, piously. piller, to plunder. pinacle, i»., pinnacle; mettre au — , to place as high as pos- sible. pincer, to pinch. pinson, m., finch; gai comme un — , as gay as a lark. pipe,/., pipe. piqué -e, Irritated, vexed. piquer, to prick, spur. pis, m., udder. pis, worse; an — aller, at the worst. pitié,/., pity. placarder, to post up. place,/., place; à votre — , in your place; {1 leur — , in their .place. placer, to place, situate. plage,/., shore, beach. plaindre, to pity. plaindre (se), to complain. plainti-f -ve, plaintive, dolef ul. plaire, to please. plaisanterie,/., joke, joking. plaisir, m., pleasure. plante,/., sole of the foot. plâtre, m., plaster. plein -e, full; à —e maina, plentifully. pléthore,/., plethora. pleurer, to weep, cry. VOCABULARY 135 plearmchea-^r -se, whimperer. pli, m., letter. plomb, m,j lead. plamage, m., plumage, feathers. plame,/., pen. plupart,/., most, most part. plus, more; — ... que, more . . . than ; le — , the most ; ne • . . — , no more, no longer; non — , either, neither ; — de, more than, no more; de — , moreover; — . . * — , the more . . . the more. plusieurs, several. plutôt, rather. poche,/., pocket. piOdle, m,, stove. poésie,/., poem. poignée,/, handful. poil, tn.f hair. poing, m., fist; coups de — , fîsticuffs. point, M., point ; au — du jour, at daybreak ; de tous — s, in every respect, exactiy. point, no, not. pointu --e, pointed, shrill. poirier, m., pear-tree. poisson, m,f fish. poitrine, /., chest. police,/., police. poliment, politely. politesse,/., politeness. politique,/, politics, policy. politique, political. polka,/., polka. pomme,/., apple. pommier, m,, apple-tree. pompe,/., pomp, splendor. porc, m., hog. porte, /., door; à la — , out of doors ; de — en — , from door to door. portefaix, m,, porter, street- porter. portefeuille, m.^ portfolio. porter, to carry, wear, bear. porter (se), to be directed. porteur, m., carrier, bearer. portrait, m,, description, por- trait. posséder, to possess, own. possession,/., possession. possible, possible. poste, m,, post. pot-au-feu, m., kettle. potier, m,f potter. pouah! an expression of dis- gust. poulailler, ««., hencoop. poule,/, hen. poupée,/., doll. pour, for, to, in order to, as for» as to ; — que, so that. pourceau, m., hog, pig. pourquoi, why. poursuite, /., pursuit, chase. poursuivre, to pursue, chase. pourtant, y et, however. pousser, to push, grow, ut ter; qui poussait devant lui, who drove before him; — un soupir, to heave a sigh. poussière,/, dust. pouvoir, can, may, to be able. pouvoir, m., power. Ï36 VOCABULARY pratiquer, to practise. pré, m., meadow. précepteur, m., tutor, preceptor. précipiter (se), to rush, préjugé, m.j préjudice. premi-er -ère, first. prendre, to take, seize, grasp. près, near. présence,/., présence, présent (à), at présent présent -e, présent. présenter, to présent, introduce. préserver, to keep, préserve, président, fft., président présider, to préside, pressé -e, in a hurry. presser, to press, urge. prêt -e, ready. prétendant, m,, suitor. prétendre, to claim, prétend, lay claim to. prétendu -e, pretended, feigned. prêtre, m., priest. preuve,/., proof. prévenir, to anticipate, foresee, inform, wam. prévenu, sff prévenir, prévoir, to foresee. prier, to pray, beg. prière,/., request, prayer. prince, m., prince, princesse,/., princess. princi-er -ère, princely. principe, m., principle. printemps, m., Spring. prise,/., hold, effect ; lâcher — , to let go one's hold. prison,/., prison, jail. prisonni-er -ère, prîsoner. prix, m.f price, value, prize; à tout — , at any price. probablement, probably. procès, m., trial, lawsuit. prochainement, soon, in a short time. proclamation,/., proclamation, proclamer, to proclaim. procuration,/., proxy, procurer, to procure, prodige, m., prodigy, wonder. prodiguer, to lavish, be lavish of, be prodigal of. profanation,/., profanation, profit, m,, benefît, profit. profiter, to avail oneself, take advantage, profit. profond -e,*profound, deep. profondément, deeply, pro- foundly. progrès, w., progress. projet, m., project; — de loi, bill. promenade,/., walk, promenade, promener (se), to promenade, walk. promeneu-r -se, promenader. promesse,/., promise, promettre (se), to promise one- self. prononcer, to pronounce, utter. propos (à), apropos, on accouni of. prox>oser, to propose, proposition,/., proposai, propo sition. propre, own. VOCABULARY 137 çr08crire, to banish, proscribe. protecteur, m., protector. protéger, to protect. prouYer, to prove. prorerbe, OT.,.proverb. prmrince,/., province. prudent -e, prudent, cautions. prune,/., plum. pmnier, m., plum-tree. pu, sâe pouvoir, puia, then. puisque, since, as. puissance, /., power. puisse, see pouvoir, pût, see pouvoir. quaker, m,, quaker, friend. qualité,/., quality. quand, when, even if. quant à, as to. quarante, forty. quart, m., fourth, quarter. quartier, m^ quarter ; — géné- ral, headquarters (mUitary). quatre, four. quatrième, fourth. que, whom, which, that. que, than, that, which, what, when, as, how; — de, how many, how much. quel -le, what, which. quelque, some, few, whatever. quelquefois, sometimes. ouenouille,/., distaff , distaffful. querelle,/., quarrel ; chercher — à, to pick up a quarrel with. quereller (se), to quarrel. qui, who, which, whom. quiétude,/., quiétude. quinze, fifteen. quitter, to leave. quitter (se), to leave each other. quoi, which, what; sur — , whereupon; de — , enough; sans — , otherwise. quoique, although. R rabattre, to pull down. race,/., race, klnd. racheter, to redeem. Rachimbourg, 1»., prop. noun. raconter, to tell, relate, rage,/., rage. Raguse,/., Ragusa. raillerie,/., jeer, mockery. raisin, m., grapes. raison, /., reason ; avoir — , to be right. raisonner, to reason, argue. rameau, 01., bough, branch. ramener, to bring back. rang, m., rank. ranger, to arrange. [lina ranger (se), to draw up, fall in lanimer, to revive, stir up. rapidement, rapidly. rappeler, to recall, remind, call back. rapporter, to bring back. rare, rare, scarce. rareté,/., rarity, rareness. rasoir, m., razor. rassasier (se), to satisfy one's hunger. 13» VOCABULARY rassembler, to gather, coUect. rassurer (se), to tranquillise oneself, be reassured. ravine, /., ravine. ravir, to charm; à — , wonder- fuUy well. raya, m., peasant. rébellion,/., rébellion. rebondi -e, prominent. récent -e, récent. reœvoir, to receive. recherche, /., search, research, investigation. récit, m., story, récital, relation. réciter, to recite, quote. recoller, to glue, put on again. récolte, /., harvest, crop ; faire la — , to take in the harvest. recommandation, /., recommen- dation. recommander, to recommend. recommencer, to commence again. récompenser, to reward, recom- pense. reconduire, to take back, lead back. reconnaissance, /., gratitude, gratefulness. reconnaître, to acknowledge, re- cognize. récrier (se), to utter an exclama- tion, cry out. reculer, to draw back, recoil. rédiger, to write out, draw up. redoutable, redoubtable, to be feared. redouter, to fear, dread. réduire, to reduce, compel, ob- lige, diminish. réduit, m,, retreat, small hottse, lodging. refaire, to make again, do again. réfléchir, to reflect, think. réflexion, /., reflection. refroidir, to cool down. refuge, m., refuge. refuser, to refuse. regagner, to regain; — sa de- meure, to retum home. regard, m., glance, look, gaze. regarder, to look at, regard, consider, concem. regarder (se), to look at on« another. régence, /., regency. régiment, m., régiment. régler, to regulate. règne, m,, reign. régner, to reign. regret, m., regret. regretter, to regret. régularité,/., regularity. reine,/., queen. rejeter (se), to throw oneself. réjoui -e, jovial, merry. relever, to put up, raise. relever (se), to rise again, re- cover. religion,/., religion. remarier (se), to marry again. remarquer, to notice. remède, m., remedy ; aux grands maux les grands — s, a des- perate disease needs a des- perate cure. r« re re ifi le re le le re n n VOCABULARY 139 remercier, to thank. remettre, to deliver, remit, put again. remettre (se), to commence again. remonter, to wind, go up again. remords, m., remorse. remplir, to fill. remuer, to move, stir, shake. renard, m., fox. rencontrer, to meet. rendre, to render, make, give back. rendre (se), to go, proceed. rengorger (se), to carry one*s head high, puff oneself up. renoncer, to give up, renounce. rentrer, to enter again, re-enter, take in, bring in. renversé -e, thrown back. renvoyer, to dismiss, send back. répandre, to spill, shed. réparer, to repair. répéter, to repeat, recite. répondre, to answer, reply, cor- respond, respond. reporter, to carry back, report. repos, m,f rest, repose; en — , at rest. reposer (se), to rest. reprendre, to continue, go on, résume, reply, take again. reprit, s^e reprendre. reproche, m., reproach. reprocher (se), to reproach one- self with. répugnance, /., dislike, répug- nance. réserver, to reserve, réserver (se), to reserve to one- self. résigner (se), to resign oneself. résistance,/., résistance, résister, to resist. respect, m., respect. respectable, respectable. respecter, to respect, resplendissant -e, resplendent. ressembler, to resemble, ressource,/., resources. ressusciter, to come to lif e again. reste, m., rest, remainder. reste (du), however, neverthe- less, besides, in reality. rester, to remain, retard, m,, delay. retenir, to hold back. retirer, to take away, draw back, withdraw, pull out. retirer (se), to withdraw, go away. retomber, to fall again, f ail back. retour, m., retum ; de — , on his retum, af ter returning. retourner, to go back, retum, tum around, tum over. retraite,/., retreat. retrouver, to find again. réunir, to bring together. réussir, to succeed, be success' fui. revaloir, to repay. revaudrai, s^e revaloir, rêve, m.f dream. réveil, m,, awaking. réveiller, to awake. 140 VOCABULARY révéler, to reveal. rerenir, to corne agaîn, return, corne back ; — sur ses pas, to retrace one's steps ; — à soi, to recover one*s sensés, revive, rêver, to dream, muse, révérence,/., courtesy; bow. rêverie,/., revery, musing. revêtir, to put on, don. revêtu -e, clothed. reviendra, see revenir, revoir, to see again. revoir (se), to see oneself again. révolter (se), to revolt, revue,/, review ; passer des — s, to review the troops. riche, rich, wealthy. richesse,/, richness, wealth. rideau, m., curtain. ridicule, ridiculous. rien, nothing, anythlng; — que, nothing but. rigueur,/, rigor, severity,harsh- ness. rire, m.^ laughter. rire, to laugh; — au nez de quelqu'un, to laugh in any one's face, risque, »?., risk; à ses — ^s et périls, at one's risk. risquer, to risk. robe,/, dress, robe, gown. robuste, tobust. roche,/, rock, rocher, m., rock, rôder, to roam. roi, m., king. roidir (se), to stiffen, grow stiff. romain -e, Roman. roman, m. y romance, novel. rompre, to break up, spoil, break, ronger, to consume, gnaw. rose, pink. rose,/, rose. rose du Bengale,/, Bengal rose, rôtir, to roast. rotonde,/, rotunda. rouer de coups, to beat unmerci- fully. rouet, m., spinning-wheel. rouge, red. rougir, to redden, blush, rougissant -e^ blushing. rouler, to roll. route, /., road, way ; en — , on the way ; se mettre , to set out, start. royal -e, royal. royaume, m,y kingdom. royauté,/, royalty. ruban, m., ribbon. rubi, m., ruby. rude, hard. rue,/, Street. ruelle,/, lane, narrow street. ruine,/, ruin; menacer — , to totter. ruiné -e, dilapidated, ruined. ruiner, to ruin. ruisseau, m., brook rusé -e, shrewd. rustre, w., boor. S sa, his, her, its. VOCABULARY 141 sable, m,f sahd. sabre, m,, sabre. sac, M,, bag, sack. sache, see savoir. sacré -e, sacred. sacrifice, m., sacrifice. sacrifier (se), to sacrifice oneself . sage, wise. sagesse,/., wisdom. saint -e, boly, saintly, saint. saisir, to seize, grasp, catch, take hold of. saison,/., season. salle,/., hall. salner, to salute, bow, greet. sang, m.f blood. sanglant -e, bloody, bleeding. sans, without; — quoi, other- wise. santé,/., health. sapin, m,, fir-tree. sarcler, to weed. satisfait -e, satisfied. sauter, to jùmp, leap. sauvage, wild, savage. sauver, to save. sauver (se), to run away, flee; escape. sauveur, m., rescuer, saver. savant, m,, scholar, leamed per- son, savant. .savant -e, leamed. savoir, to know, know how, can. savon, tn,t soap. sceau, m,f seal. scélérat, m., rogue, scoundrel. scène,/., scène, sceptique, m., sceptic science,/., science, scrupule, m., scruple. séance,/., session, sitting. sèchement, dryly. second -e, second, secouer, to shake, shake of!. secours, m,, help. [cretly. secret, m., secret; en — , se- secrètement, secretly. séditieux, m., rebel. séduire, to seduce, attract. seigneur, m., lord, seize, sixteen. seller, to saddle; toute sellée, already saddled. selon, according to. semaine,/., week, semblable, such, similar, alike. sembler, to seem. semer, to scatter, sow, spread. sens, m,, meaning, signification, sensé -e, sensible, sensible, sensitive. sentier, m,, path. sentir, to f eel, smell. sentir (se), to feel oneself. séparer, to separate.* séparer (se), to part, separate. septembre, m., September. sépulcral -e, cavemous, sepul- chral. serait, sfe être, seras, sge être, serez, seâ être, sérieux, m,, seriousness, eamest- ness; au — , seriously, in eamest. sérieu-z hm, serious. 142 VOCABULARY serment, m., oath. serre, /., talon, claw. serrure,/., lock. servante,/., servant-girl, servant. service, w., service. ^ servir, to serve, wait on, be of use. serviteur, m., servant, servitude,/., servitude, ses, his, her, its. seuil, m,y threshold. seul -e, only, single, alone, sole, seulement, only. si, so, if. siècle, m., century. siège, f»., seat. sien le, la -ne, les -s, les -nés, his, hers, its. siffler, to whistle. signe, m., sign ; fit le — de la croix, made a sign of the cross, crossed herself. signer, to sign. silence, m.j silence, silencieu-z -se, silent. simple, simple, simplement,' simply. sincérité,/., sincerity. singe, m.j monkey. singuli-er -ère, singular, queer. sinon, otherwise, save that, ex- cept. Sire, m.y Sire, six, six. Smyme,/., Smyma. sœur,/., sister, soif,/., thirst. [of. soigner, to look after, take care soigner (se), to take care of oneself, nurse oneself . soin, m,f care, attention; avoir — , to be caref ul, take care. soir, f«., evening; tous les — s, every evening; le — même, the very evening. soirée,/., evening. soit, see être, soit, let it be so, ail right. soixante, slxty. soldat, m.t soldier. soleil, m,, sun. solennel -le. solemn. solide, solid. solitude,/., solitude, solliciter, to solicit. sombre, somber, melancholy, gloomy, dark. somme,/., sum. somme, m., nap; faire un — , to take a nap. sommeil, m,y sleep, sleepiness. sommet, m., summit, top. son, his, her, its. sonder, to scrutinize, sotuid. sonige, m,y dream. songer, to think. sonner, to ring. sorbet, m,, sherbet. sorcier, m,, sorcerer. sorcière,/., witch, sorceress. sort, m,j fate, lot, spell. sortir, to go out, come out, leave. sot -te, foolish, silly, fool. sottise,/., foolishness, silliness, blunder. VOCABULARY 143 son, m., cent, penny. sonci, m,, care. soucier (se), to care. soacieu-z -se, anxious, care- wom. soudain, suddenly. souffert, see souffrir, souffle, m., breath, blowing. souffler, to blow. soufflet, m,y slap in the face, souffleter, to slap in the face, spank. souffrir, to suffer. souhaiter, to wish. souiller, to soil. soulever, to raise, lift, sotilier, m,, shoe. soupçon, m.f suspicion. souper, to sup, eat supper. souper, m,, supper. soupir, m,f sigh; pousser un — , to heave a sigh. soupirer, to sigh. souple, supple. sourcil, m.f eye-brow; froncer le — , to f rown. sourciller, to frown; sans — , without moving a muscle, souriant -e, smiling. sourire, m,, smile. sourire, to smile. sous, under, by. souvenir, m.^ remembrance. souvenir (se), to remember. souvent, often. souverain sovereign. soyons, seâ être. spectacle, m,, sight,- spectacle. spectre, m,, specter, phantom. splendeur,/., splendor. Stamboul, m., Stamboul or Stambul, the Turkish name of Constantinople. stoïcien -ne, stoic. stratégiste, m,, strategist. stupéfait -e, stupefied. stupide, stupid. stupidité,/., stupidity. succès, m., success. successeur, m,, successor. suffire, to suffice, be sufficient. suis, see suivre, see être, suite,/., continuation, retinue, attendance; tout de — , at once, immediately. suivant, according to, f ollowing. suivre, to follow. sujet, m.f subject. sultan, m.f sultan, sultane,/., sultana. supplice, m., exécution, supplier, to beseech, entreat. supprimer, to suppress, do away with. suprême, suprême, sur, on, upon, over, towards, about, with, out of. sûr -e, safe, sure, certain, trust- worthy. sûreté,/., safety. surnommer, to surname. surprendre, to surprise, astonish. surpris -e, surprised. surprise,/., surprise, sursaut, m., start; en — , with a start 144 VOCABULARY surtout, above ail, especially. sonreillaiioey/., watching. Sjrrie,/., Syria. ta, thy. tabac, m,j tobacco. [table. table,/., table; — de jeu, card- tablier, m., apron. tache,/., spot, stain. tactique,/., tactics. taille,/., waist. tailler, to eut out, prune. tailleur, m,, tailor. taire, to say nothing; faire — , to silence. taire (se), to hold one*s tongue, be silent. talent, m., talent, skilL tambour, x»., drum. tandis que, while. tant, so many, so much. tante,/., aunt. tantôt, presently; — ... — , now . . . then. tapis, m, y carpet, rug. tapisserie, /., tapestry. tard, late ; pltis — , later. tâtons (à), groping. taureau, m., bull. te, thee, to thee. teindre, to dye, stain. teint, see teindre. tel -le, such. tellement, so. téméraire, rash, reckless. témoignage, m., évidence, testi- monial. témoin, m., witness. tempérer, to temper. temps, 01., time, weather; de — en — , f rom time to time, now and then ; de — à autre, f rom time to time. tendre, tender, loving. tendre, to hold out, stretch out, extend, hand. tendrement, tenderly. tendresse,/., tendemess, love, ténèbres, /.//f/r., darkness. tenir, to hold, keep, occupy, hâve, take; — sa paxole, to keep one*s word; — à, to be désirons, care for; — fenne, to hold fast. tenir (se), to remain, keep. tente,/., tent. tenter, to try, tempt. terme, m., word, term, exprès-. sion. terminer, to finish, end. terre, /., ground, land, earth; à, par — , on the ground, floor ; — s, grounds; vase de — , earthen vessel. terrible, terrible. tes, thy. tête,/., head ; donner des coups de — , to butt. téte4l-tête, m,, tête-à-tête, têtu -e, stubbom. théorie,/., theory. tien le, la — ne, les — s, les — nés, thine. tiens, see hère 1 look hère I well 1 timide, timid, bashful. VOCABULARY 145 tirer, to draw, pull, pull out ; — la langue, to put out one'9 tongue. tirer (se), to get through. tiroir, m., drawer. tisser, to weave. titre, m., title. toi, thee, thou ; chez — , to your house, apartment, room. toilette,/., dress, toilet. toi-même, thyself. toit, m,f roof, tombeau, m., grave, death. tomber, to falL ton, ffi., tone, accent. ton, thy. tonner, to thunder, roar. TontO, m.i prop, noun, tordro (se), to wring. [wrong. tort, m,i wrong ; avoir — , to be tortiller, to twist, tôt, soon; au plus — , as soon as possible, touchant ~e, touching. toucher, to touch. toujours, always, ever. . tour, m,t trick, turn; à son — , in his tum; — à — , in succes- sion, in tum. tour,/., tower. tourner, to tum, tum out, tum round, twirl round, tout, quite, thoroughly; — en, while. tout -e, tous, toutes, ail, any, every, everything. tout à fait, quite, whoUy, en- tirely. toutefois, however. toute-puissance, /., omnipo- tence, almighty power. trace, /, trace, track, step. trahir, to betray. trahison, /., treason. traîner, to pull, draw. traîner (se), to drag oneself. traire, to milk. trait, m., feature. traître, m., traitor. traîtresse, /., treacherous woman. tranquille, quiet, tranquil. tranquillement, quietly, tran- quilly. ' transmettre, to transmit. transmis, see transmettre. transporter, to convey, trans- port. travail, m., work. travailler, to work. travaux, plur, of travail. travers, m., breadth ; au — de, through ; de — , wrong. traverser, to cross, traverse. trébucher, to stumble. treillis, m., lattice-work. tremblant -e, trembling, shiver* ing. trembler, to tremble. trente-six, thirty-siz. très, very, very much trésor, m., treasure, treasury. tressaillir, to start ; faire — , to startle. tresser, to braid, weave, plait. trêve,/., iruce. 146 VOCABULARY triomphal -e, triumphal. triomphatenif, m., triumpher. triomphe, m,, triumph. triple, triple. Tristan, m.yprop. noun, triste, sad. tristement, sadly. tristesse,/., sadness. trois, three. troisième, thlrd. tromper, to deceive. tromper (se), to be mistaken. trompette, /., trumpet ; sonner de la — , to blow the trumpet. trftne, m., throne. [too well. trop, too, too much, too many, trophée, m., trophy. troquer, to swop. trouble, m., embarrassment, émotion. troubler, to trouble. troubler (se), to be disconcerted. troupeau, m., flock. trouver, to find, think. [be. trouver (se), to find oneself, to tu, thou. tuer, to kill. tuer (se), to kill oneself. turban, m., turban. Turquie,/., Turkey. Turc, «., Turk. tutoyer, to thee and thou. tutoyer (se), to say thou and thee to each other. un -e, a, an, one ; by one. à— e, one unanime, unanimous. union,/., union, universel -le, universal. université, /., university. usage, m.j usage, custom, habit; à V — , for the use. user, to use up, spend. ustensile, m., utensil. utile, usef ul. va, see aller. vacarme, m., uproar, hubbub. vache,/., cow. vaillance,/., valiance, bravery. vaillant -e, valiant, brave, vain -e, vain, senseless. vain (en), in vain, to no avail. vaincu, /»., conquered, van- quished. vainqueur, m., conqueror, victor. vaisseau, m., vessel, ship. val, m.f valley, dale. valent, see valoir, valet, m., farm-hand, valet; — de chambre, valet de chambre, valoir, to be worth; — mieux, to be better. vannier, m., basket-maker varier, to vary. vas, see aller, vase, m.f vessel, vase; — do terre, earthen vessel. vase,/., mud. va-t-en, see s'en aller. ' vaudrait, see valoir, vaut, see valoir, vaux, plur, of val. VOCABULARY 147 vécut, see vivre. veille,/., day before, eve. veine,/., vein. velours, m., velvet. velu -e, hairy. vendre, to sell. vénérable, vénérable. vengeance, /., revenge, venge- ance. venger, to avenge. venger (se), to revenge oneself. venir, to corne ; à — , future, to come;, — de, to hâve just. vent, m., wind. ventre, m., abdomen, belly, stomaçh. verdir, to grow green. verdure,/., verdure. véritable, real, genuine, true. vérité,/., truth, verity. verras, see voir. verront, see voir. verrou, m., boit. vers, towards. verser, to pour, shed, pour out. vert -e, green. vertement, sharply, vigorously. vertu,/., virtue. vertueu-z -se, virtuous. veste,/., coat. vêtu -e, dressed, clothed. veuf, w., wldower. veuille, see vouloir. veuve,/., widow. veux, see vouloir. viande,/., méat. vicieu-z -se, vicious, faulty. victime,/., victim. vide, m., emptiness. vide, empty. vider, to leave, vacate. vie, /., life, living. vieillard, /»., old man. vieillir, to grow old. viendront, see venir. vieuz, vieil -le, old. vi-f -ve, spirited, keen, eager. vigilance, /., vigilance, watch- fulness. vigilant -e, vigilant. vigoureu-z -se, vigorous. vilain -e, ugly. village, m.^ village. ville,/., city. vin, m., wine. vingt, twenty. vingtaine, /., score, about twenty. vingt-cinq, twenty-five. vingt-quatre, twenty-four. vint, see venir. violence, /, violence, harsh treatment. violent -e, violent. violet -te, purple. violette,/., violet. visage, tn,^ face, visage. visite,/., visit, call. vite, quick, quickly, soou, fast; au plus — , as soon as pos- sible. vitrail, ««., stained window. vitrauz, plur, of vitrail. vivacité, /., liveliness, vivacity, ardor. vivant -e, lively, living, alive. 148 VOCABULARY vivre, to live. vizir, m,^ vizier. vociférer, to vociferate, cry out. vœn, m., wish, vow. voici, hère is, hère are, behold. voie,/., way, road. voilà, hère are, hère is, there is, there are, behold. voir, to see. voisin -e, neighbor. voiture, /., wagon, carriage. voix,/., voice ; à haute — , aloud. volée,/., shower (of blows). / voleur, m., thief ; — de grand chemin, highwayman ; au — ! thief I volontaire, obstinate, wilful, h^adstrong. volonté, /., wish, will; à sa — , at his will, pleasure; bonne — , good will, readiness. volontiers, willingly. votre, your. vôtre, le, la; les — s, yours. voudrais, see vouloir. vouloir, to wish, will, want; •^• dire, to mean. vous, you, to you. vous-même, yourself. voyage, 01., voyage, trip, travel; être en — , to be travelling. vrai -e, true, genuine. vraisemblance,/., probability. vraiment, truly, indeed. vu, see voir, vue,/., sight, view. W WieduwiUst, m., prop. noum. Y y, there, to it, to them, in ît, in them, about it, of it, of him, of her; il — a, there is, there are, ago; il — avait, there was, there were, ago. yeux, p/ur, of œil. Tousouf , m., prop, noun. Z zèle, m., zeai. ZlohOgtLf/^ prop, noun. ADVERTISEMENTS * 1)eatb'0 Aobern Xanguage Séries^ FREHCH 6RAMMAR8 AITD READERS. Edgmi'8 Compendions Franch Giammar. #i.ia. Edgren's French Gxammar, Part I. 35 cts. Fraser and Sqoair's French Grammar. |x.x2. Fraser and Sqoair's Abridged French Grammar. ^x.io. Fraser and Sqoair's Elementaiy French Grammar. 90 cts. Grandgent's Essentials of French Grammar. I1.00. Broce's Grammaire Française. |z.i2. Grandgent's Short French Grammar. Help in pronunciation. 75 cts. Grandgent's French Lessons and Exercises. First Year's Course for Grammar Schools, 25 cts. Second Year's Course, 30 cts. Grandgent's Materials for French Composition. £ach, la cts. Grandgent's French Composition. 50 cts. 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Super of Dickinson Collège. 35 cts. Aboot't Le Roi des Montagnes (Logie). 40 cts. Vocabulary, 50 cts. Paillersn's Le Monde où l'on s'ennuie. A comedy with notes by Professor Pendleton of Bethany Collège, W. Va. 30 cts. SsuTeatre's Le Mari de Mme de Solange. With notes by Professor Super of Dickinson Collège. 20 cts. Historiettes Modernes. VoL I. Short modem stories, selected and edited, with notes, py C. Fontaine, Director of French in the High Schools of Washington, D.C. 60 cts. Historiettes Modernes, Vol. II. Short stories as above. 60 cts. Fleurs de France. A collection of short and choice French stories of ré- cent date with notes by C. Fontaine, Washington, D.C. 35 cts. Saadeaa's Mlle, de la Seiglière. With introduction and notes by Pro- fessor Warren of Yale University. 30 cts. Soovestre's Un Philosophe sons les Toits. With notes by Professor Fraser of the ÛniTersity of Toronto. 50 cts. With vocab. 55 cts. SeaTSStre's Les Confessions d'an OoYiler. 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Hdlbig'8 Kombdie auf der Hochschule. With introduction and notes by Professor Wells of the University of the South. 30 cts. Keller's Romeo und Jalia auf dem Dorfe. With introduction and notes by Professor W. A. Adams of Dartmouth Collège. 30 cts. Complète Catalogue of Modem Language Texts sent on request. 1)eatb's Aobern Xanguage Setfea* mXEHMEDIATB FRENCH TBXTS. (Partial List.) Lamartine'8 Sc'ônes de la Révolotioii Fransaise (Super). With notes and vocabulary. 40 cents. Lamartine's GrazieUa (Warren). 35 cts. Lamartine*8 Jeanne d'Are (Barrère). Vocabulary. 35 cts. BQchelet: Extraita de Thistoire de France (Wright). 30 cts. Hugo'8 La Chate. From Les Miséraâies (Huss), Vocabulary. 30 cts. Hago'a Bag Jargal (Boïelle). 40 cts. Hugo*8 Quatre-vingt-treize (Fontaine). Vocabulary. 50 cts. Champfleary'8 Le Violon de Faïence (Bévenot). 25 cts. Gaatier'8 Voyage en Espagne (Steel). 25 cts. Balzac'8 Le Curé de Tours (Carter). 25 cts. Balzac : Cinq Scènes de la Comédie Homaine (Wells). 40 cts. 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La Brète's Mon Oncle et Mon Curé (Colin). Vocabulary. 45 cts. Meilhac and Halévy's L'Eté de la St.-Martin (François). Vocab. 25 cts. Yoltaire's Zadig (Babbitt). Vocabulary. 45 cts.